Yesh Din réclame une enquête sur Bezalel Smotrich
L'élu avait recommandé l'interdiction des voitures arabes d'une route de Cisjordanie. 25 incidents de violences anti-arabes ont été alors enregistrés en 24 heures
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Le groupe des droits de l’Homme Yesh Din a soumis lundi une requête officielle auprès du procureur-général Avichai Mandelblit, lui demandant d’ouvrir une enquête pénale sur le député Bezalel Smotrich en raison d’un tweet écrit par le législateur de HaBayit HaYehudi qui recommandait vivement aux résidents d’implantations de bloquer une route majeure, en Cisjordanie, aux voitures palestiniennes.
« Ce tweet aurait dû amener les forces de l’ordre à lancer une enquête immédiate sur d’éventuels délits d’incitations à la violence et au racisme de la part du député Smotrich », a écrit Michael Sfard, un avocat représentant l’ONG de gauche, dans sa plainte adressée à Mandelblit.
Quelques heures après une fusillade perpétrée au carrefour de Givat Assaf, dans le centre de la Cisjordanie, qui a fait deux morts – deux soldats – et deux blessés graves, jeudi dernier, Smotrich avait écrit sur Twitter : « J’appelle mes amis et pionniers héroïques [habitants d’implantations] à sortir ce soir et à fermer la Route 60 sur toute son étendue au déplacement des véhicules arabes ».
« S’il y a des attentats terroristes, il n’y aura plus d’Arabes sur les routes », a-t-il conclu.
אני קורא לחבריי המתיישבים הגיבורים והחלוצים לצאת הערב ולסגור את ציר 60 לכל אורכו לתנועת כלי רכב ערבים. אם יש פיגועים אין ערבים בצירים. החיים שלנו קודמים לאיכות החיים שלהם. pic.twitter.com/PWYEeQcF0D
— בצלאל סמוטריץ' (@bezalelsm) December 13, 2018
Dans une vidéo filmée depuis le carrefour de Givat Assaf qui avait été postée sur Twitter cette nuit-là, Smotrich a renouvelé son appel, disant que « nos vies sont plus importantes que leur qualité de vie ».
Dans les 24 heures qui ont suivi la requête du député, Yesh Din dit avoir collecté 25 incidents de violences menées par des habitants d’implantations contre des Palestiniens dans toute la Cisjordanie. Parmi ces derniers, des tirs à balles réelles sur des habitations des villages d’Ein Yabroud et de Beitin; des jets de pierres sur des voitures palestiniennes aux carrefours de Givat Assaf, Yitzhar et Kedumim; et l’abattage d’oliviers dans les bourgades de Turmusaya et de Tuwani. Plus d’une douzaine de Palestiniens ont été pris en charge pour des blessures lors de ces attaques violentes, selon le ministère de la Santé de l’Autorité palestinienne à Ramallah.
« Même en admettant que les violences exercées à l’encontre de Palestiniens innocents, à distance des routes qui ont été bloquées [par les habitants d’implantation] ne peuvent être de manière directe et sans équivoque reliées à Smotrich, les perturbations qui ont eu lieu jeudi soir et vendredi… ne laissent aucune place au doute concernant le fait que l’appel du député est tombé dans des oreilles attentives et qu’il a en effet incité les ‘habitants héroïques d’implantation’ à passer à l’acte », a écrit Sfard dans son courrier à Mandelblit.
Le représentant juridique de Yesh Din a affirmé que la seule manière de bloquer la route principale reliant le nord et le sud de la Cisjordanie aux usagers palestiniens – ce que demandait Smotrich – était le recours à la violence, ce qu’ont fait les habitants d’implantations.
« Lors d’une journée où les émeutes faisaient rage dans l’un des territoires les plus violents et les plus volatiles après une série d’attentats meurtriers, un membre de la Knesset a appelé ses soutiens à violer la loi et à nuire aux Palestiniens, simplement parce qu’ils sont Palestiniens », a écrit Sfard.
« L’affaire est claire et elle fait naître des soupçons qui justifient au moins l’ouverture d’une enquête pénale contre le député Smotrich pour incitation à la violence et au racisme », a-t-il conclu.
Le bureau du procureur-général a reçu la plainte mais il n’a pas encore répondu.
Le message publié par Smotrich sur Twitter est survenu pendant une semaine de violences meurtrières dans toute la Cisjordanie.
Quatre jours avant l’attaque commise à Givat Assaf, un terroriste palestinien a ouvert le feu depuis un véhicule en circulation sur un groupe d’Israéliens qui se tenaient à un arrêt de bus, à proximité de l’implantation d’Ofra. Sept personnes ont été blessées, dont une femme enceinte dont l’enfant, né en urgence par césarienne, n’a pas survécu.
Vendredi dernier, un Palestinien a poignardé un soldat israélien et lui a frappé la tête à l’aide d’une pierre, le blessant grièvement, dans un poste militaire situé aux abords de l’implantation de Beit El. Le terroriste a alors pris la fuite, entraînant une chasse à l’homme, mais il s’est ultérieurement rendu aux autorités.
Jeudi matin, deux agents de la police des frontières ont été légèrement blessés dans une attaque à l’arme blanche à Jérusalem, porte de Damas.