Biden : L’incident du convoi du WCK n’est pas un cas isolé
Le président américain a appelé le chef de WCK pour lui présenter ses condoléances ; le Royaume-Uni, l'Australie, la Pologne et le Canada exigent une enquête ; Gallant promet un examen minutieux
Les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne ont été les premiers à critiquer, mardi, la frappe israélienne non-intentionnelle dans la bande de Gaza, qui a tué sept travailleurs humanitaires alors qu’ils déchargeaient des vivres acheminés par voie maritime vers ce territoire en proie à la guerre.
Dans une déclaration publiée mardi soir, Biden s’est dit « indigné et déchiré » par l’assassinat de sept travailleurs humanitaires de l’organisation caritative américaine World Central Kitchen (WCK), dont l’un avait la double nationalité américaine.
Il a pris note de l’engagement d’Israël de mener une enquête approfondie et a averti qu’elle « doit être rapide, qu’elle doit amener à rendre des comptes et que ses conclusions doivent être rendues publiques ».
« Plus tragique encore, il ne s’agit pas d’un incident isolé », a-t-il déploré dans un communiqué. « Ce conflit a été l’un des pires dans l’histoire récente en termes de nombre de travailleurs humanitaires tués », a-t-il poursuivi, ajoutant que de telles morts ne devraient « tout simplement pas arriver ». Le porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison Blanche a déclaré plus tôt mardi que plus de 200 travailleurs humanitaires avaient été tués par Israël, s’appuyant apparemment sur des chiffres de l’ONU.
« C’est l’une des principales raisons pour lesquelles la distribution de l’aide humanitaire à Gaza a été si difficile – parce qu’Israël n’a pas fait assez pour protéger les travailleurs humanitaires qui tentent d’apporter aux civils une aide dont ils ont désespérément besoin », a déclaré Biden, en critiquant la façon dont Jérusalem a mené la guerre.
« Des incidents comme celui d’hier ne devraient tout simplement pas se produire. Israël n’a pas non plus fait assez pour protéger les civils. Les États-Unis ont à plusieurs reprises exhorté Israël à dissocier ses opérations militaires contre le Hamas avec les opérations humanitaires, afin d’éviter les pertes civiles », a déclaré le président.
Il a souligné que les États-Unis continueront « à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour apporter une aide humanitaire aux civils palestiniens à Gaza, par tous les moyens disponibles », tout en continuant à faire pression sur Israël pour qu’il facilite davantage l’acheminement de l’aide.
« Nous faisons pression pour obtenir un cessez-le-feu immédiat dans le cadre d’un accord sur les otages. J’ai une équipe au Caire qui y travaille en ce moment même », a déclaré Biden.
Plus tôt dans la journée, le président a téléphoné au chef José Andrés, fondateur de WCK, pour lui présenter ses condoléances et exprimer son soutien au travail de l’organisation humanitaire dans le monde entier, a indiqué Biden.
Lors d’un point de presse à la Maison Blanche, John Kirby a déclaré que cette attaque était « emblématique d’un problème plus vaste et qu’elle montrait pourquoi la distribution de l’aide à Gaza était si difficile ».
L’armée israélienne « doit faire beaucoup plus pour améliorer les processus de coordination », a-t-il ajouté, tout en précisant que la frappe de WCK ne semblait pas avoir été intentionnelle.
Israël a reconnu plus tôt avoir effectué par erreur la frappe qui, selon le WCK, a tué trois Britanniques et quatre autres employés – un Australien, un Palestinien, un Polonais et un Américano-Canadien.
D’autres pays, dont l’Australie, le Canada et la Pologne, ont également condamné Israël pour cet incident survenu dans le cadre de sa guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas.
Lors d’une conférence de presse conjointe avec le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, à Paris, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré que les États-Unis avaient directement demandé à Israël d’ouvrir « une enquête rapide, approfondie et impartiale afin de comprendre exactement ce qui s’est passé ».
Blinken a déclaré qu’Israël devait faire davantage « pour protéger les vies civiles innocentes », qu’il s’agisse de Palestiniens ou de travailleurs humanitaires.
Séjourné a exprimé sa « ferme condamnation » de la frappe et a ajouté que « la protection des travailleurs humanitaires est un impératif moral et juridique auquel tout le monde doit adhérer. Rien ne justifie une telle tragédie ».
Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, qui critique de plus en plus la guerre menée par Israël à Gaza, a déclaré s’être entretenu avec son homologue israélien, Israel Katz, pour lui souligner que la mort de travailleurs humanitaires était « totalement inacceptable ».
Cameron a déclaré que le Royaume-Uni avait « demandé à Israël d’enquêter sans délai et de fournir une explication complète et transparente de ce qui s’est passé ». Le ministère des Affaires étrangères de Londres a déclaré qu’il avait convoqué l’ambassadrice d’Israël au sujet du tragique incident.
« J’ai fait part de la condamnation sans équivoque par le gouvernement de l’effroyable l’assassinat de sept travailleurs humanitaires du World Central Kitchen, dont trois ressortissants britanniques », a déclaré le ministre britannique du Développement et de l’Afrique, Andrew Mitchell.
« J’ai demandé une enquête rapide et transparente, partagée avec la communauté internationale, et que tous les responsables répondent de leurs actes. »
Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, s’est déclaré « choqué et attristé » après avoir appris qu’un Britannique figurait parmi les victimes.
« Nous demandons à Israël d’enquêter de toute urgence sur ce qui s’est passé, car il y a manifestement des questions auxquelles il faut répondre », a déclaré Sunak aux journalistes lors d’une visite dans le nord-est de l’Angleterre.
Il a déclaré que les travailleurs humanitaires accomplissent un « travail fantastique » pour soulager les souffrances à Gaza. « Ils doivent être autorisés à faire ce travail sans entrave. Et il incombe à Israël de veiller à ce qu’ils puissent le faire », a-t-il souligné.
Le Premier ministre australien, Anthony Albanese, a condamné cette attaque « totalement inacceptable » et l’a qualifiée de « tragédie qui n’aurait jamais dû se produire ».
Il a présenté ses « sincères condoléances » à la famille de la volontaire australienne Lalzawmi « Zomi » Frankcom, qui a été tuée lors de l’attaque.
« Elle voulait simplement apporter son aide par l’intermédiaire de cette organisation caritative. Cela en dit long sur le caractère de cette jeune femme », a ajouté Albanese.
La ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a déclaré qu’elle demandait une enquête approfondie.
« Le Canada s’attend à ce que tous les responsables de ces meurtres rendent des comptes et nous le ferons savoir directement au gouvernement israélien. Les attaques contre le personnel humanitaire sont absolument inacceptables », a écrit Joly dans un message publié sur le réseau social X.
Le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, a déclaré que son pays avait également ouvert sa propre enquête sur la mort de son ressortissant.
Varsovie a déclaré avoir demandé à l’ambassadeur d’Israël des « explications urgentes » sur l’incident, qui a coûté la vie à un citoyen polonais, et a présenté ses « condoléances à la famille de notre courageux volontaire ».
Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, qui visitait mardi un camp de réfugiés palestiniens en Jordanie, a déclaré : « J’attends et j’exige que le gouvernement israélien clarifie dès que possible les circonstances de cette attaque brutale qui a coûté la vie à sept travailleurs humanitaires qui ne faisaient rien d’autre que d’aider. »
La mort des travailleurs humanitaires est « le résultat inévitable de la manière dont cette guerre est actuellement menée », a déclaré le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric, qui a ajouté que l’ONU appelait une nouvelle fois à un cessez-le-feu humanitaire immédiat dans la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas.
Le responsable de la politique étrangère de l’Union européenne, Josep Borrell, qui est également espagnol, a déclaré que « malgré toutes les demandes de protection des civils et des travailleurs humanitaires, nous voyons de nouvelles victimes innocentes ». « Je condamne l’attaque et j’exige une enquête », a-t-il écrit sur X.
Des critiques ont également été émises par la Chine, qui s’est dit « choquée » par l’attaque.
Alors que la condamnation internationale s’amplifiait, le ministre de la Défense Yoav Gallant a donné pour instruction aux responsables israéliens « d’informer les organisations internationales et les partenaires » de la position d’Israël sur cette attaque « tragique ».
Cette instruction a été donnée après que Gallant a procédé à une évaluation de l’incident avec le chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzi Halevi, et d’autres hauts responsables militaires, a indiqué le bureau du ministre.
« M. Gallant a évoqué la nature tragique de l’incident et a souligné l’importance de mener une enquête approfondie et professionnelle, qui sera suivie par la mise en œuvre des leçons tirées de l’expérience », selon un communiqué du ministère de la Défense.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré que la frappe était « non-intentionnelle ». L’armée israélienne s’est engagée à mener une enquête et à « partager ses conclusions de manière transparente ».
Le fondateur et dirigeant de WCK, le célèbre chef cuisinier Jose Andres, né en Espagne et basé aux États-Unis, a déclaré qu’il avait « le cœur brisé et qu’il était en deuil pour leurs familles et leurs amis et pour toute notre famille WCK ».
« Le gouvernement israélien doit mettre fin à ce massacre aveugle », a-t-il écrit sur les réseaux sociaux. « Il doit cesser de restreindre l’aide humanitaire, de tuer des civils et des travailleurs humanitaires et d’utiliser la nourriture comme une arme. »
L’organisation caritative a déclaré qu’elle avait coordonné ses mouvements avec l’armée israélienne et qu’elle se déplaçait dans des véhicules portant son logo.
Elle a interrompu ses opérations à Gaza. Israël espère que WCK retournera dans la bande de Gaza pour poursuivre son travail humanitaire, a déclaré un fonctionnaire israélien au Times of Israel.
Aucun plan n’a été mis en place pour le cas où WCK ne reviendrait pas après la frappe meurtrière non-intentionnelle contre son convoi, a indiqué le fonctionnaire.
Les Émirats arabes unis suspendent également les efforts d’aide humanitaire dans le corridor maritime dans l’attente de nouvelles garanties de sécurité et d’une enquête approfondie, a déclaré un responsable des Émirats arabes unis à Reuters.
La guerre a éclaté le 7 octobre lorsque le groupe terroriste palestinien du Hamas a mené un assaut barbare contre Israël qui a tué près de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et pris 253 otages.
Israël a répondu par une incursion militaire visant à anéantir le Hamas, à renverser le régime de Gaza et à libérer les otages, dont 130 sont toujours en captivité, certains étant décédés.
Les négociations menées par des médiateurs internationaux – dont les États-Unis – en vue d’une trêve, même temporaire, n’ont pas abouti à un accord, bien que les pourparlers se poursuivent. Une semaine d’accalmie négociée fin novembre a permis la libération de 105 otages, pour la plupart des femmes et des enfants, en échange de la libération par Israël de 240 prisonniers palestiniens incarcérés pour atteinte à la sécurité en Israël
et de l’augmentation de l’aide humanitaire à Gaza.
Lors de la conférence de presse à Paris, Blinken a déclaré que les États-Unis et Israël « s’accordent sur la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu le plus rapide possible, afin de permettre la libération des otages et l’augmentation et le maintien de l’aide humanitaire ».
En réponse à une question sur la poursuite des livraisons d’armes américaines à Israël, Blinken a défendu cette politique en affirmant qu’elles servent à la défense, à la dissuasion et au réapprovisionnement contre des menaces autres que le Hamas, notamment le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah et son mécène, l’Iran.
Séjourné a également demandé que tous les otages soient libérés sans délai et sans conditions, que tous les civils soient protégés et qu’une aide humanitaire de grande ampleur soit acheminée.
Fondée à la suite du tremblement de terre de 2010 en Haïti, WCK est l’une des plus grandes organisations caritatives travaillant à Gaza. Groupe apolitique, il a gagné l’estime du gouvernement israélien pour son aide aux Israéliens déplacés après le 7 octobre. Elle a fait œuvre de pionnier dans le transfert de l’aide à Gaza, allant jusqu’à construire une jetée de fortune à partir de débris pour débarquer les fournitures destinées à l’enclave.
Israël fait face à une pression internationale intense pour garantir que davantage d’aide arrive dans la bande de Gaza, en particulier dans les zones difficiles d’accès du nord de la bande de Gaza, alors que des avertissements répétés indiquent que la population est confrontée à la disette et à la famine.
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