Une universitaire dont les travaux sont utilisés pour justifier le terrorisme palestinien nommée à la direction de l’armée de l’air américaine
Heather Wilson ne cite pas le conflit israélo-palestinien quand elle affirme que les mouvements de libération nationale peuvent utiliser la force, mais son livre a été mentionné par un universitaire anti-Israël pour défendre le Hamas
Eric Cortellessa couvre la politique américaine pour le Times of Israël
WASHINGTON – La personne choisie par le président américain Donald Trump pour diriger le département de l’armée de l’air du Pentagone a affirmé que les mouvements de libération nationale pouvaient avoir raison de recourir à la force, une interprétation du droit international qui a été utilisée par des détracteurs d’Israël pour soutenir les actes des terroristes palestiniens.
En 1988, Heather Wilson a publié International Law and the Use of Force by National Liberation Movements (Droit international et utilisation de la force par les mouvements de libération nationale), dans lequel elle affirme que l’action militante est justifiée quand elle est utilisée par des mouvements de libération qui tentent de renverser le joug du colonialisme, et que la force ne devait pas être employée pour supprimer de tels mouvements.
« Dans ce monde postcolonial, le déni de l’autodétermination est généralement considéré comme un mal d’une telle amplitude que l’usage de la force pour le garantir peut être justifié », a-t-elle écrit, et « l’usage de la force pour nier le libre exercice du droit à l’autodétermination d’un peuple est contraire aux principes du droit international. »
Wilson, ancienne élue républicaine de la Chambre du Nouveau Mexique entre 1998 et 2009, a été nommée en janvier par Trump pour diriger le département de l’armée de l’air au Pentagone, mais doit encore être confirmée.
Elle a été la directrice chargée de la politique de défense européenne et du contrôle des armes au Conseil de sécurité nationale du président George H. W. Bush.
Même si les écrits académiques de Wilson, écrit avant qu’elle n’entre en politique, ne mentionnent pas le conflit israélo-palestinien comme exemple de mouvement de libération nationale qui pourrait faire usage de la force, ils ont été utilisés dans le débat politique qui entoure le conflit.
Elle cite par exemple la lutte algérienne pour l’indépendance de la colonisation française, qui a entraîné une guerre brutale entre 1954 et 1962, et est perçue par certains comme le prototype du terrorisme utilisé pour parvenir à des réussites diplomatiques.
Norman Finkelstein, militant pro-palestinien et universitaire controversé, a cité les travaux de Wilson au plus fort de la guerre de 2014 entre Israël et le Hamas pour justifier les actions du Hamas contre Israël, et accuser Israël de mener illégalement une campagne militaire.
Dans un article publié sur le site internet Jadaliyya et intitulé « HRW [Human Rights Watch] blanchit Israël, le droit soutient le Hamas : réflexions sur le dernier massacre d’Israël », Finkelstein avait utilisé le livre de Wilson comme preuve des malfaisances israéliennes.
Alors que les combats atteignaient un niveau intense cet été-là, Finkelstein avait affirmé que le Hamas avait le droit avec lui, en incluant une note citant le livre de Wilson pour soutenir cet argument.
« Le droit international interdit à une puissance occupante d’utiliser la force pour supprimer une lutte pour l’autodétermination, avait-il écrit, alors qu’il n’interdit pas à un peuple luttant pour son autodétermination d’utiliser la force. »
Le conflit de 2014, qui a duré 50 jours, avait commencé après que trois adolescents israéliens avaient été enlevés et assassinés par des terroristes du Hamas. Quand Israël avant lancé une offensive pour arrêter les dirigeants du groupe islamiste que règne sur la bande de Gaza, le Hamas avait commencé à tirer des milliers de roquettes contre des centres de population civile israéliens.
Selon les chiffres palestiniens cités par le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, 1 462 civils avaient été tués, sur un total de 2 251 victimes gazaouies pendant la guerre. Israël a pour sa part affirmé que la moitié des morts palestiniens étaient des combattants, et avait accusé le Hamas d’être responsable des morts civils par sa stratégie de placer délibérément ses lanceurs de roquettes, ses tunnels et ses autres installations militaires au milieu des civils. Soixante-treize personnes avaient été tuées côté israélien, majoritairement des soldats.
Finkelstein n’est pas le seul auteur pro-palestinien à citer Wilson. John Quigley, professeur de droit à l’université de l’état de l’Ohio, avait lui aussi utilisé ses travaux dans son livre The Case for Palestine: An International Law Perspective.
Dans ce livre, Quigley affirme que les doctrines du droit international ont été utilisées pour favoriser Israël et ont été ignorées pour les Palestiniens.
Wilson n’a pas répondu à plusieurs demandes de commentaire du Times of Israël.
Robert Jervis, professeur d’affaires internationales à l’université Columbia, a dit au Times of Israël qu’il était surpris que quelqu’un ayant les opinions de Wilson sur ce sujet soit adoubé par l’actuel président américain.
« Je trouve que c’est une position étrange pour quelqu’un appartenant à l’administration Trump », a-t-il dit.
« Les arguments ne tiennent pas »
D’autres experts expliquent que sa thèse était trop large, et qu’elle ne devait pas s’appliquer au conflit israélo-palestinien.
« Je ne pense pas que l’on puisse être si catégorique », a dit au Times of Israël, par e-mail, Michael O’Hanlon, chercheur en politique étrangère de l’Institut Brookings, en faisant référence à son argument général. « Les états nations n’apprécient pas tous les mouvements de libération interne ou d’indépendance, et ne tolèrent pas de violence de leur part ; nous ne le ferions pas ici. »
« Les groupes oppressés ont au minimum le droit à la sécurité, et il peut parfois y avoir un jugement estimant qu’ils méritent la séparation, l’autonomie ou l’indépendance, comme seul moyen possible pour cette sécurité, a-t-il ajouté. Mais je ne suis pas à l’aise avec les arguments généraux sur ce sujet, et ils ne tiennent clairement pas en termes de comment le monde traite actuellement les différents mouvements d’autodétermination, ou de comment le font les Etats-Unis. »
D’autres sont perplexes que Wilson ait exposé son argument principal pour justifier l’usage de la force par des mouvements de libération nationale sur des bases légales.
« Il n’y a vraiment aucune règle du droit international qui traiterait ce sujet d’une manière ou d’une autre », a déclaré au Times of Israël l’ambassadeur Richard Schifter. « Ce qu’il se passe, c’est que des individus vont utiliser la force, et ils peuvent avoir un argument moral s’ils utilisent la force contre un establishment militaire oppressif, ils peuvent avoir le droit moral de s’opposer à cela et d’utiliser la force contre lui, mais il n’y a pas de principe juridique ici. »
Diplomate expérimenté, Schifter a notamment été le sous-secrétaire d’Etat en charge des affaires humanitaires dans les administrations Reagan et Bush, l’ambassadeur des Etats-Unis auprès de la commission des droits de l’Homme des Nations unies et de la commission des conventions et des recommandations de l’UNESCO, et le vice-représentant américain au Conseil de sécurité des Nations unies.
« Pensez-y seulement, a-t-il ajouté. Le Tibet est oppressé depuis longtemps par la Chine. Si les Tibétains se révoltent, en auront-ils le droit légal ? Non, certains diront qu’ils ont le droit moral de le faire. »
Schifter a également souligné que le conflit israélo-palestinien ne semblait pas être « une situation appropriée pour y appliquer une telle formule. »