Décès de la Hongroise Eva Fahidi, rescapée des camps nazis
"J'ai découvert que la haine était un poids. Ce qui est passé est passé. Je suis vivante et j'aime la vie", confiait-elle en 2016
Elle témoignait inlassablement, dansant même sur scène au soir de sa vie. La Hongroise Eva Fahidi, rescapée des camps de concentration nazis d’Auschwitz et de Buchenwald, s’est éteinte lundi à l’âge de 97 ans.
« C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès ce matin à Budapest d’Eva Fahidi-Pusztai, combattante engagée pour la démocratie et les droits humains », a annoncé la Fondation des mémoriaux de Buchenwald et Mittelbau-Dora dans un communiqué.
« Sa voix empreinte de sagesse et de chaleur nous manquera profondément », a-t-elle écrit, regrettant aussi une grande perte « pour le travail de mémoire en Europe ».
Née le 22 octobre 1925 à Debrecen, dans l’est de la Hongrie, Eva Fahidi était une lycéenne de 18 ans quand elle a été déportée avec les 440 000 juifs du pays d’Europe centrale envoyés en quelques semaines dans les camps de la mort, de mai à juillet 1944.
Elle y a perdu 49 membres de sa famille, dont ses parents. Elle garde en mémoire la dernière vision de sa mère et de sa jeune sœur de 11 ans sur la rampe de triage de Birkenau.
Libérée en mars 1945 par les troupes américaines, elle rentre en Hongrie où elle renonce à son rêve de devenir pianiste en raison des séquelles des dures conditions de travail endurées.
Pendant des décennies, Eva Fahidi a été réticente à évoquer son expérience des camps. Mais une visite à Auschwitz en 2003, 59 ans après sa déportation, lui fait ressentir le besoin d’écrire ses mémoires.
Son ouvrage L’âme des choses est d’abord paru en allemand en 2004, puis elle l’a traduit en hongrois.
Elle a participé aux côtés de l’ex-chancelière allemande Angela Merkel à une cérémonie à Berlin commémorant les 70 ans de la libération d’Auschwitz, en janvier 2015, puis témoigné quelques mois plus tard lors du procès en Allemagne de l’ancien comptable du camp d’extermination, Oskar Gröning.
« J’ai réalisé que ma vocation était de parler d’Auschwitz à autant de gens que possible, c’est le minimum que je puisse faire », avait-elle expliqué dans un entretien à l’AFP en 2016.
La vieille dame se produisait alors à Budapest dans un duo de danse, à guichets fermés, avec l’idée de faire dialoguer les générations autour de la mémoire et du traumatisme.
« J’ai découvert que la haine était un poids. Ce qui est passé est passé. Je suis vivante et j’aime la vie », confiait-elle alors.