Le site Breitbart, indissociable de Trump, prépare son arrivée en France
L'élection de Donald Trump, avec son soutien actif et la nomination de son ancien patron à un poste de conseiller présidentiel, ont rendu la plate-forme d'extrême droite, incontournable
Décidé à surfer sur sa notoriété nouvelle, Breitbart prépare actuellement son arrivée en France et en Allemagne, après avoir avoir déjà ouvert une antenne à Londres en 2014.
« Tous les médias alternatifs sont d’une manière générale positifs », a commenté mardi la députée française Front national Marion Maréchal-Le Pen à l’AFP, « Donald Trump en a été la démonstration. »
Créé en 2007 par l’éditeur conservateur Andrew Breitbart, ce site n’était encore qu’une curiosité il y a quatre ans, au décès de son géniteur, avec un peu plus d’un million de visiteurs par mois.
Mais après quasiment un an et demi d’une campagne folle, Breitbart a enregistré en octobre 85 millions de visiteurs uniques, selon le site d’analyses de données SimilarWeb, soit quasiment autant que le Wall Street Journal.
Le soir de l’élection présidentielle américaine, Breitbart a suscité plus de réactions sur Facebook (« J’aime », commentaires ou partages) que les sites de CNN, du New York Times ou de Fox News.
Il s’agit d’un triomphe pour cette plate-forme qui fustige les grands médias comme la CNN, surnommée « Clinton News Network », et dont certains titres ne laissent aucun doute sur sa subjectivité assumée : « Accord avec l’Iran : ce qu’Obama a forgé, laissons Trump le mettre en pièces ».
Le site ouvre également ses colonnes à plusieurs éditorialistes tenant d’une droite décomplexée, en premier lieu le Britannique Milo Yiannopoulos, dont plusieurs billets ont fait débat avec des titres comme « Il n’y a pas de discrimination contre les femmes dans le (secteur) des nouvelles technologies, elles sont simplement mauvaises en entretien », « Les droits des homos nous ont rendu plus bêtes, il est temps de retourner au placard » ou encore « La contraception rend les femmes moches et folles ».
Le président de Breitbart, Stephen Bannon, a rejoint l’équipe de campagne de Donald Trump en août et vient d’être nommé « haut conseiller et chef de la stratégie » de la future administration du président élu.
Journalisme ou pas ?
Si Breitbart procède à des choix éditoriaux très controversés, le site ne publie pas de fausses informations.
Pour autant, des critiques estiment que le traitement de Breitbart ne peut pas être considéré comme du journalisme.
Pour Jeff Jarvis, professeur de journalisme à l’université de la ville de New York (CUNY), Breitbart est « un mouvement politique qui se fait passer pour un média », a-t-il écrit sur son blog.
« Ils n’ont aucun standard éditorial et pas de pratiques journalistiques. Ils fonctionnent comme un organe politique », renchérit Angelo Carusone, de l’observatoire des médias Media Matters for America, classé à gauche.
Plus grave, selon lui, Breitbart « joue sur les craintes raciales » pour « défier les instances de pouvoir ».
L’ancien porte-parole du site, Kurt Bardella, a quitté la société en mars après un désaccord avec la ligne choisie par Stephen Bannon, qui avait fait, selon lui, de Breitbart « la machine de propagande de Donald Trump », notamment en usant d’un « discours de haine ».
Dans un éditorial publié dans les colonnes du journal « The Hill », il a qualifié Stephen Bannon de « dictateur », qui « limitait la capacité d’expression de ses journalistes mais aussi orientait le traitement pour l’enrichir au vitriol, en jouant sur les peurs de ses lecteurs ».
Avec son style nerveux et parfois agressif, Breitbart réagit à la plupart des attaques dont il est l’objet dans les médias.
Il a ainsi annoncé mardi, à « The Hill », qu’il s’apprêtait à réclamer « plusieurs millions de dollars en justice à un grand groupe de médias pour avoir affirmé, sans preuve et de manière diffamatoire, que Breitbart News était un ‘site nationaliste blanc' ».
La plate-forme a aussi organisé la défense de son ancien patron, Stephen Bannon, taxé par beaucoup d’antisémitisme.
« Les losers de gauche sont tombés dans une telle hystérie après avoir perdu la Maison Blanche qu’ils ont perdu tout contact avec la réalité », a écrit l’éditorialiste David Horowitz dans une tribune publiée lundi et qui prend fait et cause pour Stephen Bannon.