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Au Yémen en guerre, la famine frappe et tue des enfants

L'ONU a réclamé "un cessez-le-feu humanitaire" autour des installations participant à la distribution d'aide alimentaire, mais ni les rebelles ni Ryad n'ont répondu à l'appel

Un enfant yéménite souffrant de malnutrition à l'hôpital de Sanaa, le 6 octobre  2018. (Crédit ! MOHAMMED HUWAIS / AFP)
Un enfant yéménite souffrant de malnutrition à l'hôpital de Sanaa, le 6 octobre 2018. (Crédit ! MOHAMMED HUWAIS / AFP)

Ahmed Hassan hurle de douleur au moment où le médecin le pose délicatement sur une balance pour le peser. Le visage et le corps décharnés, ce bébé yéménite de quelques mois est affamé.

A l’hôpital Sabaeen de Sanaa, les infirmières préparent du lait en poudre et remplissent des seringues, rationnant ainsi les portions données aux enfants malnutris qui arrivent pour des traitements d’urgence.

Parfois même incapables d’avaler tellement leur corps est affaibli, les enfants sont nourris à l’aide de sondes.

« La vie est devenue très difficile (…) mais nous faisons de notre mieux, compte tenu des circonstances », confie Oum Tarek, dont le bébé de neuf mois est pris en charge pour malnutrition.

« Nous ne sommes pas d’ici, nous louons une très vieille maison pour 10 000 riyals (environ 35 euros) à Hiziaz », au sud de Sanaa, dit-elle à l’AFP.

Son bébé, raconte-t-elle, est tombé malade car elle n’avait plus les moyens de lui acheter du lait en poudre, compte tenu de l’importante somme que représente la location de la maison.

Un enfant yéménite souffrant de malnutrition dans un hôpital de Hajjah, le 25 octobre 2018. (Crédit : ESSA AHMED / AFP)

Les quatre années de guerre entre le gouvernement yéménite et les rebelles Houthis ont plongé le pays au bord d’une « famine géante et imminente », selon l’ONU qui estime que 14 millions de personnes, soit la moitié de la population, pourraient en être victimes.

Le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Affaires humanitaires, Mark Lowcock, a affirmé lundi que le risque de famine au Yémen est « plus important que tout ce qu’un professionnel du secteur a pu voir au cours de sa carrière professionnelle ».

« Porte de la mort »

A l’hôpital de Sabaeen, le pédiatre Charaf Nachwan affirme que certaines familles n’ont même pas les moyens de payer le transport pour arriver à la clinique.

« Leurs enfants sont donc laissés des jours, des semaines, souffrant de malnutrition, jusqu’à ce que quelqu’un les aide avec un peu d’argent. A ce stade, nous faisons face à des cas très graves », se désole-t-il.

Depuis l’intervention en mars 2015 d’une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite en soutien au gouvernement yéménite, le conflit a fait selon l’ONU près de 10 000 morts, des ONG de défense des droits humains estimant que le bilan serait cinq fois plus important, en majorité des civils, et provoqué la pire crise humanitaire au monde.

L’ONU a réclamé cette semaine « un cessez-le-feu humanitaire » autour des installations participant à la distribution d’aide alimentaire, mais ni les rebelles soutenus par l’Iran, ni Ryad et ses alliés ne semblent avoir répondu à l’appel.

Les deux parties se disputent le contrôle du pays qui partage une frontière avec l’Arabie saoudite et possède plusieurs ports stratégiques.

Les rebelles contrôlent la capitale Sanaa et d’importantes régions dans le nord et l’ouest du pays, où se trouve notamment la ville de Hodeida. Près des trois quarts de l’aide humanitaire entrant au Yémen transite par son port.

Le port de la ville de Hodeida, au Yemen, le 24 juin 2018. (Crédit : AFP PHOTO / ABDO HYDER)

La coalition sous commandement saoudien, qui contrôle l’espace aérien au Yémen, impose un blocus quasi-total à ce port, ainsi qu’à l’aéroport de la capitale.

Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une baisse de 2,6 % de la croissance du Yémen en 2018, tandis que l’inflation devrait atteindre 42 %.

Face à cette situation, le docteur Nachwan assure que le personnel médical fait son maximum pour sauver les enfants.

« Les cas que nous traitons ici à l’hôpital sont graves. A la porte de la mort parfois. Nous faisons notre travail, nous faisons tout ce que nous pouvons pour rendre (aux enfants) leur santé », dit-il.

« Certains s’en sortent. D’autres meurent ».

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