Des élèves de Chicago consternés que le directeur ait ignoré un élève en costume nazi
Les élèves juifs du Jones College Prep réclament un enseignement approfondi sur la Shoah après la parade d’un élève en uniforme militaire allemand
JTA – Les élèves de l’un des lycées publics les plus prestigieux de Chicago réclament que l’enseignement de la Shoah soit approfondi après qu’un élève a défilé au pas de l’oie en uniforme militaire allemand lors d’un concours de déguisement pour Halloween.
Le directeur du Jones College Prep, qui accueille les élèves les plus doués de tout Chicago, a été suspendu pour avoir dans un premier temps minimisé l’incident. Le district scolaire de Chicago (CPS) a ouvert une enquête afin de déterminer si l’école a bien suivi les « protocoles de gestion de préjudices à caractère raciste ».
Les élèves affirment toutefois que l’incident ne se limite pas à un seul élève de Terminale dont la provocation a fait frémir leur école, ni même à la réponse du directeur. Lors d’un rassemblement auquel a participé la grande majorité des élèves lundi, les orateurs ont déclaré qu’ils voulaient que leur école se conforme au mandat éducatif pionnier de l’Illinois sur la Shoah.
« Pas tout le monde n’a la chance de bénéficier de cours consacrés à la Shoah pendant toute une année, comme j’ai eu la chance d’en avoir en quatrième année dans mon collège juif », a déclaré à la Jewish Telegraphic Agency Riley Ablin, co-présidente du groupe d’étudiants juifs de l’école, qui a pris la parole lors du rassemblement.
« Ils ont peut-être lu une page d’un manuel scolaire en première année, et peut-être même pas », a déclaré Ablin. « Je pense qu’un programme plus complet sur la Shoah apporterait aux gens le bagage et les connaissances nécessaires pour ne pas se déguiser en soldats nazis ou en d’autres costumes similaires à l’avenir. »
Cet incident est l’un des nombreux cas cette année où des costumes évocateurs des nazis ont perturbé les célébrations d’Halloween. À New York, un homme vêtu d’un uniforme nazi, avec une croix gammée sur le bras, a été expulsé d’un café bien connu, tandis que dans le Wisconsin, un homme déguisé en Adolf Hitler a été renvoyé de son poste dans un musée pour enfants.
Au Jones College Prep, un élève de Terminale qui, selon les élèves, est connu pour ses déclarations offensantes, a enfilé un uniforme vert olive et a dit aux gens qu’il était habillé en « soldat allemand des années 1940 ». Le costume ne comportait aucun insigne nazi, mais lors d’un défilé costumé dans l’atrium de l’école, il a marché au pas de l’oie, comme le faisaient les nazis.
Beaucoup de ses camarades de classe l’ont hué, comme en témoigne la vidéo de l’événement qui a ensuite circulé sur les réseaux sociaux. Sur les images qui ont circulé, on voit également le directeur de l’école, Joseph Powers, mettre son bras autour des épaules de l’élève et lui parler en privé.
Les actions ultérieures du principal ont déclenché une véritable tempête. Il a informé par courriel les enseignants de l’école que, sur la base de son expérience personnelle, il avait identifié l’uniforme comme étant un uniforme est-allemand des années 1980 et qu’il avait essayé « d’expliquer le contexte et la période de l’uniforme aux élèves qui m’ont parlé » et à l’élève qui portait le costume.
Puis, dans un message informant les parents de l’incident, il a déclaré que le costume était « un uniforme militaire du surplus de l’armée » que les élèves et les membres du personnel avaient perçu comme « une expression d’antisémitisme » – mais qu’il n’était pas d’accord.
« Je regrette certainement la gêne et le préjudice ressentis par certains membres de notre communauté scolaire », a écrit Powers. « Soyez assurés que nous prenons le bien-être de tous les élèves au sérieux et que nous ne tolérons pas les expressions de haine, quelles qu’elles soient. Dans le cas présent, il semble que ce n’était pas le but recherché. »
L’explication est restée lettre morte. « Je ne suis même pas juif mais je sais que cette merde était foireuse », a déclaré un élève de Jones College Prep dans une vidéo TikTok qui a circulé après le défilé de costumes.
Ce n’est pas la première fois que Powers a fait l’objet de critiques pour ne pas avoir pris au sérieux les incidents à caractère discriminatoire survenus à l’école. L’année dernière, le conseil consultatif de l’école avait recommandé son renvoi en invoquant ce même motif mais le district scolaire avait rejeté cette recommandation. Ses détracteurs de longue date ont déclaré que le dernier incident était le reflet d’une tendance plus générale.
« Il devrait y avoir un guide de ce qu’il faut faire, et ce qu’il ne faut pas faire, au lieu d’essayer de prétendre que le but de cet enfant n’était pas d’apparaître comme un nazi », a déclaré la semaine dernière au Chicago Tribune Cassie Creswell, une mère et ancienne présidente du conseil. « C’était clairement son intention ».
Dans un courriel adressé aux élèves et aux parents, Powers a écrit que « nous sommes conscients de l’impact considérable que cet incident a eu sur notre communauté scolaire et nous reconnaissons que nous aurions dû le gérer avec plus de rigueur ». Il a souligné qu’il comprenait que l’incident avait été préjudiciable et que « l’intolérance, le sectarisme et les comportements fondés sur les préjugés n’ont pas leur place dans notre école », ajoutant que les responsables du district soutiendraient la réponse de l’école.
Peu après, alors que le syndicat des enseignants de la ville soutenait le projet de manifestation en masse des élèves, les autorités de Chicago sont allées plus loin. Ils ont démis Powers de ses fonctions le vendredi et ont déclaré qu’ils examineraient de près ce qui s’était passé à Jones College Prep.
« Cet incident a causé du tort à de nombreux élèves et au personnel, et il est complètement incompatible avec nos valeurs en tant que district scolaire », a déclaré Pedro Martinez, le directeur général du district scolaire Chicago Public Schools (CPS), dans un communiqué. « En réponse, le CPS a lancé une enquête complète sur l’incident, conformément aux protocoles de notre district pour le traitement des préjudices liés aux préjugés. »
Les étudiants juifs disent qu’ils veulent aller plus loin. Ils ont travaillé avec le groupe d’étudiants noirs de l’école pour planifier le rassemblement de lundi, qui devait initialement être un walk-out avant d’être transformé en sit-in pour des raisons de sécurité. Le syndicat des enseignants de la ville a soutenu la manifestation des étudiants.
« L’incident qui s’est produit récemment était vraiment dirigé contre les Juifs », a déclaré Ablin. « Mais quand on connaît bien notre histoire, on sait que Hitler n’aimait aucun de ceux qui ne faisaient pas partie de la race aryenne. Il était donc important de travailler avec d’autres groupes pour faire de cet événement une expérience vraiment puissante et significative pour tous les élèves. »
Selon Ablin, son groupe, le Jewish Student Connection, se concentre généralement sur le renforcement de la fierté chez les élèves juifs et sur la possibilité de partager des expériences juives avec des adolescents qui n’en ont peut-être pas l’occasion ailleurs. Pendant Souccot, par exemple, le club a organisé un événement durant lequel les élèves ont construit des souccot en bonbons.
« Nous voulions simplement que le club reste informatif, tout en permettant aux étudiants de s’exprimer et de passer un bon moment », a déclaré Ablin. « Mais malheureusement, vu les événements récents, les activités du club vont devoir changer un peu et devenir plus sérieuses. »
En haut de la liste, dit-elle, il y a la nécessité de faire pression pour que des changements soient apportés au programme d’études de l’école dès l’année prochaine afin d’inclure un enseignement plus approfondi sur la Shoah. Depuis 1990, l’Illinois exige une « unité d’enseignement » sur la Shoah dans les écoles primaires et secondaires, devenant ainsi le premier d’une vingtaine d’États à mandater l’enseignement de la Shoah.
Mais l’interprétation de ce qui constitue une unité d’enseignement est ouverte, et Ablin a déclaré qu’elle avait appris, en faisant des recherches sur le sujet pour un article l’année dernière, que dans son école, la Shoah fait officiellement partie du programme d’un seul cours d’histoire obligatoire.
« Lorsque j’ai discuté avec des professeurs d’histoire l’année dernière pour avoir des avis sur mon texte, ils ont tous dit qu’ils auraient aimé avoir plus de temps pour enseigner la Shoah », a-t-elle dit. « Ils avaient l’impression de manquer de temps durant l’année scolaire pour pouvoir le faire de manière significative. »