Washington exige des comptes d’Israël suite à la frappe « horrible » à Gaza tuant des enfants
Le ministère de la Santé du Hamas rapporte 93 morts à Beit Lahiya, chiffre contesté par Tsahal ; l'envoyée de Biden dénonce l’écart entre déclarations et actions d'Israël sur l’aide aux civils
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

WASHINGTON – Le porte-parole du département d’État Matthew Miller a fait savoir mardi que les États-Unis avaient contacté Israël pour obtenir des explications sur une frappe aérienne « horrible » dans le nord de la bande de Gaza, faisant état de plus d’une vingtaine d’enfants parmi les victimes.
Ces préoccupations humanitaires, réitérées par l’administration Biden, s’inscrivent dans un contexte où Israël dispose encore de 30 jours pour répondre aux demandes américaines d’amélioration des conditions de vie dans la région, sous peine de perdre une partie de l’aide sécuritaire des États-Unis.
« Selon certaines sources, une vingtaine d’enfants auraient été tués dans cet incident, avec parmi eux, des enfants qui, sans aucun doute, fuient les ravages de cette guerre depuis plus d’un an maintenant », a affirmé Miller lors d’un point de presse, ajoutant qu’il n’avait pas encore reçu d’explication de la part d’Israël sur cette frappe.
Au moins 93 Palestiniens auraient été tués et des dizaines d’autres blessés lors de la frappe de Tsahal sur un immeuble résidentiel à Beit Lahiya mardi, selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le groupe terroriste palestinien du Hamas, qui ne distingue pas entre civils et terroristes. Des secouristes cités par Reuters ont indiqué qu’au moins 20 enfants figuraient parmi les morts.
Tsahal a publié un communiqué indiquant qu’elle était au courant de ces informations et qu’elle avait ouvert une enquête à ce sujet. L’armée n’a pas nié être à l’origine de la frappe, mais a conseillé de ne pas se fier au bilan non vérifié des victimes fourni par le Hamas.
La zone de Beit Lahiya a reçu un ordre d’évacuation au début du mois, en amont de l’offensive de Tsahal dans la ville du nord de la bande de Gaza. L’armée mène également des opérations dans les villes voisines de Jabalia et de Beit Hanoun, afin de mettre un terme à la résurgence des activités du Hamas dans ces zones.

De nombreux Palestiniens n’ont pas pu évacuer la zone, soit par crainte des tirs israéliens, soit sous la menace de terroristes du Hamas leur interdisant de suivre les consignes israéliennes de quitter la zone. Bien que des dizaines de milliers de personnes soient parties, plusieurs centaines de milliers de personnes se trouveraient encore dans la partie nord de la bande de Gaza.
Selon le service palestinien des urgences civiles, environ 100 000 personnes seraient bloquées à Jabalia, Beit Lahiya et Beit Hanoun, sans accès aux soins ou à la nourriture.
Ces conditions ont suscité l’inquiétude des organisations humanitaires, qui pensent qu’Israël tente de mettre en œuvre le « General’s plan », pour encercler le nord de la bande de Gaza. Toutefois, lors d’une rencontre avec le secrétaire d’État américain Antony Blinken, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a nié un tel plan tout en refusant de le dire publiquement comme le lui avait demandé Blinken.
Ces deux dernières semaines, plusieurs centaines de camions d’aide ont été acheminés vers le nord de la bande de Gaza, en réponse aux appels de la communauté internationale alarmée par l’absence d’aide la première quinzaine d’octobre.
Miller a rappelé mardi que plus d’un an après le pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre, Israël avait réussi à décimer les dirigeants et les capacités militaires du Hamas, empêchant ainsi le groupe terroriste de perpétrer une autre attaque de ce type, mais que cela « avait coûté cher aux civils de Gaza ».
« Il est crucial… qu’Israël… trouve un moyen de mettre fin à cette campagne de manière à ramener les otages chez eux et à garantir leur sécurité, plutôt que de perpétuer un conflit sans fin », a déclaré Miller.
Il a précisé que les États-Unis ne demandent pas qu’Israël se retire unilatéralement de Gaza, ce qui risquerait de créer un vide de pouvoir et de permettre au Hamas de reprendre le contrôle de la bande.

L’administration Biden pousse plutôt à une solution qui verrait l’Autorité palestinienne (AP) remplacer le Hamas dans la gestion de la bande de Gaza après la guerre. Près d’une dizaine de pays arabes ont proposé de contribuer à sécuriser la bande de Gaza après la guerre si Israël acceptait de permettre à l’AP de s’établir dans l’enclave.
Cette idée a toutefois été catégoriquement rejetée par Netanyahu, qui assimile l’AP au Hamas. Très peu de progrès ont, par ailleurs, été accomplis par le Premier ministre concernant la planification du « jour d’après » depuis plus d’un an.