Washington envoie des signaux contradictoires sur l’alternative arabe au plan de Trump pour Gaza
Le Département d'État et la Maison Blanche qualifient le plan arabe d'inadéquat ; selon Steve Witkoff, il présente des caractéristiques intéressantes et constitue un bon premier pas

Jeudi, l’administration Trump a envoyé des signaux contradictoires concernant son opinion sur le plan arabe dirigé par l’Égypte pour la gestion d’après-guerre de Gaza.
Plus tôt dans la journée, l’envoyé spécial des États-Unis au Moyen-Orient, Steve Witkoff, a qualifié la proposition de « premier pas de bonne foi » avec « de nombreuses caractéristiques convaincantes ». Quelques heures plus tard, cependant, la porte-parole du Département d’État, Tammy Bruce, a qualifié la proposition « d’inadéquate ».
La position de Bruce lors de sa première conférence de presse semblait plus en phase avec celle exprimée par le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Brian Hughes, peu après la présentation du plan au Caire, selon laquelle il ne tenait pas compte de « la réalité que Gaza est actuellement inhabitable » et que le président américain Donald Trump maintenait sa proposition de prendre le contrôle de Gaza et de déplacer tous ses Palestiniens.
Mais c’est Witkoff – et non le Département d’État ou le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche – qui est largement considéré comme la personnalité la plus influente de l’administration en ce qui concerne les questions relatives au Moyen-Orient et au-delà, à l’exception de Trump lui-même, qui a exprimé à plusieurs reprises sa confiance en son envoyé.
La contre-proposition de l’Égypte a reçu l’aval du sommet de la Ligue arabe qui s’est tenu mardi au Caire. Le plan a été élaboré à la hâte après que les nations arabes ont été indignés par la proposition de Trump, présentée début février, de prendre le contrôle de Gaza, d’en déloger les habitants et de reconstruire l’enclave pour en faire la « Côte d’Azur du Moyen-Orient ».
Le plan arabe prévoit qu’un comité indépendant de technocrates dirigera Gaza pendant six mois avant de transférer le contrôle de la bande de Gaza à l’Autorité palestinienne (AP). Il prévoit que les Palestiniens resteront dans la bande de Gaza pendant sa reconstruction, contrairement à la proposition de Trump qui prévoit le déplacement de toute la population.

La contre-proposition prévoit le déploiement de troupes internationales de maintien de la paix à Gaza par le biais d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. Dans l’intervalle, l’Égypte et la Jordanie formeraient des policiers de l’AP, qui seraient ensuite envoyés à Gaza pour y maintenir l’ordre public.
Ce plan ne mentionne pas le groupe terroriste palestinien du Hamas par son nom, mais affirme que la question et le sort des groupes armés à Gaza ne peuvent être pleinement résolus que par un processus politique qui établit un État palestinien.
Cependant, la Ligue arabe, dans une déclaration approuvant le plan égyptien, a affirmé que la sécurité de Gaza « reste une responsabilité exclusive des institutions palestiniennes légitimes, conformément au principe d’une seule loi et d’une seule arme légitime » – indiquant que la présence de groupes armés autres que les forces de sécurité de l’AP ne serait pas acceptée.
Si la Ligue arabe a approuvé ce plan, plusieurs dirigeants ont brillé par leur absence au sommet du Caire, notamment le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane et le président des Émirats arabes unis Mohamed ben Zayed, ce qui a été interprété comme une marque de leur réticence à l’égard de la contre-proposition égyptienne. Les deux pays, en particulier les Émirats arabes unis, se sont fermement opposés à toute présence du Hamas à Gaza.
Certains analystes soutiennent que la proposition de l’Égypte n’est qu’un point de départ dans les pourparlers avec les États-Unis et que le Caire pourrait être prêt à adopter une ligne plus dure contre le Hamas si Israël accepte la création d’un État palestinien.
Une telle situation n’est absolument pas envisageable pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, mais le monde arabe espère utiliser son influence pour faire changer d’avis Jérusalem, étant donné que les États-Unis ne devraient pas s’impliquer directement dans la reconstruction de Gaza et qu’Israël pourrait donc se retrouver seul embourbé à Gaza s’il ne reçoit pas l’aide de ses alliés arabes.
S’adressant aux journalistes jeudi, Bruce a approuvé l’effort arabe pour aborder la question de la gouvernance d’après-guerre à Gaza, mais a déclaré : « Le [plan] arabe ne répond pas […] à la nature de ce que le président Trump demandait. »
Le plan de Trump était « une invitation à de nouvelles idées, et il semble avoir suscité de nouvelles idées » dans le monde arabe, a déclaré Bruce. Cependant, a-t-elle ajouté, ce que Washington a vu jusqu’à présent de la part de ses alliés ne s’est pas avéré « adéquat ».

La porte-parole du Département d’État n’a pas précisé ce qui, selon la Maison Blanche, manquait au plan de l’Égypte, mais a déclaré que les États-Unis n’accepteraient pas un cadre qui conduirait à un retour du cycle de la violence à Gaza. Elle a souligné que le Hamas ne saurait continuer à exister dans la bande de Gaza.
Plus tôt dans la journée, Witkoff a réaffirmé que la reconstruction de Gaza prendrait entre dix et quinze ans, période pendant laquelle la bande de Gaza serait inhabitable. Il a toutefois évité de critiquer le plan égyptien, qui permettrait aux Palestiniens de rester à Gaza pendant sa reconstruction en divisant l’enclave en sept zones et en travaillant sur chacune d’elles successivement.
« Nous évaluons tout ce qui se passe là-bas. Il est un peu tôt pour faire des commentaires », a répondu Witkoff à une question concernant cet aspect du plan égyptien.
« Nous devons en discuter davantage, mais c’est un premier pas de bonne foi de la part des Égyptiens. »

Comme Bruce, Witkoff a suggéré que l’un des objectifs du plan de Trump était d’inciter les alliés régionaux à proposer des alternatives.
« Le point essentiel est que ce dont le président Trump parle maintenant à Gaza encourage d’autres personnes au Moyen-Orient à présenter des propositions proactives pour ce que nous pourrions envisager », a expliqué Witkoff.
Selon une analyse de l’ONU datant de septembre, plus des deux tiers des structures de Gaza ont été endommagées ou détruites au cours de la guerre qu’Israël mène contre le groupe terroriste palestinien du Hamas, déclenchée par le pogrom perpétré par ce dernier le 7 octobre 2023, date à laquelle quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël, tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevé 251 otages de tous âges – commettant de nombreuses atrocités et perpétrant des violences sexuelles à grande échelle. 59 personnes sont toujours otages à Gaza.