Après les critiques d’Eisenkot, un responsable assure que Netanyahu mène des consultations « très sérieuses » sur Gaza
Membre du cabinet de guerre, l'ancien chef d'état -major critique la conduite des combats et estime que le Premier ministre ne consulte personne sur la question cruciale de la succession du Hamas
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Suite aux critiques d’un membre du cabinet de guerre selon lesquelles Benjamin Netanyahu hésitait à prendre des décisions importantes, un responsable israélien a fait savoir au Times of Israël que le Premier ministre menait d’intenses consultations sur l’avenir de Gaza.
« C’est Netanyahu qui a lancé tout le travail du Conseil de sécurité nationale et du ministère des Affaires stratégiques, sans compter celui mené par les services de sécurité dont l’armée israélienne », a déclaré ce responsable jeudi.
« C’est le Premier ministre qui a demandé à tout le monde de mener des consultations », a poursuivi le responsable. « Ce sont des consultations très profondes et très sérieuses. »
Plus tôt dans la journée, Kan News avait indiqué que Gadi Eisenkot, qui a le statut d’observateur au sein du cabinet de guerre, reprochait à Netanyahu de perdre du temps dans cette guerre contre le Hamas et s’inquiétait du fait que les décisions les plus importantes soient prises unilatéralement, pour autant qu’elles soient prises.
Cette source s’appuie sur les déclarations qu’aurait fait Eisenkot, ex-chef d’état-major de Tsahal, devant ses collègues du parti Kakhol lavan lors d’une réunion de faction mercredi, à savoir que « le Premier ministre tergiverse ».
« Il ne consulte personne et ne prend pas de décisions sur les questions cruciales », aurait dit Eisenkot, ajoutant que le Hamas profitait de cette inaction.
« Netanyahu ne prend pas de décision sur la question du successeur du Hamas, ce qui fait que près de 60 % de l’aide entrant à Gaza finit entre les mains du Hamas », aurait déclaré Eisenkot, selon Kan.

« Pendant que le Premier ministre prend son temps et retarde la prise de décisions importantes, le Hamas reconstitue des capacités, revient dans le nord de la bande de Gaza et s’arroge l’aide humanitaire », a-t-il déclaré.
Pour l’heure, en raison de ce qu’il qualifie d’exigences « délirantes », Israël ne se dit plus intéressé par de nouvelles négociations avec le Hamas pour conclure un accord sur la libération des otages.
Ces derniers jours, le Hamas a présenté sa réponse à la proposition-cadre d’Israël et des médiateurs égyptiens et qataris. Selon les informations disponibles, l’organisation terroriste aurait demandé un cessez-le-feu de quatre mois et demi au cours duquel les otages auraient été libérés en trois phases, avant de sonner la fin des hostilités et la libération de 1 500 prisonniers, dont un tiers serait choisi sur la liste de Palestiniens purgeant des peines de prison à vie.
Lors d’une conférence de presse mercredi, Netanyahu a rejeté les conditions du Hamas, assurant que seule une pression militaire constante garantirait la libération des otages israéliens.
Le cabinet de guerre s’est réuni jeudi pour formuler officiellement la réponse d’Israël.
Ce n’est pas la première fois qu’Eisenkot critique la conduite de la guerre.
En janvier, il avait déjà déclaré dans une interview que s’il était exact de parler de grand succès sur le Hamas dans le nord de Gaza, « parler de la défaite absolue du Hamas à Gaza ou du fait qu’il ne voulait ou pouvait plus nuire à Israël, était faux. Il ne faut raconter d’histoires. »
Ce à quoi il avait ajouté : « Dans la bande de Gaza, nos objectifs n’ont pas été atteints, mais ce n’est déjà plus vraiment une guerre. On ne déploie que peu de troupes, c’est un autre mode opératoire. »
Selon Kan, le parti Kakhol lavan est très mécontent de la manière dont Israël a réagi à la dernière offre du Hamas. Le parti était jusqu’à présent plutôt en phase avec les déclarations de Netanyahu et de son ministre de la Défense Yoav Gallant pour rejeter les précédentes proposition, mais il s’est cette fois ému que la réponse ait été faite sans consultations ni débats au sein du cabinet de guerre.

Les critiques d’Eisenkot viennent s’ajouter aux tensions toujours plus palpables entre le parti Kakhol lavan et la coalition de droite que le parti a rejointe au début de cette guerre, qui a éclaté le 7 octobre après l’attaque du Hamas contre le sud d’Israël qui a coûté la vie à près de 1 200 personnes et fait 253 otages.
Le chef du parti, Benny Gantz, a semblé s’en prendre à Netanyahu lors d’une conférence de presse, mardi soir, en accusant les députés de la coalition de diviser la population avec des déclarations provocantes et des attaques contre l’armée israélienne.
Gantz, qui a fait entrer son parti Kakhol lavan dans le gouvernement de Netanyahu quelques jours après l’attaque terroriste du 7 octobre, s’en est pris à ceux qui, au sein du gouvernement, « tiennent un discours de division à la Knesset, transforment les réunions du cabinet en attaques contre l’armée, assimilent les chaines de télévision à nos ennemis, à ceux qui ont assassiné nos fils et nos filles ».
Même s’il n’a pas donné de nom, Gantz semblait viser Netanyahu, qui s’est plaint d’être harcelé par la presse.
Après avoir rappelé, mardi, à ses collègues députés qu’être « chef en temps de crise implique de grandes responsabilités », Gantz a invité « l’ensemble de la classe politique, avant de prendre la parole, à penser aux soldats et aux otages, à ce qui s’est passé et pourquoi ».
« Les citoyens d’Israël méritent bien mieux de notre part », a-t-il ajouté.

Dans les premières semaines qui ont suivi l’arrivée du parti Kakhol lavan au gouvernement, Gantz et Netanyahu ont affiché un front uni, apparaissant ensemble lors de conférences de presse aux côtés de Gallant. Ils semblaient d’accord sur les principales questions concernant la guerre.
Lorsque les désaccords politiques ont resurgi à la Knesset, les tensions entre Gantz et Netanyahu sont apparues au grand jour, à mesure que le premier gagnait des points dans les sondages d’opinion et que le Likud et son chef enregistraient eux une chute.
Les tensions entre Gantz et Netanyahu sont aujourd’hui bien visibles : les deux hommes se critiquent l’un l’autre dans des déclarations aux mots soigneusement choisis sur tous les sujets qui divisent l’opinion publique, à tel point que la pérennité de leur partenariat semble menacée.