Une start-up cultive du poulet… sans poulet
SuperMeat, développé par un ingénieur biomédical de l’Université hébraïque, promet de la viande à la fois végétalienne et casher

Les fondateurs d’une start-up israélienne basée sur la technologie alimentaire veulent que vous puissiez profiter de votre viande sans culpabilité – ni animaux.
SuperMeat, qui s’est lancé en décembre et a commencé une campagne de crowdfunding en ligne lundi, développe une méthode pour de la « viande cultivée » par la bioingénierie à partir de cellules animales. Son slogan : « De la vraie viande, sans nuire aux animaux ».
Imaginez un blanc de poulet sans poulet, développé dans une machine, à partir de cellules prélevées sur un oiseau vivant et cultivées dans un bouillon riche en éléments nutritifs.
La société a déjà attiré l’attention en Israël grâce à un marketing habile, à des soutiens de célébrités et à la couverture des médias. Mais cette notoriété importante a soulevé quelques questions difficiles pour deux groupes de mangeurs israéliens : ceux qui observent la casheroute et les végétaliens.
Le co-fondateur et co-chef de la direction de SuperMeat, Koby Barak, lui-même militant végétalien et pour les droits des animaux de longue date, a déclaré que la viande cultivée dans son entreprise sera à la fois casher et accessible aux végétaliens, et il a suffisamment de soutiens pour le prouver.
« J’ai parlé à environ 10 rabbins et je ne vois pas de problème. Elle [la viande] sera casher », a déclaré Barak à JTA. « La grande majorité du mouvement végétalien-végétarien nous est très favorable, et nous les remercions pour leur véritable soutien ».
Parmi les rabbins et les militants végétaliens, cependant, le débat sur ce qu’il faut précisément faire de SuperMeat, et de la viande que l’entreprise cultive en général, est loin d’être résolu.
SuperMeat n’est pas la première entreprise à produire de la viande cultivée, mais c’est la première à se concentrer sur le poulet. D’autres ont déjà produit du bœuf, et au moins une société travaille avec du porc. Mark Post, qui a fait la Une des journaux avec son premier hamburger de culture en 2013, a dit à JTA qu’il espère être le premier à lancer son produit, récemment appelé Mosa Meat, sur le marché d’ici quatre à cinq ans.
SuperMeat pense que ce qui le rend unique est sa technologie brevetée, qui est développée par le co-fondateur de la société et son chef de la recherche, Yaakov Nahmias, ingénieur biomédical à l’Université hébraïque de Jérusalem.
La production fonctionnera ainsi : les cellules seront prélevées sur un poulet sans que ce dernier n’en souffre de quelconque manière et mises dans une machine spéciale qui simule la biologie de l’oiseau, leur permettant de s’auto-assembler pour former de la viande.
Barak a déclaré que le processus pourrait révolutionner la façon dont le monde mange, limitant énormément la dégradation de l’environnement, la souffrance des animaux et les pandémies mondiales. D’autres viandes pourraient être créées en utilisant plus ou moins le même processus, a-t-il affirmé.
L’objectif de la collecte de fonds lancée sur Indiegogo est de 100 000 dollars, ce qui, comme Barak l’espère, démontrera l’intérêt des consommateurs aux investisseurs, dont il aura besoin pour lever des millions d’autres dollars.
Mise à part la science, SuperMeat se démarque réellement dans son marketing. Entre les vidéos d’acteurs et de mannequins sur la page Facebook de l’entreprise, des témoignages d’ultra-orthodoxes et de rabbins sionistes religieux sont enregistrés.
Cultured meat will be kosher. Soon kosher cultured pork meat for Jews and Muslims?Special thanks to:The Modern Agriculture FoundationShlomo Avinerהרב דב ליאורהרב יובל שרלו Rabbi Yuval Cherlow
Posted by SuperMeat on Sunday, April 17, 2016
Dov Lior, le grand rabbin de Hébron et de Kiryat Arba en Cisjordanie, et Yuval Cherlow, un rabbin de Raanana qui a aidé à fonder le groupe rabbinique sioniste religieux Tzohar, soutiennent sur la vidéo que SuperMeat sera parveh.
Ils disent que les cellules animales ne comptent pas comme de la viande et que le processus de SuperMeat transforme de toute façon les cellules en une substance entièrement nouvelle. S’appuyant sur la même logique, disent-ils, la gélatine de porc est casher – une position avec laquelle beaucoup d’autres rabbins orthodoxes sont en désaccord.
« Ici, dès le début, ce n’est pas considéré comme de la viande, car c’est une chose microscopique… Et même si c’était vraiment de la viande, comme elle a changé de forme, un « nouveau visage est arrivé ici » et il n’est pas considéré comme de la viande, et c’est clairement parveh », a déclaré Lior, en utilisant une expression talmudique qui signifie que quelque chose qui avait déjà été interdit n’est plus interdit en raison de l’évolution des circonstances et qui ne contient pas de viande.
D’autre part, Yisrael Rosen, directeur de l’Institut Zomet, qui travaille à concilier la loi juive orthodoxe et la technologie, a déclaré que la viande de SuperMeat est de la viande et suggère qu’elle aura besoin de supervision rabbinique.
Rabbi Yisrael Rozen on cultured meat
Rabbi Yisrael Rozen on cultured meat.Special thanks to:The Modern Agriculture FoundationYisrael Rozen
Posted by SuperMeat on Saturday, April 30, 2016
Cherlow a expliqué à JTA qu’il s’attendait à ce que les Haredi et les rabbins sionistes religieux soient divisés sur cette question. Il a dit que c’est en partie parce que les sionistes religieux sont davantage prêts à considérer des facteurs extra-légaux, comme le bien-être de la planète, que la plupart des rabbins Haredi. Le grand rabbinat d’Israël va pêcher pour les Haredim, a prédit Cherlow.
« Le rabbinat tente d’inclure tout le monde, ainsi donc il ira vers les opinions les plus extrêmes », a-t-il dit. « Mais je pense que quand il y a un grand besoin, je pense que la plupart des rabbins diront que vous devriez » accepter la position plus clémente.
Prié de dire si la viande de porc en culture serait cashère, Cherlow a déclaré : « Emotionnellement c’est plus difficile. Mais logiquement, c’est la même réponse ».
L’Union orthodoxe basée à New York n’a pas encore pris position sur la viande cultivée. (Le groupe ne reconnaît pas la gélatine de porc comme casher). Mais le rabbin Moshe Elefant, le chef de l’exploitation du département de la casheroute de l’Union orthodoxe, a suggéré que le produit ressemblait beaucoup à la viande. Il a également confirmé que la position de l’Union orthodoxe serait fondée uniquement sur la loi juive.
« Nous sommes évidemment très préoccupés par l’environnement, mais notre première considération est toujours la halakha », a-t-il affirmé à JTA.
Les préoccupations de SuperMeat sont plus en ligne avec celles des végétaliens et des défenseurs des animaux. Après tout, une grande partie du personnel de l’entreprise vient de cet univers. Comme Barak, le co-fondateur et co-directeur général de SuperMeat, Ido Savir, est un militant végétalien et des droits des animaux depuis près de deux décennies. Les deux hommes ont quitté des emplois dans l’industrie high-tech d’Israël pour se joindre à l’entreprise et se concentrer à temps plein sur la cause de la viande cultivée.
Ces racines profondes dans l’envolée du mouvement végétalien et des droits des animaux en Israël donnent à SuperMeat le soutien de la rue. Parmi les partisans enthousiastes, on trouve le militant végétalien et restaurateur Ori Shavit et les dirigeants des groupes de défense basés en Israël The Vegan North et 269.
« Je suis un grand admirateur du dévouement des personnes derrière ce projet », a déclaré le fondateur de 269, Sasha Boojor, connu pour s’être marqué au fer rouge avec les numéros de son mouvement, lors d’une manifestation en 2012 sur les droits des animaux à Tel-Aviv.
« Bien sûr, il serait préférable que les gens décident d’arrêter de manger des animaux, mais ce n’est pas la réalité à laquelle nous faisons face à l’heure actuelle. Et cette recherche peut répondre à la souffrance de centaines de milliards d’animaux qui souffrent chaque année sans aucune raison ».
Boojor a ajouté : « Si les gens mangent de la viande cultivée, ça ne me pose absolument aucun problème. Cela ne me pose aucun problème d’en manger moi-même ».
Mais d’autres militants peuvent mettre en garde contre la séduction SuperMeat.
« SuperMeat ne représente pas le changement d’état d’esprit auquel nous travaillons », a déclaré Sharbel Balloutine, le fondateur d’un groupe arabo-israélien appelé The Vegan Human, qui travaille avec des Juifs pour promouvoir le végétalisme et les droits des animaux. « Nous travaillons sur la compassion. Nous travaillons sur la justice. Et voilà ce qui m’attire vraiment dans mon activisme végétalien ».
Anonymous, un autre groupe activiste israélien, a envoyé à JTA une déclaration disant : « Nous souhaitons à SuperMeat bonne chance dans sa recherche, nous nous félicitons de toute initiative qui peut aider les animaux. Cependant, nous devons nous rappeler en tant que consommateurs, que nous ne devons pas attendre une percée scientifique pour sauver les animaux. … Il n’y a pas de besoin nutritionnel pour la viande ».
Nahmias, le cerveau scientifique derrière SuperMeat et l’un des rares omnivores du personnel, a expliqué à JTA que son travail est motivé par son amour pour les schnitzels, un aliment de base en Israël qu’il dit être de plus en plus impropre à la consommation.
« Quand j’étais gosse, je mangeais ce que ma mère et ma grand-mère cuisinaient. Et je veux que mes enfants soient en mesure de manger le même genre de schnitzels », a-t-il dit. « Voilà la raison pour laquelle je fais cela ».
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.

Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel