Découvrez les 3 trublions de Donald Trump aux postes de sécurité nationale
Les nominations à la Maison Blanche et au Cabinet sont susceptibles de faire plus ressembler la nouvelle administration à Bannon qu’à Priebus
WASHINGTON (JTA) — Des passés controversés, des déclarations incendiaires et une loyauté sans faille au président élu.
A en juger par les annonces que Donald Trump devait faire vendredi, sa Maison Blanche et son cabinet ressembleront beaucoup plus à Stephen Bannon qu’à Reince Priebus.
Ils sont, respectivement, le stratège en chef de Trump et son futur chef de cabinet.
Les annonces prévues de Trump, Mike Pompeo à la CIA, Jeff Sessions au poste de procureur général, et Mike Flynn conseiller à la sécurité nationale, sont plus étroitement identifiées au radicalisme de Bannon qu’à la réputation de Priebus.
Bannon était le directeur exécutif de Breitbart News, un site internet ultra-conservateur qui voit d’un très mauvais œil l’immigration, le gouvernement fédéral, le consensus sur le changement climatique et les médias « libéraux ». Bannon l’a qualifié de « plate-forme » pour les positions de la droite alternative (alt-right), qui comprend parmi ses sympathisants des antisémites, des nationalistes blancs, des misogynes et des homophobes, ainsi que d’autres radicaux.
Sa nomination a entraîné une vague de consternation dans certains quartiers juifs.
Priebus, homme tranquille du Midwest qui préside le Comité national républicain, est un produit de l’establishment et s’entend bien avec tous les courants républicains. Il a même été connu pour son rôle d’apaisement des tensions avec ses homologues du Comité national démocrate.
Les annonces de vendredi constituent peut-être un premier signe d’une Bannonisation de la présidence Trump.
A nouveau, cela pourrait correspondre à des signes que la démarche personnelle et agressive de Trump pendant la campagne va se prolonger pendant sa présidence : Sessions était parmi les favoris jusqu’à ce que le New York Times publie jeudi un article plongeant dans les commentaires racistes qu’il aurait fait dans le passé.
La réaction de Trump ? En l’espace d’une heure environ, un rare communiqué de son équipe de transition a déclaré que Trump était « incroyablement impressionné » par Sessions, puis, vendredi, la nouvelle est tombée : Sessions avait obtenu le poste de plus haut magistrat des Etats-Unis.
La nomination pourrait aussi être un signe de la volonté de Trump de poursuivre ses critiques, tout particulièrement dans les médias, ou de récompenser la loyauté de ses premiers partisans.
Voici des éléments sur les carrières des nommés, avec quelques accents juifs.
Mike Pompeo, directeur de la CIA
Pompeo a exprimé des opinions très dures sur la manière de traiter l’Iran, mais il représente aussi le seul choix que Trump ait fait vendredi qui a suscité des réactions positives de la part de l’establishment, même du côté démocrate.
« Même si nous avons de très fortes différences, je sais que c’est un homme qui est prêt à écouter et coopérer, deux qualités essentielles pour un directeur de la CIA », a déclaré sur Twitter Adam Schiff, représentant démocrate de la Californie.
L’élu juif est le membre le plus ancien de son parti à la commission des représentants du renseignement à la Chambre des représentants américaine, où Pompeo siège aussi.
CNN a pour sa part cité l’ancien directeur de la CIA, Mike Hayden, une voix très critique de Trump pendant la campagne, déclarant qu’il était « encouragé » par le choix de Pompeo.
En outre, Pompeo a été l’un des critiques majeurs de l’accord signé l’année dernière avec l’Iran, qui, contre un adoucissement des sanctions, ralentissait son programme nucléaire, ce qui l’aligne sur la position de la plupart des communautés pro-Israël centristes et de droite. Il est un soutien fiable d’Israël et, en novembre dernier, a été salué par le Premier ministre Benjamin Netanyahu après leur rencontre en Israël.
Le républicain du Kansas a soutenu le vote cette semaine à la Chambre pour une prolongation de 10 ans des sanctions contre l’Iran, dont beaucoup sont suspendues par une exemption présidentielle dans le cadre de l’accord nucléaire.
« Etendre les sanctions sur les programmes d’armement de l’Iran est une mission importante pour continuer à protéger les Américains, a déclaré Pompeo dans un communiqué. Remettre en vigueur les prohibitions existantes pour dix années supplémentaires donne au président élu Trump et au Congrès une base solide pour poursuivre des actions supplémentaires contre le République islamique d’Iran. »
L’Iran a cependant fait voir rouge à Pompeo. Le mot qui circule chez les opposants à l’accord iranien est que durcir est le moyen le plus probable de se diriger vers une guerre. En 2014, Pompeo avait déclaré à des journalistes que la guerre pourrait être la meilleure voie à emprunter.
« De manière non classifiée, il faut moins de 2 000 sorties pour détruire les capacités nucléaires iraniennes. Ce n’est pas une charge insurmontable pour les forces de la coalition », avait-il déclaré à l’époque, selon ABC Radio.
Pompeo, ancien officier militaire et républicain du Tea Party, avait exprimé sa dissidence par rapport aux républicains qui enquêtaient sur les attaques de 2012 contre le consulat américain à Bengazi, en Libye. L’enquête a finalement innocenté Hillary Clinton, qui était alors secrétaire d’Etat et était la candidate démocrate à l’élection présidentielle de novembre. Il s’est aussi opposé aux tentatives de traiter du changement climatique.
Jeff Sessions, procureur général
Avant d’être sénateur, Sessions était procureur des Etats-Unis dans l’Alabama, et espérait être juge fédéral. Le président Ronald Reagan l’avait nommé à la cour du district régional. Son processus de confirmation controversé avait fait les gros titres à l’époque, même si en quelques années il avait été masqué par des combats plus difficiles pour la nomination de juges à la Cour suprême.
Ce qui a nui à sa confirmation, ce sont les accusations selon lesquelles Sessions s’était allié avec des racistes et des suprématistes blancs quand il était procureur des Etats-Unis.
Le témoignage le plus dommageable, que Sessions n’a pas démenti, racontait la fois où, en 1981, l’un de ses collègues, Gerald Hebert, avait partagé avec lui, émerveillé, qu’un juge avait réprimandé un avocat blanc qui prenait des clients noirs, et avait déclaré qu’il était « une honte pour sa race ».
Sessions avait répondu, selon Hebert, dans des comptes-rendus publiés de multiples fois : « eh bien, c’est peut-être vrai. » Cela n’avait laissé que peu d’espoir d’obtenir le poste à Sessions.
Sessions a été le premier sénateur à soutenir Trump, et il a été l’un de ses plus proches conseillers. Le Southern Poverty Law Center, qui travaille étroitement avec des associations juives de lutte contre les préjugés, qualifie l’intimité de Sessions avec le président élu de « tragédie ».
Sessions s’est farouchement opposé à la loi sur les crimes racistes votée en 2009 (Hate Crimes Act), qui a étendu la juridiction fédérale pour poursuivre les crimes motivés par un préjugé, un projet de loi fortement soutenu par les associations juives centristes et libérales de défense des libertés civiques.
Mike Flynn, conseiller à la sécurité nationale
Flynn, chef de l’agence de renseignement militaire mis à la porte par le président Barack Obama à cause d’accusations de confusion de l’agence, a été l’un des représentants les plus incendiaires de Trump.
Pendant la convention républicaine, en juillet, quand Trump et certains de ses proches, comme le gouverneur du New Jersey Chris Christie et l’ancien maire de New York Rudolph Giuliani, ont tenté de faire taire le public qui demandait que Clinton soit emprisonnée, Flynn les encourageait.
Signe de l’influence de Flynn, Trump a changé d’avis en quelques semaines, promettant de mettre Clinton derrière les barreaux s’il était élu. (Après l’élection, Trump est revenu sur cette promesse.)
Flynn partage aussi le dédain de Trump pour la nuance dans la critique de l’activisme musulman. Contrairement à la plupart des républicains, qui isolent les « islamistes » ou les « djihadistes radicaux », ou une autre expression de ce genre, Flynn cible énergiquement la religion toute entière.
« La peur des musulmans est RATIONNELLE », a-t-il déclaré en février dans un tweet qui devient à présent viral.
Plus troublant pour les juifs, en juillet, Flynn avait retweeté un tweet attaché à un article de CNN, dans lequel la campagne Clinton accusait la Russie du piratage des e-mails du Comité national démocrate.
La remarque que Flynn avait ajouté était incendiaire, mais pas atypique : « La machine démocrate corrompue fera et dira n’importe quoi pour que #NeverHillary arrive au pouvoir. C’est un nouveau point bas. »
Ce qui était choquant, c’est que l’utilisateur de Twitter que Flynn retweetait avec approbation, « Saint Bibiana », dont le profil montre un soldat confédéré, n’accusait pas que les démocrates : « L’URSS est responsable ! Plus maintenant, juifs. Plus maintenant », avait écrit Saint Bibiana.
Flynn avait supprimé son tweet et s’était excusé.
Pendant des réunions de sécurité avec Trump, Flynn aurait alarmé les responsables du renseignement qui ont accusé la Russie de l’attaque informatique.
Flynn a été payé pour prononcer un discours à Moscou et a assisté à un dîner officiel avec le président russe Vladimir Poutine. La proximité d’un conseiller à la sécurité nationale avec un régime qui a rejoint l’Iran dans son alliance militaire imprécise avec le régime d’Assad en Syrie déstabilisera certainement une partie de l’establishment sécuritaire israélien.
« Le président élu serait mieux servi par quelqu’un ayant un scepticisme sain sur les intentions russes », a déclaré dans un communiqué Schiff, le représentant démocrate de la Californie.
Le cabinet de conseil de Flynn a également travaillé pour des clients turcs. Flynn a annoncé qu’il pourrait se désinvestir de l’entreprise s’il occupait un poste gouvernemental.
Les secrétaires d’Etat
Une série de noms a surgi pour prendre un poste au sein de l’administration Trump. Tous les potentiels secrétaires d’Etat sont fermement pro-Israël, n’ont pas pas de flirts russes en réserve, et tous ont une expérience gouvernementale et ont prôné une posture américaine solide à l’étranger, une opinion semblable à celle de l’establishment républicain.
Les candidats potentiels sont Giuliani, Newt Gingrich, ancien président de la Chambre, John Bolton, ancien ambassadeur des Etats-Unis, Mitt Romney, candidat républicain en 2012, et Nikki Haley, gouverneure de Caroline du Sud.
Si un nom sort cependant du bon domaine, et rassemble de saines portions de dérision de l’establishment du parti et des experts, ne comptez pas sur Trump pour ne pas faire ce choix.
Simplement parce qu’il en est capable.