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L’Israélienne détenue en Russie prise en « otage », selon les officiels israéliens

Les conditions de détention de Naama Issachar, condamnée à 7 ans et demi de prison pour trafic de drogue, ont empiré après l'approbation de l'extradition d'un hacker russe aux USA

L'Israélo-américaine Naama Issachar, 26 ans, condamnée à sept ans et demi de prison en Russie pour trafic de drogue présumé
L'Israélo-américaine Naama Issachar, 26 ans, condamnée à sept ans et demi de prison en Russie pour trafic de drogue présumé

Les conditions de détention d’une Israélienne arrêtée en Russie pour possession de marijuana et condamnée vendredi à sept ans et demi de prison pour trafic de drogues se sont durcies peu après l’approbation par la Cour suprême israélienne de l’extradition d’un hacker russe aux Etats-Unis – renforçant à Jérusalem l’idée que son procès a été une initiative de Moscou prise en riposte à la détention en Israël de ce pirate informatique.

Naama Issachar, 26 ans, avait été appréhendée il y a six mois après la découverte présumée de 10 grammes de marijuana dans sa valise au cours d’une escale à Moscou, alors qu’elle rentrait en Israël.

Issachar revenait d’un voyage en Inde. Les chiens de la police avaient détecté la drogue alors que sa valise était transférée par les personnels de l’aéroport vers le nouvel avion qu’elle devait prendre à destination de Tel Aviv.

Sa famille a déclaré qu’Issachar, qui est également citoyenne américaine, est retenue en otage par la Russie alors même que Moscou n’a cessé d’exercer des pressions sur Israël en faveur de la libération d’un hacker russe risquant l’extradition vers les Etats-Unis.

La Russie aurait offert de procéder à un échange de prisonniers entre les deux détenus – une offre qu’Israël aurait refusé.

Aleksey Burkov, spécialiste des technologies de l’information arrêté en Israël en 2015 à la requête d’Interpol, avait indiqué avoir contacté la famille d’Issachar par le biais d’un ami afin qu’elle fasse pression sur les responsables israéliens en vue de procéder à un échange de prisonniers.

Ce contact n’a pas permis de trouver une solution en raison de la décision prise au mois d’août d’approuver l’extradition – une initiative qui serait difficile à renverser.

Le hacker russe Aleksey Burkov. (Capture d’écran/Kan 11)

S’exprimant devant les caméras de Russia Today, une chaîne russe de télévision financée par le gouvernement russe et largement considérée comme un outil de propagande, Burkov avait expliqué la semaine dernière qu’il avait « demandé aux proches d’Issachar de parler avec les diplomates israéliens mais, à partir de ce que j’ai pu comprendre, ces derniers ont assuré à la famille qu’il n’y aurait pas d’échange ».

L’intermédiaire présumé entre les deux familles aurait été Konstantin Bekenshtein, un immigrant ukrainien en Israël, qui a indiqué avoir rencontré Burkov à l’occasion de voyages antérieurs dans le pays et qui lui aurait rendu visite en prison, selon un reportage de Haaretz qui a été publié vendredi.

Bekenshtein aurait contacté Yaffa Issachar au mois d’août, selon l’article, lui écrivant un message : « En tant que père de deux filles, je comprends ce que vous êtes en train de traverser et je ne veux que du bien à votre famille. Aussi malheureux que ce soit, Naama va écoper d’une peine de cinq à sept ans. »

« Si vous voulez vous unir à nous pour mettre fin à ce cauchemar que vivent Naama et Aleksey, je serais à votre disposition quand vous le jugerez bon. Des avocats ne vous seront d’aucune aide », avait-il ajouté.

La famille d’Issachar n’avait pas répondu au message et a expliqué à Haaretz qu’elle avait bloqué les messages de Bekenshtein sur des réseaux de communication variés, ses proches s’inquiétant qu’il ne tente de profiter de leur détresse.

« Depuis des mois maintenant, les proches du hacker nous demandent de l’aide », a confié Yaffa Issachar à Haaretz vendredi. « Et nous comprenons maintenant que ce qu’elle disait était vrai : Naama paie pour cette affaire. »

Dans un post publié il y a deux mois sur Facebook, Bekenshtein avait écrit que malgré les requêtes répétées des responsables russes, l’Etat juif n’était « pas pressé » de libérer Burkov.

« Les Russes sont prêts à libérer Issachar en échange d’Aleksey Burkov », avait-il noté dans sa publication, « mais Israël ne fait rien ».

« La seule raison pour laquelle la Russie ne libère pas Naama est le refus d’Israël de relâcher Burkov… La solution ne se trouve pas à Moscou mais bien à Jérusalem », avait-il encore prétendu dans le post.

Burkov est recherché pour détournements de fonds aux Etats-Unis suite à une arnaque massive à la carte de crédit qui aurait permis de dérober des millions de dollars à des clients américains.

Il a déclaré à RT qu’il était « un homme ordinaire », un travailleur en free-lance originaire de Saint-Petersbourg qui se trouvait en Israël avec sa petite amie lorsque sa « vie a été bouleversée ». Il a clamé qu’il avait été « piraté » et emmené en détention dans le cadre d’un « plan américain standard ».

Dimanche, la chaîne Kan a fait savoir que peu après le feu vert donné à l’extradition de Burkov, les privilèges accordés à Issachar en détention avaient été significativement revus à la baisse – ce qui indique que tandis qu’elle n’avait pas été arrêtée, à l’origine, pour servir de monnaie d’échange, les choses ont bien changé ultérieurement.

Au mois d’août, Issachar avait été emmenée dans une prison éloignée de Moscou, tandis que les ressortissants nationaux sont habituellement emprisonnés dans une structure de la capitale.

Il lui est aujourd’hui, de surcroît, interdit de passer des appels téléphoniques. Elle n’a plus droit à de la nourriture casher, à des visites de sa famille ou de recevoir des lettres – des mesures qui visent à l’ordinaire des crimes bien plus importants que la possession de 10 grammes de cannabis au cours d’une courte escale à l’aéroport de Moscou.

Ces détails renforcent la présomption d’une arrestation qui aurait eu lieu pour exercer des pressions sur Israël en faveur de la libération de Burkov. La jeune détenue est ainsi devenue une « otage ».

La mère d’Issachar, Yaffa, a publié dimanche une lettre ouverte en hébreu et en russe adressée au président Vladimir Poutine qui a été publiée par le quotidien Yedioth Ahronoth dans laquelle elle a fait part de son espoir de ce que l’homme fort du Kremlin puisse décider de relâcher sa fille dans les jours à venir.

Naama Issachar et sa mère Yaffa dans un post sur Instagram, au mois de juillet 2018.

Dans la lettre, elle écrit espérer que Poutine n’est pas à l’origine du durcissement des conditions de détention d’Issachar et de l’initiative « antisémite » de prévoir des audiences, au tribunal, pendant les fêtes juives de Rosh HaShana et de Yom Kippour.

« M. Poutine, Naama ne peut pas devenir un élément de marchandage pour une personne qui a commis des délits sécuritaires – ou qui ne l’a pas fait. Ce n’est pas juste. Je suis sûr que vous ne voulez pas que l’histoire vous juge comme étant celui qui a été à l’origine de ce simulacre de procès, l’affaire Dreyfus 2.0. »

Le Yedioth a également publié une série de lettres écrites par Issachar et sa mère durant la détention de la jeune fille, détaillant le récit de son arrestation à l’aéroport, son optimisme se transformant petit à petit en désespoir, l’apprentissage de la vie avec les autres prisonnières, les conditions de détention ne cessant d’empirer, son choc en apprenant qu’elle était accusée de trafic, la demande soumise par la jeune fille à sa mère de promettre qu’elle ferait tout ce qu’elle pourrait pour obtenir sa libération.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a affirmé à la mère de la jeune prisonnière, au lendemain du verdict, qu’il « faisait tout » pour garantir que sa fille serait relâchée.

Selon la Douzième chaîne, Netanyahu a appelé Yaffa et lui a demandé de faire en sorte que sa fille garde espoir. Pour sa part, Yaffa a dit au Premier ministre qu’elle pensait que Naama pourrait être libérée « dans les prochains jours » si Israël savait prendre la bonne décision.

La condamnation d’Issachar a été prononcée vendredi malgré un plaidoyer « personnel » de Netanyahu auprès de Poutine, lui réclamant l’indulgence.

Vendredi soir, Yaffa Issachar a déclaré à la Douzième chaîne, commentant la condamnation, que « nous lui avons dit que nous ferions appel. Elle tremblait comme une feuille… Ce jugement est totalement inadapté à ce qu’elle a pu faire ».

Elle a ensuite lancé un appel public à Netanyahu : « Je vous en supplie. Vous devez la faire sortir de là. Elle vit dans des conditions terribles. Il y a des fils barbelés et des chiens, et elle s’endort au son des portes en fer qui claquent. »

L’avocat d’Issachar a également dit à la Douzième chaîne que jamais, dans l’histoire de la Russie, quelqu’un avait pu être arrêté pour trafic de drogues sans être seulement entré dans le pays.

« Naama n’a pas traversé les douanes. Son bagage se trouvait entre les mains de la ligne aérienne et elle ne l’aurait récupéré que lors de son atterrissage à Tel Aviv », a commenté Alexander Tayus. « Légalement, elle n’a commis aucun crime en Russie. Il est possible que la décision ait été prise simplement parce qu’elle est Israélienne et qu’elle soit née de considérations plus politiques que judiciaires. »

Samedi soir, la Douzième chaîne a diffusé un extrait audio d’un appel passé par Naama au magistrat, avant l’énoncé de la condamnation. Elle y déclare au juge qu’elle est « consciente d’avoir été irresponsable avant de prendre [son] vol, [qu’elle aurait] dû faire attention à tout ce qui se trouvait dans [son] bagage. C’est la raison pour laquelle [elle] endosse toute la responsabilité de l’accusation de consommation de drogues ».

« J’estime malgré tout que l’accusation de trafic est injuste et injustifiée », s’exclame-t-elle néanmoins.

« Mes actions montrent que je n’ai jamais eu l’intention d’entrer dans le pays. Et si mes paroles ne sont pas suffisantes pour me croire, comme l’a dit le procureur : Il y avait sept heures entre mes deux vols. Je n’ai pas tenté de quitter la zone de transit ou de réclamer mes bagages… La police m’a arrêtée alors que j’essayais d’embarquer dans le vol qui devait me ramener chez moi. »

Elle ajoute « comprendre que ce dossier soit pris très au sérieux par la fédération russe mais conjurer de reconnaître qu’il s’agit d’une erreur d’un individu qui n’avait aucunement l’intention d’entrer dans le pays ou d’interférer avec la loi ».

Le ministre de la Justice israélien Amir Ohana a déclaré samedi à la Treizième chaîne que la sanction dont a écopé Issachar était « sans l’ombre d’un doute, disproportionnée ». Il a expliqué qu’il examinerait dans les prochains jours la décision d’extradition de Burkov.

Vendredi, un haut-responsable israélien a confié aux médias israéliens que la Russie avait proposé à plusieurs occasions, ces derniers mois, de libérer Issachar si l’Etat juif consentait à relâcher Burkov.

Le responsable a ajouté qu’un accord n’avait jamais été conclu parce qu’Israël avait déjà lancé la procédure d’expulsion et ne voulait pas mettre en colère les Etats-Unis.

Les diplomates israéliens avaient indiqué à leurs homologues de Moscou qu’arrêter l’extradition de Burkov était impossible, la Cour suprême l’ayant d’ores et déjà approuvée.

Dans un communiqué émis vendredi suite à la condamnation d’Issachar, le bureau de Netanyahu a expliqué qu’il n’y avait aucun moyen d’empêcher l’extradition du jeune Russe vers les Etats-Unis.

Le communiqué a ajouté que Netanyahu s’était « personnellement impliqué dans le cas de Naama ces dernières semaines » et réclamé que sa condamnation soit allégée et que ses conditions de détention soient améliorées.

Naama Issachar est détenue à Moscou ou dans ses environs depuis avril. (Naama Issachar/Instagram via JTA)

« Netanyahu a demandé à ce que la condamnation soit commuée et un allègement des conditions de l’incarcération de Naama », a poursuivi le communiqué. « À notre grand regret, les procureurs russes n’ont pas accepté ces requêtes. »

Le bureau du Premier ministre a ajouté que la sanction « est disproportionnée et ne correspond pas à la nature du délit attribué à Issachar ».

Les procureurs expliquent que dans la mesure où le bagage d’Issachar a pénétré dans l’espace aérien russe, avec des stupéfiants à l’intérieur, elle peut être considérée comme une trafiquante et ce même si, par ailleurs, elle n’a jamais eu l’intention de pénétrer sur le sol russe.

L’AFP a contribué à cet article.

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