La famille Kehati affirme que l’armée n’a pas été franche au sujet de la mort de leurs fils
Le chef d’état-major de Tsahal ordonne l'ouverture d'une enquête sur les circonstances de l'assassinat du sergent Gur Kehati et du septuagénaire civil Zeev Erlich en novembre
La famille d’un soldat tué en novembre aux côtés d’un archéologue civil introduit au sud-Liban sans autorisation officielle a accusé les autorités militaires de brouiller les circonstances de sa mort. Elle a affirmé n’avoir appris que par les médias que le soldat était mort en dehors des combats habituels, selon un reportage diffusé cette semaine.
Des questions tournent autour de la mort du sergent Gur Kehati, 20 ans, et de l’historien Zeev Erlich, 71 ans, depuis qu’ils ont été tués le 20 novembre par des terroristes libanais du Hezbollah dans le village de Shama, dans le sud du Liban. Le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général Herzl Halevi, a ordonné cette semaine à la police militaire d’ouvrir une enquête criminelle sur ces faits.
Bien qu’Erlich ait porté un uniforme de Tsahal et ait été accompagné par un officier supérieur, le chercheur n’avait pas d’autorisation officielle de l’armée pour se trouver au Liban, où il aurait tenté d’étudier une forteresse médiévale et un sanctuaire voisin vénéré par les chrétiens et les musulmans chiites comme étant le lieu de sépulture de Saint-Pierre datant du Iᵉʳ siècle.
Selon une enquête diffusée par la Treizième chaîne mardi, la famille de Kehati n’a d’abord reçu aucun détail sur la mort de leur fils. Ils n’ont su qu’il ne s’agissait pas d’un incident de combat ordinaire que le lendemain, à la radio, lorsqu’ils ont appris qu’un civil avait été tué aux côtés de leur fils et que l’armée avait qualifié les faits « d’échec ».
Le père du soldat défunt, Ron Kehati, a déclaré à la Treizième chaîne que l’armée lui avait dit que son fils était un « héros » et qu’il avait sauvé la vie de ses compagnons d’armes.
M. Kehati a ajouté que lorsqu’il avait demandé à un officier des précisions sur cette affaire, celui-ci, le lieutenant-colonel Uri Sapir, avait insisté sur le fait que la visite du sanctuaire, qualifié de mosquée dans le reportage, avait été effectuée à des fins « opérationnelles ».
Dans un enregistrement de la conversation, Sapir déclare que la mission a été planifiée et organisée pour récupérer le corps d’un terroriste tué quelques jours plus tôt, au cours d’un incident qui a entraîné la mort d’un autre soldat, le sergent Ori Nisanovich.
Dans les jours qui ont précédé cette affaire, des médias libanais avaient fait état de violents combats dans la région, et notamment d’une frappe aérienne israélienne qui avait lourdement endommagé le sanctuaire.
Selon M. Kehati, la famille a commencé à rassembler des éléments troublants lorsqu’elle a été contactée par d’autres soldats de l’unité de leur fils.
« Chaque fois qu’un soldat nous parlait, nous étions de plus en plus choqués », a déclaré M. Kehati. Le reportage comprenait des enregistrements des conversations avec les soldats, que Kehati avait enregistrés. « Rien n’était structuré. Rien. »
ההיתקלות במבצר בלבנון: ההקלטות חושפות מה באמת קרה בתקרית בה נהרגו לוחם גולני גור קהתי והאזרח זאב ז'אבו ארליך ז"ל? ומה ניסו להסתיר מהמשפחה? | לצפייה בתחקיר המלא: https://t.co/MkozVMyHi6
@RavivDrucker pic.twitter.com/rvYIahmkPt— המקור (@HaMakorTV) January 1, 2025
Selon la famille, deux commandants de l’unité sont venus à leur domicile et leur ont présenté des photographies aériennes de la zone où l’incident s’est produit.
L’un des soldats a déclaré qu’il s’était rendu personnellement dans la zone de la mosquée la veille pour rechercher le corps disparu, mais qu’il n’avait rien trouvé. Il a ensuite indiqué qu’il avait été contacté par le chef d’état-major de la Brigade Golani, le colonel Yoav Yarom, qui lui avait dit de tout de même préparer la mission dans cette zone.
Le jour venu, Yarom, qui accompagnait l’équipe en mission, a annoncé aux soldats qu’Erlich, l’archéologue de 71 ans, se joindrait également à eux.
Lorsque l’équipe s’est approchée du sanctuaire, elle a conclu que le corps du terroriste se trouvait probablement sous les décombres et s’est apprêtée à retourner à sa base, mais la situation a changé.
Selon le reportage, un soldat dit avoir entendu Erlich et un commandant parler de la forteresse adjacente, et plus particulièrement d’une inscription sur un mur.
Quelques soldats, dont Kehati, ont ensuite rejoint Erlich alors qu’il descendait dans la forteresse, où ils ont été immédiatement pris pour cible par des terroristes du Hezbollah qui se cachaient dans l’enceinte.
Erlich a été tué sur le coup, et Kehati a été abattu alors qu’il se précipitait pour apporter une aide médicale à un camarade blessé. Yarom a été modérément blessé lors de l’échange de tirs avec les terroristes et un commandant de compagnie du 13ᵉ bataillon de la Brigade Golani a également été grièvement blessé lors de la même embuscade.
L’armée a déclaré mercredi que Halevi avait ordonné que l’enquête de la police militaire sur la mort d’Erlich et de Kehati soit accélérée et qu’une enquête distincte – qui pourrait donner lieu à des mesures disciplinaires, mais pas à des poursuites pénales – soit suspendue jusqu’à ce que l’enquête de la police militaire soit terminée et que ses conclusions aient été remises à l’avocate militaire générale en vue d’un réexamen.
En réponse au reportage de la Treizième chaîne, l’armée a déclaré que les conclusions de l’enquête seraient communiquées à l’avocate militaire générale et aux familles d’Erlich, de Kehati et des personnes blessées dès qu’elles seraient terminées.
La famille de Kehati a déjà exprimé son désaccord sur la manière dont cette affaire a été traitée.
Lors d’une conférence à la mémoire d’Erlich en Cisjordanie la semaine dernière, les parents de Kehati et d’autres membres de la famille ont manifesté, accompagnés de journalistes de la Treizième chaîne et de Haaretz, reprochant aux participants d’avoir oublié leur fils et d’avoir organisé une cérémonie avant la fin de l’enquête.
« Lorsque Tsahal mène une enquête de police militaire contre quelqu’un qui, par un acte criminel, a causé la mort d’un soldat de Tsahal, vous ne pouvez pas venir en uniforme de Tsahal et donner du crédit à l’événement », avait alors crié le grand-père du soldat à l’adresse d’un commandant de brigade qui prenait la parole.
משפחתו של גור קהתי הגיעה לכנס שאורגן על ידי מועצת שומרון לזכר ז'אבו ארליך והחלה במחאה כשמח"ט שומרון, אריאל גונן, עלה לדבר. pic.twitter.com/NAvAHAbCcn
— Hagar Shezaf (@hagar_shezaf) December 25, 2024
Mardi soir, Halevi et d’autres commandants ont reçu les premières conclusions d’une enquête distincte dirigée par le général de division (Rés.) Moti Baruch, sur un certain nombre d’incidents de combat, y compris les décès de Kehati et d’Erlich, a déclaré l’armée.
L’équipe composée de onze officiers – pour la plupart des réservistes – était chargée de « dresser un tableau détaillé de la situation en ce qui concerne le maintien de la discipline opérationnelle, les règles de conduite et les normes dans les unités de l’armée » sur les fronts nord et sud, mais pas en Cisjordanie.
« L’équipe a constaté qu’en raison de la fatigue opérationnelle des différentes unités, qui ont combattu pendant plus d’un an et trois mois, il y avait un relâchement croissant de la discipline et des mesures de sécurité dans les différentes unités, ce qui s’est traduit par une utilisation incorrecte de l’armement et a conduit à des accidents opérationnels qui auraient pu être évités », a estimé Tsahal.