6 arrestations lors des protestations contre la refonte devant le domicile de Levin
La police utilise du gaz poivré alors que les manifestants brûlent des pneus et tentent de bloquer la route ; le ministre accuse les forces de l'ordre de lenteur intentionnelle
Des centaines de manifestants opposés à la refonte du système judiciaire du gouvernement ont organisé mardi une manifestation devant le domicile du ministre de la Justice Yariv Levin. Ils ont promis d’intensifier les protestations contre l’avancement du projet de loi controversé visant à restreindre le pouvoir de la Cour Suprême de Justice en matière de réexamen judiciaire des décisions gouvernementales.
La police a arrêté six manifestants qui avaient brûlé des pneus devant le domicile de Levin, dans la ville de Modiin, et tenté de bloquer la route, provoquant des échauffourées lorsque certains manifestants ont voulu empêcher les voitures de patrouille de la police de partir.
Les policiers ont ensuite utilisé du gaz poivré pour disperser les manifestants et une vidéo montre la police tentant de dégager par la force des manifestants assis dans la rue.
Les manifestants ont également placé des fils barbelés dans la rue et arboré de grandes répliques de salamis pour protester contre l’approche du gouvernement, qui semble avoir adopté la loi de refonte au coup par coup, parfois appelée « tactique du salami« , plutôt qu’en une seule fois, dans un effort apparent pour éviter les manifestations de masse.
Un communiqué de la police a déclaré que les manifestants avaient troublé la paix dans cette ville habituellement calme, reprochant aux « émeutiers d’avoir brûlé des pneus au cœur d’un quartier résidentiel ». Elle a ajouté que le commandant local avait ordonné aux officiers de répondre « de manière résolue ».
Le rassemblement était organisé par Frères d’armes, un groupe de manifestants composé de réservistes de l’armée.
כעת מול ביתו של שר המשפטים: פעילי ״אחים לנשק״ מפגינים נגד יריב לוין וחוסמים את הכביש. גם צמיגים הובערו כבר pic.twitter.com/L1wby7BzA0
— Ran Shimoni (@ran_shimoni) June 27, 2023
« Il est déjà clair pour tout le monde aujourd’hui, qui dirige réellement ce pays et le mène à la ruine, mais nous allons libérer ce pays de son emprise », a déclaré l’organisation en parlant de Levin, l’architecte principal de la refonte. « Dans les semaines qui viennent, nous allons intensifier la lutte pour la nature du pays, et la nation d’Israël doit, dans toute sa force, se joindre aux efforts pour sauvegarder la démocratie ».
Avant la manifestation, les organisateurs avaient demandé aux participants d’éviter tout comportement violent et de ne pas affronter la police, selon le site d’information Ynet.
Des manifestations contre le projet de réforme du système judiciaire ont déjà eu lieu devant le domicile de Levin, l’un des principaux partisans de ces propositions radicales visant à limiter l’autorité du système judiciaire, qui est également le numéro 2 du Likud, le parti au pouvoir du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
מפגינים נגד הרפורמה מחו מול ביתו של שר המשפטים לוין @hadasgrinberg pic.twitter.com/Pc0jCpaJgL
— כאן חדשות (@kann_news) June 27, 2023
Levin a ensuite publié un communiqué très ferme dans lequel il affirmait que « par chance ou par miracle », les manifestants n’avaient pas incendié d’appartement dans son immeuble résidentiel, et semblait accuser la police d’avoir été intentionnellement lente à réagir.
Il a également reproché à la procureure générale Gali Baharav-Miara de s’opposer à ses projets de loi qui visent à affaiblir le système judiciaire et à transférer une partie de ses pouvoirs aux élus.
« Les incidents violents, les appels ouverts à la rébellion, les menaces et les incitations à la violence… n’ont jusqu’à présent pas suscité une seule réaction publique de la part de la procureure générale ou de son équipe », a accusé Levin.
« Quand ils ne font pas un clin d’œil aux instigateurs, la procureure générale et le système d’application de la loi sous son autorité ignorent les violences et laissent libre cours au non-droit », a-t-il encore allégué.
Levin a également dénoncé une « application sélective de la loi » et a déclaré que la manifestation « prouvait une fois de plus » qu’une transformation radicale du système judiciaire était nécessaire.
« Je suis déterminé. Ils ne parviendront pas à me dissuader. Je ne dévierai pas de mon chemin. Je remplirai la mission qui m’a été confiée par le public », a-t-il déclaré. « La réforme doit être adoptée. »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a partagé un communiqué sur les scènes survenues devant le domicile de Levin, qu’il a accusées d’être « le résultat direct des appels à la rébellion et au soulèvement civil. » Il faisait référence aux appels de l’ancien Premier ministre Ehud Barak à la « désobéissance civile non violente » et à la « révolte » contre les mesures prises par le gouvernement pour réformer le système judiciaire.
« Le temps est venu pour la procureure générale et la police israélienne d’agir avec toute leur puissance et leur détermination contre les contrevenants à la loi, sans considération de religion, de race, de zone géographique ou d’opinion politique », a affirmé Netanyahu dans un communiqué publié par le Likud.
Le ministre de la Sécurité nationale d’extrême droite, Itamar Ben Gvir, qui a exhorté la police à faire preuve de plus de fermeté à l’égard des manifestants, a demandé à la police de procéder à l’arrestation des « anarchistes » présents devant le domicile de Levin, assurant que si les manifestants de droite s’étaient comportés de la même manière, des dizaines d’entre eux auraient déjà eu les menottes aux poignets.
« Malheureusement, une poignée d’émeutiers paralyse Israël avec le soutien de la procureure générale Gali Baharav-Miara », a déclaré Ben Gvir, sans preuve, dans un communiqué.
Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, à la tête du parti d’extrême droite HaTzionout HaDatit, a sans surprise dénoncé les manifestants parlant d’eux comme d’une « poignée de personnes violentes qui sont prêtes à tout brûler ici. »
« Ils ne nous décourageront pas », a tweeté Smotrich.
Il a également accusé les forces de l’ordre de « déréliction intentionnelle et discriminatoire contre les anarchistes violents et criminels de l’extrême gauche ».
La manifestation devant le domicile de Levin s’est déroulée alors que la commission de la Constitution, du droit et de la justice de la Knesset devait se réunir mardi pour de nouveaux débats sur un projet de loi qui interdirait aux tribunaux de procéder au réexamen judiciaire sur la base du concept juridique de « raisonnabilité » des décisions prises par le gouvernement. Lors d’une audition lundi, le procureur général adjoint a averti que la proposition ouvrirait un « trou noir » juridique et « nuirait gravement aux valeurs démocratiques fondamentales ».
La coalition de Netanyahu a officiellement relancé son plan de refonte radicale du système judiciaire, cette semaine, en s’attaquant à la notion juridique de « raisonnabilité », s’appuyant sur ses aperçus glanés lors des négociations avec l’opposition visant à trouver un compromis qui lui ont donné la conviction que cette dernière s’opposerait moins à cette restriction qu’à d’autres.
Toutefois, plutôt que de simplement réduire les conditions permettant aux magistrats de réexaminer une décision gouvernementale à travers le prisme de la « raisonnabilité », la coalition a présenté une proposition très large qui supprimerait toute supervision des tribunaux dans de nombreuses décisions susceptibles d’être potentiellement prises par des responsables élus.
La Cour pourrait encore utiliser la notion juridique de « raisonnabilité » contre des responsables non-élus et elle pourrait utiliser d’autres notions juridiques et statutaires lorsqu’elles sont applicables.
Les manifestations contre le plan de réforme plus large de la coalition en sont à leur 25e semaine, rassemblant une multitude de voix universitaires, judiciaires, diplomatiques, économiques et politiques de l’opposition qui mettent en garde contre le fait que le plan de la coalition constitue une menace pour le système de gouvernance démocratique et libéral d’Israël.
Les négociations intersectorielles menées sous les auspices du président Isaac Herzog ont été interrompues, sans qu’aucun progrès tangible n’ait pu être enregistré. Après s’être opposée au recours de la notion de « raisonnabilité » pour les élus, la coalition prévoit de remanier l’organe de sélection les juges, au cours de la session d’hiver de la Knesset.