Près de six mois se sont écoulés depuis le dernier attentat-suicide dans les rues de Dahiya, quartier chiite de Beyrouth et bastion du Hezbollah.
Après un certain nombre d’attaques meurtrières de groupes radicaux sunnites, notamment la Brigade Abdullah Azzam, sur des cibles iraniennes et du Hezbollah, il semble que l’organisation chiite ait réussi, au prix de beaucoup d’efforts, à y mettre fin, même temporairement.
Les activités du Hezbollah sur le côté syrien de la frontière, et les raids de l’armée libanaise sur les bastions terroristes, expliquent ce succès.
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Mais une cause majeure de la stabilisation de la situation sécuritaire dans les zones chiites est la « zone de sécurité » du Hezbollah, créée sur la frontière entre la Syrie et le Liban.
Elle consiste en une série de bases permanentes établies par l’organisation au cours des derniers mois, afin d’éviter l’infiltration de terroristes sunnites au Liban.
Ces postes sont situés principalement dans le secteur central de la frontière. En partie, le mouvement des véhicules au nord et au sud est entravé, et peut être surveillé et contrôlé par le Hezbollah sans besoin d’une présence 24h/24.
Le Hezbollah considère le centre de la frontière comme particulièrement problématique. L’organisation a compris que cette zone devait être fermée et sécurisée, et que des patrouilles aléatoires ou une surveillance à distance ne suffiraient pas.
Elle a pris conscience qu’il fallait contrôler ce secteur 24 heures par jour, 7 jours par semaine. C’est pourquoi elle a décidé de construire des bases permanentes surplombant l’ensemble du secteur, sur le modèle de la zone de sécurité israélienne au Sud-Liban jusqu’en 2000.
Selon diverses estimations, 1 000 combattants du Hezbollah sont stationnés dans les postes. Ajoutez à ce chiffre les 4 500 à 5 000 membres qui luttent contre les forces de l’opposition en Syrie. Les patrouilles autour du secteur central partent de ces avant-postes. Le Hezbollah essaie aussi d’enrôler des collaborateurs locaux susceptibles de fournir des renseignements en temps réel.
Les combattants sont protégés par des fortifications et des tranchées, et sont assistés par un effort logistique complexe, y compris un ravitaillement organisé en nourriture, vêtements et armes.
En d’autres termes, il ne s’agit pas du Hezbollah des années 1990, ni même de la dernière décennie. L’organisation chiite n’opère plus uniquement comme un groupe terroriste ou de guérilla. Il a également adopté le modus operandi d’une armée conventionnelle dans ses efforts de maintenir les combattants sunnites hors du Liban, ni plus ni moins.
Cette initiative a eu lieu parallèlement et en coordination avec l’armée libanaise, qui a repris cette semaine des bastions islamistes dans la ville septentrionale de Tripoli. Après de violents combats dans les quartiers de la ville, l’armée libanaise a annoncé lundi après-midi qu’elle avait fini de nettoyer la ville.
En dépit de ces réalisations, le conflit entre sunnites et chiites au Liban est loin d’être terminé. Et le Hezbollah a également subi un certain nombre de défaites à l’est, sur le sol syrien.
Selon un haut responsable israélien, l’organisation a perdu plus de 1 000 combattants dans les combats aux côtés des forces du président Bashar el-Assad à ce jour. Ce chiffre est énorme, beaucoup plus élevé que les estimations précédentes de pertes du Hezbollah en Syrie.
Les campagnes du Hezbollah aux côtés de l’armée syrienne pour reprendre les régions de Deraa et Nawa dans le sud-ouest de la Syrie, non loin de la frontière israélienne, se sont conclues sur une défaite. A Kalmon, repris par le Hezbollah il y a quelques mois, des combats sanglants font rage entre ses combattants et ceux du Front al-Nosra.
Cela complique encore la situation pour le Hezbollah. Ses membres sont répartis dans trois pays : en Irak, d’où certains de ses principaux conseillers sont revenus dans des cercueils ; en Syrie, à Damas (principalement autour de la célèbre mosquée chiite Sayyidah Zaynab) ; et, bien sûr, au Liban.
Le Hezbollah est toujours confronté à beaucoup de surprises de groupes affiliés à Al-Qaïda, à l’Etat islamique et au Front al-Nosra, qui veulent affaiblir sa position au Liban. Cette semaine, une escalade a eu lieu près du village sunnite Aarsal, qui se trouve à la frontière syrienne et contrôle la partie chiite de la vallée de la Bekaa. Le village est peuplé d’un grand nombre de réfugiés sunnites syriens, ainsi que par des militants, qui cette semaine ont tiré des roquettes depuis le village vers la ville voisine de Labweh.
Et Israël dans tout cela ?
Il semble que le Hezbollah soit trop occupé à combattre au Liban et en Syrie, pour être motivé à guerroyer avec Israël.
Certes, la frontière entre Israël et le Liban a connu une escalade dangereuse, entre autres avec la découverte de champs de mines, qui fait quatre soldats israéliens blessés. Ce qui illustre le potentiel de détérioration de la situation.
Et le commandant du Hezbollah, responsable de la planification des attaques contre Israël depuis le Golan est Jihad Mughniyeh, le fils d’Imad Moughnieh, le chef de terroriste et commandant militaire qui a été éliminé en 2008. Ceci malgré le fait que seulement une petite partie du plateau du Golan reste sous le contrôle de l’allié du Hezbollah, l’armée syrienne (principalement dans la région druze d’Al-Khader).
Pourtant, avec un tiers de sa main-d’œuvre combattante dans un autre pays, et plus de 1 000 morts, il serait particulièrement aventureux pour le secrétaire général du groupe, Hassan Nasrallah, de conduire le Hezbollah vers une autre confrontation avec Israël en ce moment.