La bataille sur les subventions des écoles haredi, prémices des conflits électoraux
Les menaces d’un important député ultra-orthodoxe aux maires pourrait se retourner contre lui, avec une mobilisation des factions face à cette menace au mode de vie laïque
Un groupe de 170 maires a adressé début janvier une lettre très ferme au Premier ministre Benjamin Netanyahu, au ministre de l’Éducation Yoav Kisch et au ministre des Finances Bezalel Smotrich, pour protester contre une clause inscrite dans les accords de coalition du nouveau gouvernement qui contraint les municipalités à donner des « centaines de millions de shekels » aux établissements scolaires haredi.
Ils ont appelé le gouvernement à respecter l’autorité des pouvoirs locaux en matière d’allocation budgétaire pour ces établissements, qui ne sont pas réglementés par le ministère de l`Éducation et n’enseignent pas la gamme complète des études laïques actuellement requises par l’État.
La lettre a été signée par des maires importants, y compris des maires de droite comme Haïm Bibas de Modiin, le président de la Fédération des autorités locales et un pilier du Likud.
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Le député Moshe Gafni (Yahadout HaTorah), président de la commission des Finances de la Knesset, avait alors exprimé sa colère face à cette lettre, avertissant qu’elle aurait des répercussions lors des prochaines élections municipales. « Lorsque vous nous donnez une gifle aussi retentissante, nous ne tendrons pas l’autre joue », a-t-il déclaré. « Nous prendrons des mesures contre quiconque restera signataire de ce document, qui est très grave à tous les égards possibles. »
La menace de Gafni n’aura probablement pas beaucoup d’impact. La politique locale diffère de la politique nationale. La communauté ultra-orthodoxe, qui représente un électorat important aux élections nationales, vit concentrée dans des villes comme Bnei Brak, Beitar Illit, Elad, Modiin Illit et Beit Shemesh. Dans de nombreuses grandes villes, les Haredim constituent donc une petite minorité et n’exercent généralement pas de pouvoir significatif.
En fait, la menace pourrait même se retourner contre eux et renforcer la position des laïcs dans le gouvernement local.
Le paysage politique local est de plus en plus tendu, notamment en ce qui concerne les droits des LGBTQ et la budgétisation de la communauté haredi. La mobilisation rapide de 170 maires en opposition à l’allocation budgétaire pour les écoles haredi non officielles – ainsi qu’une déclaration d’environ 80 maires en opposition à un projet de loi qui légaliserait effectivement la discrimination par les prestataires de services – indique un haut niveau d’engagement et de préoccupation parmi les dirigeants locaux.
L’opposition publique des maires, annonçant qu’ils refuseraient de délivrer des licences aux entreprises pratiquant la discrimination, indique que les dirigeants locaux craignent que cette loi – qui a été incluse dans l’accord de coalition malgré les démentis du Premier ministre Benjamin Netanyahu – ne leur coûte des voix aux prochaines élections prévues en octobre.
Les maires et les conseillers municipaux sont très proches de leurs électeurs, et le fossé entre eux et le nouveau gouvernement semble se creuser.
À l’approche de ce scrutin, une autre question qui se pose dans les localités laïques est l’expansion des garinim toraniim – de petites collectivités de familles sionistes religieuses qui s’installent dans diverses villes pour renforcer le degré de religiosité des résidents.
Le financement de ces groupes à travers Israël a été considérablement augmenté dans le budget national de 2022, avec une allocation de 50 millions de shekels. Le budget 2023 prévoit en outre une enveloppe de 600 millions de shekels pour la création d’un ministère des Missions nationales vaguement défini.
Ces dernières années, l’expansion des garinim toraniim dans certaines villes a été source de conflits, les habitants et les dirigeants locaux exprimant leurs inquiétudes concernant les risques de prosélytisme, la répression des résidents arabes et l’introduction de messages orthodoxes dans les écoles laïques.
D’autres sujets susceptibles de déclencher des batailles politiques locales sont l’éducation et les transports publics le jour du Shabbat. Le système éducatif est traditionnellement un enjeu clé des élections locales, tandis que les transports publics le jour du repos juif sont depuis longtemps un symbole de la lutte entre laïcs et religieux en Israël.
Israel Hofshit – Be Free Israel, une organisation dédiée à la liberté religieuse et au pluralisme, offre une méthode pour mesurer l’impact du clivage religieux-laïc sur les élections locales. Les facteurs qui entrent dans son indice de « liberté » comprennent le transport et l’activité commerciale le jour du Shabbat, le financement des activités religieuses, l’éducation, les droits des LGBTQ, les événements où les hommes et les femmes sont séparés et les offices religieux.
Selon l’indice, les villes ayant obtenu les meilleurs scores de liberté sont Hod Hasharon, Tel Aviv, Givatayim et Modiin. Les scores les plus faibles ont été relevés à Beitar Illit, Bnei Brak, Modiin Illit et Ramle.
Alors que certains résidents s’inquiétaient de la progression de l’influence religieuse, à l’approche des élections locales de 2018, plusieurs factions locales avaient émergé à travers le pays, adoptant le label « free » [libre] d’Israël Hofshit et se positionner comme des combattants des valeurs laïques. Des factions telles que « Givatayim Free », « Free Modiin » et « Free Ramat Hasharon » sont devenues influentes dans la politique locale, même si le mouvement « Free Israel » affirme être non partisan.
Les prochaines élections locales pourraient devenir, dans certaines villes israéliennes, un véritable champ de bataille autour de la question du fossé entre religion et laïcité.
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