Élections : Bilan de l’opération de charme de Netanyahu auprès des Arabes
Si dans certaines villes, le vote pour le parti de droite a été multiplié par huit, le nombre de bulletins n'est pas allé au-delà de quelques centaines

Dans les mois qui ont précédé les élections du 23 mars, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a lancé une entreprise sans précédent de charme en direction des Arabes israéliens, cherchant à courtiser une communauté qu’il a par ailleurs largement ignorée dans le passé, si ce n’est diabolisée.
Il s’est rendu dans les villes arabes, vantant la campagne de vaccination contre le coronavirus mise en place par le gouvernement, présentant un plan visant à lutter contre le crime dans les villes et dans les villages arabes et soulignant ce qu’il a décrit comme une opportunité d’ouvrir une « nouvelle ère » pour les relations entre Juifs et Arabes dans le pays.
Un examen des résultats presque finaux montre que ces efforts ont porté quelques fruits, avec un soutien apporté au Likud de Netanyahu dans les communautés arabes et des votes parfois quatre, cinq voire huit fois plus élevés qu’au cours du scrutin du mois de mars 2020.
Mais les chiffres sont finalement aussi très modestes, – résultat d’une participation électorale peu élevée du public arabe et du fait que le soutien en faveur du Likud, même s’il s’est multiplié, reste en fin de compte minuscule au sein de ces communautés.
A Nazareth, par exemple, le soutien en faveur du Likud est passé de 1 % en 2020 à 4 % un an plus tard. Ce qui correspond, en chiffres, à 881 voix. A Shfaram, le Likud a grimpé de 1,1 % à 3.5 % (435 votes). A Taybeh, le parti de droite a récolté 0,77 % (94 votes) des bulletins contre 0,15 % l’année dernière tandis qu’à Qalansawe, il s’est adjugé 1,54 % des voix contre 0,2 % la dernière fois (74 voix dans les deux cas de figures). Dans le sud de l’État juif, à Rahat, une ville bédouine majeure, 6 % des électeurs se sont prononcés pour le Likud (un chiffre impressionnant) contre 0,6 % au mois de mars dernier. Bilan des votes ? 978 bulletins jetés dans l’urne.

Netanyahu avait affirmé, avant les élections, que les électeurs arabes pourraient lui apporter deux à trois sièges mais alors que la participation électorale de la communauté arabe israélienne, le jour du scrutin, serait approximativement de 44,2 %, il semble douteux que le vote de cette population en particulier ait réellement une signification pour le Premier ministre.
Ce dernier aurait eu un deuxième objectif dans sa campagne : semer la discorde entre les politiciens arabes et leur électorat en encourageant ainsi la dissolution de la Liste arabe unie, avec une formation Raam qui s’est présentée de manière indépendante avec pour programme la mise en place d’une coopération potentielle avec le Premier ministre – affaiblissant la participation électorale au sein de la communauté et renforçant son bloc de droite.
Cette stratégie semble avoir payé dans une certaine mesure, et les partis arabes, selon les projections, devraient passer de 15 à 11 sièges (c’était le cas mercredi après-midi, quand 88 % des voix avaient été décomptées). Et Raam qui, à l’heure de l’écriture de cet article, devrait gagner cinq sièges, pourrait encore pourtant soutenir un gouvernement de Netanyahu si ce dernier devait échouer à rassembler une majorité claire sans lui (même si ce scénario reste improbable en raison de l’opposition forte de la droite).
Dans l’histoire, la plus grande partie des Arabes israéliens se sont vigoureusement opposés à Netanyahu, dénonçant le Premier ministre pour ses incitations au racisme. Ils évoquent ainsi, entre autres, la loi sur l’État-nation, votée en 2018, qui a ancré Israël comme étant l’État-nation du peuple juif et qui a relégué le statut de la langue arabe au second plan, ainsi que la loi Kamenitz, en 2017, qui a pris volontairement pour cible les constructions arabes illégales.

Le parti du Likud de Netanyahu avait aussi, dans le passé, mis en garde contre ce qu’il avait dit être une « fraude » électorale endémique dans les villes arabes israéliennes, cherchant notamment à installer des caméras dans les bureaux de vote. Les Arabes israéliens avaient dénoncé ces propos, estimant qu’ils cherchaient à intimider les électeurs et à décourager la participation. Le Premier ministre avait également averti, le jour des élections de 2015, que les Arabes se rendaient dans les bureaux de votes « en masse », ce qui lui avait valu des accusations de racisme.
Les responsables arabes ont accusé sans relâche le gouvernement de Netanyahu de négliger les communautés arabes, spécialement en ce qui concerne les crimes violents et les infrastructures.
Au mois de janvier, dans le cadre de sa volte-face, Netanyahu avait dit que la communauté arabe avait un « potentiel énorme » en termes de vote.
« Depuis de nombreuses, très nombreuses années, le public arabe israélien est resté absent du pouvoir en général. Pourquoi ? », avait-il interrogé. « Il n’y a pas de raisons. Les gens apportent une contribution, ils travaillent. Allez-y ! Faites partie intégrante de la réussite d’Israël. C’est une telle démarche que je voudrais qu’incarne aujourd’hui ce scrutin. »