Baharav-Miara critique le plan de Levin et Saar, qui politise le processus de sélection des juges
L'ex-ministre de la Justice accuse la procureure générale de "commettre des erreurs fondamentales" en tentant de torpiller son projet de loi

La procureure générale Gali Baharav-Miara a averti dimanche que les projets du gouvernement visant à modifier la manière dont les juges sont nommés porteraient atteinte à l’indépendance de la justice et à la séparation des pouvoirs, ce qui, in fine, nuirait à la démocratie.
Le ministre des Affaires étrangères Gideon Saar – l’un des auteurs du plan – a immédiatement accusé la principale avocate du gouvernement de chercher à s’arroger un pouvoir supérieur à celui de la Knesset et des tribunaux, – dernière salve d’une bataille acharnée entre le gouvernement et la procureure générale.
Dans une lettre adressée au ministre de la Justice Yariv Levin, qui a fait avancer le projet de loi, Baharav-Miara a déclaré que la législation augmente considérablement l’influence des politiciens sur le processus de nomination, diluant la voix des professionnels du droit au sein du comité de nomination.
La législation, proposée par Saar et Levin, supprimerait les deux représentants de l’Association du barreau d’Israël de la commission de sélection judiciaire composée de neuf membres, et les remplacerait par deux avocats choisis par la coalition et l’opposition. Elle empêcherait les trois juges de la Cour suprême de faire passer un candidat de leur choix sans le soutien d’au moins un politicien de chaque côté de l’allée, mais permettrait aux politiciens d’ajouter un juge à la plus haute cour du pays sans le soutien des juges de la formation.
La législation fait partie d’un compromis conclu entre Levin et Saar qui vise à modérer les changements de grande envergure apportés au système judiciaire et qui ont déclenché des protestations sans précédent lorsqu’ils ont été annoncés par le gouvernement en 2023.
Baharav-Miara a affirmé que les changements politiseront le processus de nomination et le transformeront en « une énième arène politique d’accords et de différends entre la coalition et l’opposition ».
« L’arrangement proposé jette une ombre politique sur le système judiciaire et nuit à son professionnalisme, à son indépendance et à sa capacité à critiquer le gouvernement », a-t-elle écrit.

La dilution de la représentation professionnelle au sein de la commission et de son pouvoir dans le processus de nomination, a poursuivi la procureure générale, relègue les juges au rang d’ « observateurs » et « affaiblit l’autorité judiciaire et contrevient au principe de séparation des pouvoirs ».
Cela entraverait le pouvoir du pouvoir judiciaire d’exercer ses fonctions fondamentales, notamment « le contrôle judiciaire indépendant des autorités gouvernementales en tant que frein à l’abus de pouvoir du gouvernement à l’encontre des particuliers ».
Elle a ajouté que cela changerait l’image du système juridique israélien, qui repose sur des nominations « qui mettent l’accent sur les qualifications professionnelles », pour un système dans lequel la nomination et la promotion « dépendent du capital sympathie dont jouit le candidat ou la personne qui cherche à évoluer au sein du système politique ».
La législation proposée par Levin nécessite donc des « changements substantiels » afin de la rendre conforme aux principes démocratiques, a-t-elle déclaré.
Saar a critiqué Baharav-Miara pour ses « erreurs fondamentales » dans sa position et l’a accusée d’être celle qui politisait le processus.
« Il s’agit d’un document politique, et non juridique », a-t-il déclaré sur la plateforme X, à propos des commentaires de la procureure générale. « Pour être honnête, il est difficile de trouver, dans l’histoire de l’État et de la Knesset, une proposition qui ait été formulée après un discours public et politique aussi long » que le sien.
Le ministre a accusé Baharav-Miara de « tenter de faire traîner en longueur » la législation et de saper la volonté politique des Israéliens, affirmant que sa proposition bénéficie d’une « large majorité à la Knesset ».

Saar, qui a recommandé Baharav-Miara pour le poste de ministre de la Justice dans le gouvernement Bennett-Lapid, a déclaré que la juriste avait tort de supposer que les juges sont tenus d’avoir leur mot à dire sur la sélection d’autres juges.
« La procureure générale écrit que la proposition porte atteinte aux principes démocratiques et les contredit », a-t-il rétorqué. « La vérité, c’est que c’est la procureure générale elle-même qui porte atteinte aux principes démocratiques, en essayant de remplacer à la fois le gouvernement et la Knesset. »
La modification proposée de la composition de la commission judiciaire s’inscrit dans le cadre d’un plan gouvernemental plus large visant à modifier en profondeur le système judiciaire. Les détracteurs affirment que ces changements éroderont dangereusement le caractère démocratique d’Israël, tandis que les partisans affirment que la réforme est nécessaire pour maîtriser un système judiciaire qui outrepasse ses fonctions.
Le plan a été suspendu à la suite du déclenchement de la guerre en octobre 2023, mais Levin, qui est la cheville ouvrière du processus, s’est récemment efforcé de relancer le projet, alors que les appels au sein du cabinet pour que Baharav-Miara soit licenciée se multiplient.
Saar a récemment déclaré qu’il pensait que la nouvelle législation pourrait être adoptée dans un délai d’un mois.
Le ministre des Communications, Shlomo Karhi, a déclaré la semaine dernière que le processus de destitution de Baharav-Miara était sur le point de commencer dans les semaines à venir.
Saar a déclaré qu’il préférerait scinder le poste de procureure générale en deux rôles, afin d’atténuer son pouvoir plutôt que de la licencier purement et simplement.