Des ministres écartés des cérémonies de Yom HaZikaron pour ne pas froisser les familles endeuillées
Ben Gvir n'a pas été inscrit sur la liste après deux ans de protestations, mais son porte-parole affirme qu'il sera présent à la cérémonie organisée par la police ; l'architecte de la réforme judicaire Levin ne sera pas à Nahariya mais dans le Gush Etzion

Plusieurs ministres du gouvernement, dont le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir et le ministre de la Justice Yariv Levin, ont été écartés des cérémonies du Jour du Souvenir qui se tiendront dans certaines communautés plus tard cette semaine, à la suite du tollé soulevé par les familles endeuillées, d’après une liste mise à jour des apparitions officielles prévues publiée dimanche par le ministère de la Défense.
Ben Gvir, un ministre d’extrême-droite dont l’apparition aux cérémonies de ces deux dernières années a provoqué des protestations, n’apparaît pas sur la liste publiée par le ministère de la Défense comme devant participer à une quelconque cérémonie.
Un porte-parole du ministre, qui se trouve actuellement aux États-Unis, a déclaré qu’il assisterait mercredi matin à la cérémonie centrale en l’honneur des policiers tombés au combat au cimetière militaire du mont Herzl, à Jérusalem.
Il n’a pas répondu aux questions concernant la raison pour laquelle Ben Gvir n’a pas été inclus dans la liste des apparitions des officiels du ministère de la Défense.
Le quotidien Haaretz a rapporté dimanche que Ben Gvir avait initialement prévu de passer le Jour du Souvenir aux États-Unis, mais qu’il avait décidé d’écourter son voyage à la suite de critiques. Le porte-parole n’a pas répondu aux questions concernant ce rapport.
De son côté, Levin, dont les projets de réforme du système judiciaire ont suscité des manifestations sans précédent en 2023, devait initialement assister à une cérémonie à Nahariya, mais il a été réaffecté au bloc d’implantations du Gush Etzion, au sud de Jérusalem, en Cisjordanie.
Selon les médias israéliens, des familles endeuillées de la ville septentrionale s’étaient opposées à la présence de Levin en tant que représentant du gouvernement.

Yitzhak Wasserlauf, ministre du Développement de la périphérie, du Néguev et de la Galilée, sera envoyé à sa place à Nahariya, selon la liste.
Selon un média haredi, le vice-ministre des Transports, Uri Maklev, a refusé d’assister à la cérémonie du Gush Etzion, affirmant que le bloc d’implantations à majorité sioniste religieuse est hostile aux ultra-orthodoxes, et a déclaré qu’il préférait « aller n’importe où ailleurs ». Son cabinet n’a pas démenti l’information.
Dans la ville druze d’Usfiya, le ministre de l’Éducation Yoav Kisch assistera à une cérémonie à la place d’Etty Atia, une députée du Likud qui dirige la commission des Travailleurs étrangers de la Knesset.
Ce changement est intervenu après que Rafik Halabi, maire de la ville druze voisine de Daliyat al-Karmel, a exprimé sur X son indignation quant au fait qu’aucun ministre du gouvernement n’assisterait à la cérémonie nationale en l’honneur des soldats druzes tombés au champ d’honneur.
« Il n’y a pas de ministre, pas d’émotion, pas de respect, pas de considération. J’en ai assez de ce dédain méprisant. Treize soldats druzes de Tsahal sont morts lors de l’opération ‘Épée de fer’. Des centaines d’autres dans les guerres d’Israël. Honte à vous !!! », a écrit Halabi.

Le ministre de la Défense, Israel Katz, n’assistera pas non plus à une cérémonie dans un cimetière cette année, en raison d’une coutume juive interdisant aux descendants des prêtres Kohanim de se trouver en présence des morts. Selon les médias israéliens, Katz prononcera à la place un discours dans la salle du souvenir, située sur une partie du mont Herzl.
Le Jour du Souvenir est considéré comme l’un des jours les plus solennels du calendrier national israélien, avec des cérémonies et événements honorant la mémoire des soldats, des forces de l’ordre et des victimes du terrorisme tués depuis 1860. La présence de représentants du gouvernement aux monuments commémoratifs et aux cimetières militaires est considérée comme de rigueur, ce qui provoque parfois des confrontations tendues entre les personnes en deuil et les élus.

En 2023, Ben Gvir a insisté pour prendre la parole lors d’une cérémonie à Beer Sheva, malgré l’opposition des familles endeuillées qui avaient demandé aux hommes politiques de ne pas y assister dans un contexte de tentative, par le gouvernement, de mettre en œuvre une réforme judiciaire controversée.
De violents affrontements avaient éclaté entre les partisans de Ben Gvir et les participants, perturbant la cérémonie et provoquant le départ de nombreuses familles.
L’année dernière, alors que le poids de l’attentat du 7 octobre pesait lourdement sur les commémorations de la journée, des scènes similaires s’étaient déroulées lorsque Ben Gvir a assisté à une cérémonie à Ashdod, les manifestants traitant de « criminel » et de « déserteur » l’homme politique d’extrême-droite qui n’a pas servi dans l’armée et qui s’est opposé à un accord de libération des otages.

Avant les cérémonies de cette année, Eli Ben-Shem, président de l’organisation Yad Labanim, qui représente les familles endeuillées, a envoyé une lettre au Premier ministre Benjamin Netanyahu et à Israel Katz, les exhortant à se coordonner avec les familles et à agir avec « discrétion et responsabilité » dans l’affectation des officiels aux cérémonies.
« Cette année, plus que jamais, les cérémonies sont très sensibles et tendues », a écrit Ben-Shem. « Malheureusement, ces dernières années, nous avons connu des perturbations qui ont porté atteinte à la dignité des personnes décédées et de leurs familles. »
Ben-Shem a demandé au gouvernement de n’affecter les ministres qu’à des lieux où leur présence ne susciterait pas de controverse, afin de préserver la « nature unificatrice et sacrée de la journée ».
L’année dernière, la décision du gouvernement d’affecter des ministres à diverses commémorations du Jour du Souvenir à travers le pays sans consulter les familles endeuillées avait suscité de vives réactions, les critiques accusant les décideurs politiques de faire preuve d’insensibilité alors que la nation pleurait collectivement ses morts pour la première fois depuis l’attaque du 7 octobre 2023, au cours de laquelle plus de 1 200 personnes ont été tuées et 251 enlevées vers Gaza, où beaucoup d’autres ont trouvé la mort.

Ben-Shem a fait remarquer que de nombreuses familles endeuillées souhaitent que seuls les hommes politiques qui ont servi dans l’armée ou qui ont accompli leur service national assistent aux cérémonies. Plusieurs ministres du gouvernement ne répondent pas à ce critère.
La demande des familles intervient alors que les tensions se sont accrues en raison des efforts déployés par le gouvernement pour faire avancer la législation visant à exempter du service militaire de larges pans de la communauté ultra-orthodoxe, alors même qu’Israël poursuit ses combats à Gaza et manque de recrues.