81 % des plaintes pour viol en Israël classées sans suites
C'est l'association des centres d'aide aux victimes de viol qui a donné ces chiffres à la Knesset ; "J'ai l'impression d'un échec permanent", dit une députée
Selon une information rendue publique, lundi, par l’Association des centres d’aide aux victimes de viol (ARCCI), en 2023, 81 % des plaintes pour harcèlement sexuel ou agression sexuelle en Israël n’ont donné lieu à aucune inculpation.
À l’appui des chiffres présentés lundi à la commission de la Knesset pour la promotion des femmes, l’ARCCI a rappelé que 6 405 plaintes pour abus sexuels ou harcèlement sexuel avaient été déposées auprès de la police en 2023, soit une baisse de 3 % par rapport à l’année précédente. Dans le lot, 4 823 plaintes ont été adressées aux services du procureur de l’État, mais seulement 663 d’entre elles ont donné lieu à une inculpation.
Selon les données de l’ARCCI, 81 % des plaintes n’ont pas donné lieu à inculpation – dans plus des deux tiers des cas en raison de ce qui est qualifié de manque de preuves et dans 20 % des cas en raison d’un prétendu manque de culpabilité –, 17 % ont abouti à une inculpation et 2 % se sont réglées par un accord à l’amiable.
L’organisation a souligné que ses chiffres différaient quelque peu de ceux avancés par les services du procureur – pour lesquels 22 % des plaintes ont donné lieu à inculpation et 76 % ont été classées sans suites – en raison du calendrier des décisions et de l’année de dépôt des plaintes.
Pnina Tamano-Shata, députée du parti HaMahane HaMamlakhti et présidente de la commission de la Knesset en question, a ajouté que les chiffres étaient « très durs » et témoignaient d’« une véritable calamité nationale », accusant les procureurs de réserver aux plaintes « un classement vertical ».
« Pas plus tard qu’hier, on a appris le cas ô combien difficile du viol collectif d’une jeune fille âgée de 15 ans dans le nord du pays », a déclaré Tamano-Shata. « Nous ne pouvons pas nous permettre d’arrêter de faire tout ce que nous pouvons pour lutter contre ces agissements ignobles qui profanent l’âme de nos garçons et de nos filles. »
Orit Sulitzeanu, directrice de l’ARCCI, a expliqué à la commission qu’en 2023, 133 plaintes avaient été déposées pour crime sexuel présumé de la part d’agents de police, et que les deux tiers avaient été classées sans suites sans même une enquête, et 91 % des cas restants ne donnant au final lieu à aucune inculpation.
Un représentant de la police a affirmé que le chiffre n’était en réalité que de 43 % de plaintes classées sans suites sans enquête. Tamano-Shata a répondu qu’un tel chiffre restait « extrêmement grave » et a demandé qu’une autre réunion soit consacrée à la question.
« J’ai l’impression d’un échec permanent », a-t-elle ajouté. « Nous devons créer une commission chargée de la lutte contre les abus sexuels. »
Matti Sarfati Harkavi, députée du parti Yesh Atid, a déclaré lors de cette réunion : « La situation qui est la nôtre, à nous femmes, est tout sauf satisfaisante et ces chiffres sont inquiétants. Et cela affecte tous les pans de notre existence. Et tout le monde se désintéresse de cette lutte. »
Selon les informations communiquées par l’ARCCI, les plaintes concernant l’envoi ou la diffusion de photos à caractère sexuel sans consentement ont plus que doublé entre 2022 et 2023, avec un total de 367 plaintes déposées l’an dernier contre 171 un an plus tôt.
Selon ces mêmes informations, dans les six premiers mois de la guerre Israël-Hamas déclenchée par le massacre du 7 octobre 2023, l’ARCCI a reçu plus de 26 000 appels, dont plus de 8 000 de personnes n’ayant précédemment jamais appelé, beaucoup le faisant en s’excusant, « de crainte que le fait de demander de l’aide à pareil moment n’était pas légitime ».
Selon les mêmes sources, certains de ces appels ont été passés par des habitantes du nord et du sud évacuées vers des centres d’accueil et exposées à des abus sexuels dans leur nouvel environnement.
À l’issue de ces tout premiers mois, le nombre d’appels est revenu à son niveau habituel d’avant-guerre.