« La directive controversée de l’armée a causé la mort d’un soldat à Gaza »
L’auteur du code de l’éthique de l’armée regrette la mauvaise interprétation du Protocole Hannibal
Mitch Ginsburg est le correspondant des questions militaires du Times of Israel

Le principal auteur du code de l’éthique de l’armée a déclaré mercredi que le protocole Hannibal est toujours mal interprété et que la mise en œuvre défectueuse de l’ordre a probablement provoqué la mort d’un soldat israélien à Gaza pendant la guerre l’été dernier.
« Je ne veux pas révéler qui est le soldat et dans quel incident cela est arrivé, mais j’ai une base solide pour [affirmer] cela », a déclaré le professeur Asa Kasher à la conférence rabbinique Tzohar à Jérusalem.
« 89 % de ce qui est dit à propos de l’ordre est faux », a-t-il précisé.
Le protocole Hannibal a été rédigé pendant l’été 1986, un an après l’accord Jibril au cours duquel Israël a échangé 1 150 prisonniers sécuritaire en échange de trois soldats israéliens, et cela, plusieurs mois après l’enlèvement des soldats Yosef Fink et Rafael Alsheikh.
L’idée était d’établir une procédure, connue de tous les soldats, pour limiter la réussite de toute opération d’enlèvement menée contre des soldats de Tsahal.
« Nous avions besoin de clarté », a déclaré l’ancien conseiller en sécurité nationale le major général (à la retraite), Yaakov Amidror, l’un des trois officiers qui a rédigé l’ordre, au Times of Israel l’été dernier.
Ce qui a été mis en place était un protocole qui ordonnait aux soldats de contrecarrer l’enlèvement d’un soldat, « même si cela revenait à nuire ou à blesser nos soldats », mais en évitant de les tuer directement.
Interrogé pour savoir si cela signifiait – comme les officiers le disaient souvent dans le sud du Liban – que les soldats sont tenus d’ouvrir le feu avec leurs armes sur un véhicule en retraite même si cela signifie de mettre un de leurs camarades en grave danger, mais d’éviter de tirer avec, par exemple, un missile guidé qui tuerait presque sûrement tout le monde dans le véhicule, Amidror a répondu : « Exactement ».
Lors de la conférence, Kasher dit qu’il y a un refrain commun, qu’il a entendu trop souvent parmi les soldats : « Mieux vaut un soldat mort qu’un soldat enlevé. »
Il a qualifié cette idée de « scandaleuse » et a affirmé qu’elle trahissait une ignorance complète de l’accent mis sur la valeur de la vie dans le code d’éthique de Tsahal.
« Le point de départ est que la valeur de la vie dépasse la valeur d’empêcher d’un enlèvement », a-t-il affirmé.
Le problème a été placé au premier plan le 1er août, quand les agents du Hamas ont violé un cessez-le-feu et attaqué une escouade de soldats de la Brigade Givati, en tuant deux soldats et en enlevant le lieutenant Hadar Goldin.
Les forces armées présentes sur le terrain ont déclaré : « Hannibal », ce qui a déclenché une fusillade massive et pourrait avoir, en plein tumulte, été directement responsable de la mort de quelque 40 civils palestiniens.
Le MAG, un corps de l’armée israélienne, enquête toujours sur l’incident et cherche à déterminer si la réponse de l’armée à Rafah ce matin-là, a été menée dans les paramètres de proportionnalité et de distinction.
Kasher, qui a parlé au Times of Israel après la rencontre, a noté que la proportionnalité est déterminée par l’importance militaire d’une certaine cible et la perte attendue de vies civiles dans la poursuite de cet objectif.
Le protocole Hannibal peut être lancé dans le cas extrême où l’enlèvement d’un seul soldat est une perte d’une grande importance stratégique.
Rabbi Eléazar Goldstein, auteur de « L’éthique juives militaire » et participant au panel a dit qu’il était à Gaza, le matin de l’enlèvement et qu’il a entendu des soldats dire : « Ça y est. Nous avons perdu. »
Kasher blâme la famille de l’ancien prisonnier Gilad Shalit enlevé par le Hamas – qui a fait pression sur Israël pour qu’il libère beaucoup de terroristes emprisonnés en échange de leur fils – et sur le juge à la retraite Eliyahu Winograd. Le professeur a aussi ajouté que la devise « Zéro enlevé » est « imbécile » et qu’Israël serait sage d’adopter l’approche américaine face à de telles tactiques : pas de négociations avec les terroristes.