Israël en guerre - Jour 569

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Expulsé vers Gaza après dix ans en Israël, un père de famille arabe séparé des siens

Basel al-Quran, expulsé faute de permis renouvelé lorsqu'il était en prison, craint pour sa vie ; sa famille israélienne supplie Tsahal et la Croix-Rouge de le faire revenir

Basel al-Quran, un résident temporaire d'Israël qui a été expulsé vers Gaza après avoir purgé une peine de prison pour des infractions au code de la route, prend un selfie à Rafah le 5 mars 2025. (Crédit : Autorisation)
Basel al-Quran, un résident temporaire d'Israël qui a été expulsé vers Gaza après avoir purgé une peine de prison pour des infractions au code de la route, prend un selfie à Rafah le 5 mars 2025. (Crédit : Autorisation)

Un homme arabe, marié à une Israélienne et père de leurs trois jeunes enfants israéliens, a récemment été expulsé vers la bande de Gaza et les autorités israéliennes lui ont interdit de revenir vivre avec sa famille.

Basel al-Quran, 28 ans, vivait en Israël depuis plus de dix ans grâce à des permis temporaires renouvelables. Mais après avoir été condamné pour conduite sans permis, il n’a pas pu renouveler son visa durant sa détention, ce qui a conduit à son expulsion vers Gaza le mois dernier.

Al-Quran se trouve aujourd’hui dans la ville de Rafah, ravagée par la guerre, après avoir été transféré à Gaza en février à bord d’un camion d’aide humanitaire. Il ne peut plus regagner sa maison familiale de Kiryat Gat.

Issu de la communauté bédouine, al-Quran est né à Gaza d’une mère arabe israélienne et d’un père égyptien. Il a déménagé en Israël pendant son adolescence avec sa mère, obtenant un permis temporaire renouvelé deux fois par an.

Au cours de plusieurs entretiens téléphoniques avec The Times of Israel, al-Quran a affirmé qu’après sa libération de la prison de Shikma, le 1er février – jour même où 150 détenus de sécurité originaires de Gaza ont été relâchés dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu et de libération d’otages avec le Hamas – des agents du Shin Bet l’ont conduit au poste frontière de Kerem Shalom. Là, deux soldats de Tsahal l’ont fait monter dans un camion d’aide humanitaire en direction de Rafah.

Al-Quran précise avoir été transféré à Shikma, près de la ville côtière d’Ashkelon, quatre jours seulement avant son expulsion, après avoir passé vingt mois à la prison de Damon, à Haïfa. (Le délit de conduite sans permis est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à deux ans).

Le Shin Bet et Tsahal ont refusé de commenter les affirmations d’al-Quran. L’administration pénitentiaire israélienne a également décliné toute précision concernant son lieu de détention, affirmant qu’elle ne fournissait pas de détails sur les prisonniers.

L’avocat d’al-Quran, Me Uzi Avraham, a déposé un recours auprès du coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT), l’organisme du ministère de la Défense chargé de la coordination avec la Cisjordanie et Gaza, afin que son client soit autorisé à rentrer en Israël.

Selon Me Avraham, le COGAT a répondu qu’il examinait la situation et qu’une décision serait prise d’ici la fin mars.

En attendant, al-Quran tente désespérément de fuir l’enclave après plus d’un mois passé caché dans ce qu’il qualifie « d’endroit sûr », un logement de fortune à Rafah, occupé par un inconnu bédouin et ses sept enfants, qu’il a rencontré par hasard dès son premier jour sur place.

Lundi matin, al-Quran a déclaré que la famille qui l’hébergeait avait fui les lieux, alors que Tsahal a repris ses frappes aériennes dans le sud de la bande de Gaza, le laissant seul près de la frontière sud.

Des Palestiniens parmi les décombres de bâtiments sur une route près du passage de Kerem Shalom, à l’est de la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 2 mars 2025.. (Crédit : Abed Rahim Khatib/Flash90)

Al-Quran vit dans la peur d’être repéré et assassiné par le Hamas, en raison de la citoyenneté israélienne de sa mère.

« Chaque jour, ils tuent des gens, ils leur tirent dans les jambes, dans la tête. Je le vois tous les jours de loin et je l’entends aussi. C’est vraiment une question de vie ou de mort », a-t-il déclaré.

Il affirme ne sortir de l’abri temporaire où il se cache qu’en de rares occasions, lorsqu’il tente de s’approcher de la frontière sud avec l’Égypte, où sont postés des soldats de Tsahal, qu’il supplie de le ramener en Israël.

Marwa, la mère de Basel, a confié au Times of Israel qu’elle avait reçu des réponses négatives de la part de presque toutes les agences gouvernementales qu’elle avait contactées, y compris Tsahal, le Shin Bet et l’administration pénitentiaire israélienne (IPS).

Elle a également contacté la Croix-Rouge internationale dans l’espoir d’obtenir de l’aide. L’organisation a confirmé au Times of Israel qu’al-Quran se trouvait actuellement à Gaza.

« Qui est responsable de son retour à Gaza ? Si toutes les agences disent “nous ne sommes pas au courant”, alors qui l’est ? Où est l’obligation de rendre des comptes ? », a déploré Marwa.

Oded Feller, juriste à l’Association pour les droits civils en Israël (ACRI), a expliqué au Times of Israel que, bien que kafkaïenne, l’expulsion d’al-Quran était, en théorie, légale.

« Dès lors qu’une personne bénéficiant d’un statut temporaire est impliquée dans des infractions pénales, il est légal d’annuler son statut et de l’expulser », a-t-il indiqué. « Bien sûr, il faut tenir compte des conséquences pour elle, ses enfants, sa famille. Mais cela se produit. »

Un résident temporaire au sein d’une famille de citoyens israéliens

Bien que sa mère, sa femme et ses enfants soient des citoyens israéliens, al-Quran n’a jamais pu obtenir la résidence permanente – et encore moins la citoyenneté – en Israël, en raison d’une loi de 2003 excluant largement les Palestiniens mariés à des citoyens israéliens du processus de naturalisation. Al-Quran a émigré en Israël en 2013.

La loi sur la citoyenneté a été instaurée à titre provisoire au plus fort de la seconde Intifada, dans le but de prévenir les attentats terroristes.

Elle a été reconduite chaque année, à l’exception d’une brève interruption en 2021, lorsque l’opposition dirigée par Benjamin Netanyahu a voté contre son renouvellement dans l’intention de provoquer une crise au sein de la coalition gouvernementale. La loi a été rétablie en 2022.

Al-Quran fait partie des milliers de personnes qui vivent en Israël avec des permis de séjour précaires délivrés par le COGAT, à renouveler tous les six mois.

Selon l’organisation de défense des droits humains HaMoked, environ 9 700 personnes vivent actuellement en Israël sous ce régime, avec ces permis délivrés par l’armée.

Basel al-Quran, un résident temporaire d’Israël déporté dans la bande de Gaza, avec ses deux enfants aînés Adam et Marwa (Crédit : Autorisation)

Les titulaires de permis temporaires ne peuvent pas demander de permis de conduire israélien, et ne peuvent obtenir, dans de rares cas, que des « autorisations de conduite » valables un an. Celles-ci ne sont accordées par le COGAT que pour des motifs « humanitaires », par exemple lorsque le partenaire du résident est dans l’incapacité de conduire, précise Daniel Shenhar, directeur juridique de l’organisation HaMoked.

Malgré la précarité de son statut, al-Quran a poursuivi sa vie en Israël. Il travaillait dans une station de lavage automobile et a épousé Nawal, une Arabe israélienne originaire de Nazareth, avec qui il élève trois jeunes enfants, Adam, Marwa et Jana.

En juin 2023, al-Quran a été arrêté et condamné pour conduite sans permis – un document qu’il ne pouvait légalement obtenir en raison de son statut temporaire en Israël. Son permis de séjour a expiré pendant les 20 mois passés en détention, le laissant sans statut légal.

Avant son arrestation en 2023, al-Quran avait été emprisonné pendant un mois pour la même infraction – conduite sans permis.

Quelques mois après le début de sa peine, il a également été reconnu coupable d’avoir agressé physiquement sa femme lors d’une dispute survenue avant son arrestation. L’affaire a par la suite été résolue dans le cadre d’une médiation entre les deux conjoints.

Nawal, l’épouse d’al-Quran, a préféré ne pas commenter l’incident, mais a souligné combien il était difficile d’élever seule leurs trois enfants.
« Je n’arrive pas du tout à m’en sortir avec les enfants. C’est extrêmement difficile », a-t-elle confié au Times of Israel. Elle a ajouté que, depuis l’expulsion de son mari, elle disait aux enfants qu’il était simplement au travail et qu’il rentrerait dès qu’il en aurait fini.

Une expulsion surprise

Al-Quran affirme qu’on ne lui a jamais dit qu’il serait expulsé vers Gaza à sa sortie de prison.

Il raconte que, le 1er février, jour de sa libération, des agents du Shin Bet l’ont conduit au point de passage de Kerem Shalom, où il a été remis à deux soldats de Tsahal. Ces derniers l’ont ensuite fait monter dans un camion transportant de l’aide humanitaire. À sa descente, il s’est retrouvé dans les décombres de Rafah.

Ce même jour, Israël a libéré 150 détenus de sécurité gazaouis dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu et d’échange d’otages conclu avec le Hamas. Cependant, al-Quran, incarcéré pour une infraction pénale, et non pour des raisons sécuritaires, affirme qu’il a été transféré séparément. Son nom ne figurait pas sur la liste officielle des détenus libérés.

« J’étais en état de choc… Je n’avais aucune idée de l’endroit où je me trouvais, de ce qui se passait et de ce qui m’était arrivé exactement », se souvient-il. Plus d’un mois s’est écoulé depuis qu’il s’est retrouvé coincé dans la bande de Gaza.

Sa famille mène une bataille difficile pour tenter d’obtenir son retour. Malgré un réseau téléphonique très limité, al-Quran appelle régulièrement sa femme et ses enfants, profondément affectés par son absence prolongée.

« Mes enfants m’appellent tous les jours. À l’école, ils pleurent tous les jours, ils font des bêtises en classe, je leur manque », a-t-il déclaré. « Je m’occupais de tout [pour eux]. Toute ma vie est là-bas, vous comprenez ? »

Deux enfants de Basel al-Quran, un résident temporaire d’Israël qui a été expulsé à Gaza, déguisés pour Pourim. À gauche : al-Quran appelle son fils par vidéo avant qu’il n’aille à l’école. Les deux photos ont été prises le 12 mars 2025. (Crédit : Autorisation)

Un mercredi matin, il y a peu, al-Quran a appelé ses deux aînés avant leur départ pour l’école, à l’occasion des festivités de Pourim organisées en classe.

Adam, cinq ans, était déguisé en soldat de l’unité d’élite Sayeret Matkal. Il a salué son père à travers l’écran, en riant, avant de se rendre dans leur école à majorité juive. Sa sœur Marwa, quatre ans, était déguisée en princesse.

La mère d’al-Quran, aujourd’hui remariée et mère de quatre autres enfants, explique qu’elle a du mal à joindre les deux bouts, et n’a ni n’a ni les ressources ni la capacité d’aider sa belle-fille.

« Qui va élever ses enfants ? J’ai encore quatre enfants à la maison, je travaille, je m’en sors à peine. Comment pourrais-je en élever trois de plus ? », a-t-elle déclaré au Times of Israel.

« C’est mon fils. Et j’ai mal au cœur pour lui. »

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