Une Israélo-russe détenue par une milice chiite en Irak – Bureau du Premier ministre
L'universitaire Elizabeth Tsurkov était entrée grâce à un passeport russe en mars; elle retenue par la milice chiite Kataëb Hezbollah, un groupe paramilitaire soutenu par l'Iran
Elizabeth Tsurkov, une analyste spécialiste du Moyen-Orient, ressortissante israélo-russe portée disparue depuis plusieurs mois en Irak est détenue par une « milice » chiite dans ce pays, a affirmé mercredi le bureau du Premier ministre israélien dans un communiqué.
Tsurkov s’était rendue en Irak avec son passeport russe et de sa propre initiative pour poursuivre son travail et ses recherches nécessaires pour son doctorat pour le compte de l’université Princeton, aux États-Unis, a ajouté le Bureau.
Tsurkov a disparu depuis plusieurs mois et elle serait retenue en otage par la milice chiite Kataëb Hezbollah, un groupe paramilitaire soutenu par l’Iran, a indiqué le bureau. Cette organisation est distincte du Hezbollah. Le Bureau a ajouté que qu’elle « est en vie et nous considérons l’Irak comme responsable du sort qui lui sera réservé et de sa sécurité ».
Tsurkov était partie pour l’Irak pour des travaux de recherche sur les factions soutenues par la république islamique dans le pays et, en particulier, sur le mouvement du leader chiite irakien Moqtada Sadr. Étudiante en doctorat à Princeton, elle était précédemment allée sur le terrain en Syrie, en Irak, en Jordanie et dans d’autres pays de la région, déclare son site internet personnel.
Des sources issues des services irakiens de renseignement, qui ont été citées par l’AFP, ont expliqué que Tsurkov avait été enlevée « au début du ramadan », le 23 mars, alors qu’elle quittait un café du quartier de Karada. « Elle était en train de partir du café Ridha Alwan cafe, » a précisé le New York Times, un café qui est situé dans un secteur fréquenté par les Occidentaux comptant « de nombreux cafés, magasins de vêtements et autres marchés ».
Un diplomate occidental stationné en Irak a fait savoir que Tsurkov était arrivée à Bagdad « au début du mois de décembre 2022. » Selon le Times, « elle avait subi en urgence une intervention chirurgicale au dos et elle était en train de se rétablir de cette opération quand elle a été kidnappée ».
Un officiel israélien a estimé que Tsurkov, âgée de 36 ans, avait été enlevée en raison de ses nationalités étrangères, russe et israélienne. Il a nié certaines informations retransmises dans les médias arabes qui ont laissé entendre qu’elle travaillait pour les services de renseignement israéliens.
« Elle n’est absolument pas membre du Mossad, point final, point d’exclamation et je le souligne encore », a dit le responsable au cours d’un point-presse avec les journalistes israéliens. Il a noté que Tsurkov était en vie, qu’elle était en bonne santé et que le gouvernement israélien était en contact avec sa famille.
Un autre responsable du gouvernement a confirmé, mercredi, que Tsurkov avait déjà voyagé en Irak, pays considéré comme ennemi par Israël (le New York Times a cité des officiels irakiens disant qu’elle avait fait plus d’une dizaine de séjours en Irak). Selon la loi israélienne, il est illégal, pour les citoyens israéliens, d’entrer dans un pays ennemi, même grâce à un passeport étranger.
Le responsable a précisé qu’Israël, les États-Unis et la Russie travaillaient de concert pour tenter d’obtenir la libération de Tsurkov dans les meilleurs délais.
L’enlèvement n’a été annoncé qu’aujourd’hui en raison des articles parus dans la presse étrangère, a-t-il fait remarquer, ajoutant que la publicité entourant sa situation compliquait les efforts livrés pour obtenir sa remise en liberté. L’information avait été signalée pour la première fois dans un article écrit en anglais, le 14 juin, par Michael Rubin, spécialiste de l’Iran au sein du American Enterprise Institute, qui était consacré au pouvoir croissant des milices soutenues par l’Iran en Irak. Elle avait ensuite été reprise par les autres médias.
Le dernier Tweet écrit par Tsurkov datait du 21 mars. Sa mère a précisé qu’elle ignorait que sa fille se trouvait en Irak.
« La dernière fois que j’ai eu de ses nouvelles, c’était il y a deux mois et elle m’avait dit qu’elle était en Turquie », a-t-elle commenté.
Tsurkov, qui a fait son service militaire au sein de Tsahal et qui parle l’anglais, l’hébreu, le russe et l’arabe, est titulaire de deux diplômes en relations internationales et en études du Moyen-Orient de l’Université hébraïque et de l’Université de Tel Aviv. Tsurkov est membre du Foreign Policy Research Institute, un groupe de réflexion américain et du Israeli-Palestinian Forum for Regional Thinking, basé à Jérusalem.
Elle a aussi travaillé, il y a plusieurs années, pour l’ancien ministre du cabinet Natan Sharansky, a fait savoir ce dernier mercredi.
Le New Lines Institute a indiqué qu’il avait perdu contact avec Tsurkov le 19 mars. Elle avait alors déclaré à ses collègues, semble-t-il, qu’elle « en avait assez de travailler sur le terrain au Moyen-Orient et qu’elle voulait retourner à Princeton ».
Une semaine seulement plus tard, les personnels de New Line ont été informés de son enlèvement et ils ont pris la décision de ne pas médiatiser cette information en espérant qu’elle serait vite libérée « et par respect pour le désir de la famille », selon un article qui a été publié dans le magazine de l’Institut. Un détail qui contredit l’affirmation faite par la mère de Tsurkov, qui a dit ne pas savoir où se trouvait sa fille.
Selon le think-tank, Tsurkov, « une critique féroce des politiques sécuritaires nationales d’Israël », sera libérée lors de négociations impliquant l’Iran et probablement aussi la Russie, dans la mesure où elle est ressortissante russe.
Reuters a fait savoir que le Département d’État américain avait indiqué avoir eu connaissance de l’enlèvement et qu’il avait condamné le kidnapping de citoyens civils.
L’Irak, de son côté, n’a fait aucun commentaire officiel depuis que la trentenaire a été portée disparue. Quelques jours après son enlèvement, un site internet local a fait savoir qu’un citoyen iranien impliqué dans sa disparition avait été placé en détention par les autorités irakiennes. Il a indiqué qu’elle avait été enlevée dans le quartier de Karradah et que l’ambassade iranienne, dans la capitale irakienne, réclamait la libération de l’individu et son expulsion vers la république islamique.
Des activistes irakiens avaient posté une copie du passeport de l’homme iranien à ce moment-là, disant qu’il était impliqué dans le kidnapping.
Le groupe Kataeb Hezbollah (les brigades du Hezbollah) est l’un des groupes soutenus par l’Iran les plus importants en Irak. Il s’était établi au mois de mars 2003, suite à l’invasion américaine du pays. La milice a été reconnue par le gouvernement irakien comme faisant partie intégrante des forces de sécurité irakiennes dans le cadre des Forces populaires de Mobilisation, un groupe créé pour éradiquer l’organisation de l’État islamique.
La milice se trouve aujourd’hui au cœur de l’establishment sécuritaire irakien tout en étant soumise, dans les faits, au Corps des Gardiens de la révolution islamique, selon le Meir Amit Intelligence and Terrorism Information Center.
L’AFP a contribué à cet article.