Avec l’envie de « danser », l’ex-otage Elma Avraham quitte l’hôpital après 5 mois
Revenue en Israël, en novembre, dans un état critique, l'octogénaire dit avoir été déplacée à plusieurs reprises dans Gaza avant d'aller dans les tunnels, où on l'a obligée à dire des versets du Coran
Elma Avraham, l’otage de 85 ans rentrée en Israël dans un état critique à sa libération, en novembre dernier, après 51 jours de captivité aux mains du Hamas, a quitté l’hôpital mercredi, où elle s’est remise de son épreuve, ces cinq derniers mois.
Jeudi, elle a donné sa toute première interview sur sa captivité. Avraham a déclaré à la radio militaire que, pendant sa captivité, elle avait été séquestrée dans quatre à cinq appartements de la bande de Gaza avant d’être détenue dans des tunnels, où elle n’a vu aucun autre otage.
« Dans l’une des maisons, [les ravisseurs] me lisaient le Coran et voulaient que je répète ce qu’ils disaient. Avec mes mots à moi, j’ai répété le Coran, après quoi ils m’ont dit : « Super, vous êtes maintenant des nôtres » », a-t-elle déclaré, laissant entendre qu’on lui avait fait lire les versets de conversion à l’islam.
Avraham a été enlevée à son domicile du kibboutz Nahal Oz le 7 octobre dernier, le jour où 3 000 terroristes du Hamas venus de Gaza ont fait irruption en Israël, semant la mort dans une vingtaine de communautés du sud du pays, tuant 1 200 personnes et faisant 252 otages.
Avraham est arrivée au centre hospitalier Soroka de Beer Sheva le 26 novembre après avoir été libérée dans le cadre d’un cessez-le-feu d’une semaine. Ses constantes étaient alors « extrêmement basses », a déclaré l’hôpital. Avraham a plusieurs traitements vitaux pour des maladies chroniques, auxquels elle n’a pas eu accès tout le temps de sa captivité à Gaza.
Lors de l’interview, elle est revenue sur les circonstances de son enlèvement, lorsque les terroristes ont fait irruption chez elle et alors qu’elle n’avait pas pu fermer la porte de son abri.
החטופה המשוחררת אלמה אברהם משחזרת בריאיון ראשון לגלי צה"ל: "לא היה לי יום ולא היה לי לילה, ניסיתי לעשות התעמלות ולא הצלחתי. אז ישבתי ושיחקתי 'שבע בום' עם עצמי – וככה העברתי את הזמן"@amirbarshalom @ranyavnai pic.twitter.com/tjXWQoCDsb
— גלצ (@GLZRadio) May 9, 2024
Elle a bien tenté de maintenir la porte fermée, mais, comme elle le raconte elle-même, les terroristes l’ont poussée. Sous le choc, des veines de sa main ont éclaté et l’un des terroristes lui a fait un bandage avant de l’enlever et de la conduire à Gaza.
« Arrivés à Gaza, il y avait beaucoup de monde, des gens qui applaudissaient ceux qui m’avaient emmenée », a-t-elle expliqué, ajoutant qu’on l’avait conduite dans une mosquée, et plus tard dans une maison.
Elle a raconté qu’on lui faisait porter un hijab lors des transferts d’une cache à une autre et qu’une fois, l’un de ses ravisseurs l’avait portée sur son dos, parce qu’elle avait du mal à respirer en traversant une zone particulièrement boueuse dans la rue.
Dans la troisième cache, elle explique avoir dormi à côté des mitrailleuses que ses ravisseurs utilisaient pour tirer par la fenêtre « sur ceux qui s’approchaient ».
« J’avais l’impression qu’ils me protégeaient dans l’espoir de m’échanger contre d’autres prisonniers », a-t-elle suggéré.
A Gaza, Avraham dit ne pas avoir eu la notion du le temps. « J’avais l’impression qu’une semaine s’était écoulée. Je ne savais jamais si c’était le jour ou la nuit », a-t-elle expliqué, ajoutant qu’elle passait son temps à jouer au jeu pour enfants « Sheva Boom », semblable au jeu à Fizz Buzz.
Elle a dit ne pas se souvenir que son état de santé s’était détérioré en captivité, pas davantage que du jour de sa libération. « Je ne me souviens de rien. Je me rappelle seulement m’être réveillée à l’hôpital [en Israël] », a-t-elle confié.
Avraham a fini par quitter l’hôpital Soroka ce mercredi : elle va maintenant faire de la rééducation aux Mediterranean Towers de Bat Yam.
À sa sortie, Avraham a déclaré aux journalistes « se sentir bien » et devoir son rétablissement au personnel de l’hôpital. Interrogée par un journaliste de l’émission publique Kan sur ce qu’elle avait envie de faire, elle a répondu : « Danser. »
« J’ai eu la force de revenir vers vous, de vous revoir tous, surtout mes enfants et ma famille », a-t-elle déclaré, ajoutant que les otages encore à Gaza « devaient être libérés au plus vite ».
« Yom HaAtsmaout est très compliqué pour moi », a-t-elle déclaré, en parlant du prochain jour férié, qui commence lundi soir, « parce que ce n’est pas vraiment le jour de l’indépendance pour tous. Il reste des otages, aussi il me sera difficile de me réjouir en ce Yom HaAtsmaout. »
Moti Klein, chef de l’unité de traumatologie de Soroka, s’est réjoui du rétablissement d’Avraham, selon lui une véritable première compte tenu de ce qu’elle a enduré.
« Nous n’avons pas de précédents semblables. Personne n’a survécu à une chose pareille – la faim et les mauvais traitements », a-t-il déclaré par voie de communiqué. Il dit à Avraham que son service avait beaucoup appris grâce à elle.
Le fils d’Avraham, Ori, a dit de sa mère qu’elle était un « phénix, ressuscité d’entre les morts » et félicité les médecins pour leur travail, qui l’a grandement aidée à se rétablir.
« Nous n’oublierons jamais les images de sa libération, la manière dont elle a survécu dans des conditions inimaginables, sa grande force physique et mentale qui lui a permis de faire face à cette effroyable captivité aux mains des monstres du Hamas », a-t-il déclaré.
Il a également demandé à ce que l’on n’oublie pas les otages encore séquestrés à Gaza : « Il faut qu’ils reviennent parmi nous, maintenant. »
On estime à 128 le nombre des otages enlevés par le Hamas le 7 octobre encore à Gaza – pas tous vivants – depuis la libération de 105 civils à la faveur d’un cessez-le-feu d’une semaine, fin novembre, et de quatre autres otages un peu avant. Le bilan fait par ailleurs état de trois otages secourus par des soldats et de la dépouille de 12 otages, trois d’entre eu tués par erreur par l’armée.
Tsahal a confirmé la mort de 36 otages du Hamas, grâce à des renseignements obtenus par les militaires déployés à Gaza. Une personne est portée disparue depuis le 7 octobre, sans aucune information.
Le Hamas détient également le corps des soldats israéliens Oron Shaul et Hadar Goldin, morts au combat en 2014, ainsi que deux civils israéliens – a priori vivants -, Avera Mengistu et Hisham al-Sayed, entrés de leur plein gré dans la bande de Gaza, respectivement en 2014 et 2015.