Dans la lutte contre le terrorisme, Netanyahu adopte une approche à court-terme
Puisque le Premier ministre voit le refus palestinien à reconnaître un Etat juif comme la cause profonde de la violence, son seul recours est la persévérance
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Le gouvernement et l’opposition sont unis pour appeler à des mesures concrètes pour enrayer immédiatement le terrorisme qui fait rage dans les rues d’Israël, mais sont profondément divisés sur la cause profode de la violence actuelle et sur les moyens pour y faire face à long terme.
Avec la chute des cotes de popularité, le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son cabinet se sont concentrés exclusivement sur des mesures tactiques – plus de forces de sécurité dans les rues et des peines plus sévères pour les terroristes – plutôt que de changer radicalement la façon dont ils abordent le problème palestinien.
Le cabinet de sécurité, au cours d’une longue séance nocturne a approuvé mardi plusieurs mesures opérationnelles: Il a ordonné à l’armée israélienne de renforcer la police, il a autorisé la police d’imposer des « fermetures » autour de certaines parties de Jérusalem-Est, et a demandé que le travail soit entrepris pour compléter la barrière de sécurité en Cisjordanie.
En outre, il a décidé de confisquer les biens des terroristes, de démolir leurs maisons, de révoquer leurs droits de résidence et de retenir les corps des terroristes tués lors de leurs attaques.
Bien qu’il y ait un débat sur la légalité de certaines de ces mesures, le leader de l’opposition, Isaac Herzog, a donné main libre à Netanyahu de faire ce qu’il juge nécessaire.
« Nous soutiendrons toutes les mesures de sécurité que vous initiez et conduisez, sans hésitation, afin de rétablir immédiatement la sécurité du pays et de ses citoyens », a dit Herzog à Netanyahu mardi à la Knesset. « Nous n’agirons jamais comme opposition à la nation d’Israël et à sa sécurité. »
Cependant, Herzog et Netanyahu – et, dans un sens plus large, le gouvernement et l’opposition – sont fondamentalement en désaccord sur l’origine de la crise actuelle et sur la façon dont le terrorisme peut être vaincu définitivement.
La seule façon d’avancer est de se séparer des Palestiniens pour de bon, a déclaré Herzog lundi lors de l’ouverture de la session d’hiver de la Knesset. La politique de Netanyahu de s’en tenir au statu quo conduira à un Etat binational, qui serait « l’enfer » pour sa minorité juive, a-t-il accusé.

« Vous croyez à la gestion du conflit. Et je crois en une action diplomatique active, importante et dramatique qui doit changer la réalité, » a déclaré le chef de l’opposition.
La terreur est le résultat de la frustration et du désespoir que les jeunes Palestiniens ressentent comme résultant de la politique de Netanyahu, a-t-il ajouté. Donnez aux Palestiniens la perspective de l’indépendance et de la souveraineté et ils ne ressentiront plus la nécessité d’attaquer les Israéliens, a-t-il soutenu.
Netanyahu, en revanche, ne considère pas que la terreur soit une réaction directe à la politique israélienne.
Au contraire, il croit qu’elle provient du refus palestinien du droit à la souveraineté du peuple juif en Terre Sainte, et que par conséquent le seul remède contre le terrorisme est la persévérance. Le refus des Palestiniens de reconnaître Israël comme la patrie du peuple juif « était et reste la racine du conflit, » a-t-il dit lundi.
Alors que l’opposition affirme que seule la reprise – et éventuellement une conclusion réussie – des pourparlers de paix avec les Palestiniens amènera un calme durable à Israël, le gouvernement estime que s’il combat assez efficacement les terroristes, le statu quo peut continuer indéfiniment.
Israël « réglera ses comptes » avec les terroristes et leurs auxiliaires, a dit Netanyahu mardi à la Knesset entre deux réunions du Cabinet. « Nous n’allons pas seulement annuler leurs droits ; nous allons exiger le prix fort », a-t-il promis. « Je suis convaincu que les mesures que nous allons prendre conduiront l’autre côté à réaliser que la terreur ne paie pas. Israël est fort et restera ici pour toujours. »
L’administration américaine se tient clairement aux côtés de l’opposition dans ce débat idéologique.
Tout en condamnant les attentats, le secrétaire d’État John Kerry semblait blâmer mardi les actions du gouvernement israélien en Cisjordanie pour la violence actuelle.
« Il y a eu une forte augmentation des implantations au cours des dernières années », a déclaré Kerry lors d’un événement à l’Université de Harvard, et « il y a une augmentation de la violence parce qu’il y a cette frustration qui grandit. »
Kerry a promis que l’administration « restera engagée » dans le conflit israélo-palestinien, faisant écho à une grande partie de la mantra de la communauté internationale que seuls des pourparlers de paix et un accord de statut final peuvent mettre fin à la violence renouvelée.
Netanyahu ne considère absolument pas l’échec de la reprise des négociations comme la cause de la violence actuelle. En effet, beaucoup de membres de son gouvernement estiment que les concessions territoriales antérieures ont en fait conduit à la situation actuelle, et que si Israël devait évacuer plus de territoires pour faire place à un Etat palestinien, la situation s’empirerait.

« Ce terrorisme violent n’a pas commencé aujourd’hui. Il a accompagné le projet sioniste depuis ses débuts », a déclaré jeudi le Premier ministre lors d’une conférence de presse. « Nous avons toujours su vaincre les émeutiers et construire notre pays et cela sera aussi le cas aujourd’hui. Les terroristes et les extrémistes qui sont derrière eux n’arriveront à rien. Nous allons les refouler et nous allons les vaincre ».
Des cotes de popularité inquiétantes
Alors que de nombreux Israéliens approuvent généralement les vues de Netanyahu sur la question palestinienne, ils sont mécontents de la façon dont il a abordé la vague de terreur actuelle.
63 % des personnes ayant répondu à un sondage publié samedi étaient soit « insatisfaits » (35 %) soit « très insatisfaits » (38 %) avec la gestion de Netanyahu au cours de ces derniers jours de terreur. Seulement 15 % le voyaient comme l’homme politique israélien le plus apte à lutter contre les attaques, derrière ses rivaux de droite Avigdor Liberman (22 %) et Naftali Bennett (17 %).
Netanyahu serait bien avisé d’être inquiet.
Pendant le conflit de l’an dernier dans la bande de Gaza, sa cote de popularité s’est sérieusement détériorée au fur et à mesure que traînait le conflit de 50 jours, mais au cours de ses premiers stades, il jouissait d’un large soutien du public.
Le 23 juillet 2014, peu de temps après qu’Israël ait commencé à envoyer des troupes au sol dans la bande de Gaza, 82 % soutenaient du Premier ministre, selon un sondage de la Deuxième chaîne à l’époque. Plus d’un mois plus tard, peu avant la fin de la guerre, sa cote de popularité avait chuté à 38 %. « Le peuple éternel n’a pas peur d’un long chemin, » se plaisent à dire les politiciens israéliens. Mais l’opinion publique israélienne veut aussi que les guerres et les vagues de terreur prennent fin rapidement.

La piètre popularité de Netanyahu ne signifie pas que l’alternative offerte par Herzog et l’opposition soit populaire.
Dans le sondage de samedi, seules 5 % des personnes interrogées estimaient qu’Herzog soit le dirigeant israélien le plus apte à combattre la vague de terreur actuelle.
En appelant à des négociations et un accord de statut final, il se peut qu’il offre une stratégie à long terme pour faire face à la question palestinienne. Mais le public ne semble pas lui faire confiance pour mettre un terme à la terreur dans le court terme.