La parole des victimes d’abus sexuels libérée par une nouvelle loi
"Ceux qui doivent se cacher sont les criminels et non les victimes", a dit la ministre de la Justice

Les victimes d’abus sexuel pourront désormais s’exprimer et prendre part à des interviews dans les médias sans autorisation du tribunal, suite à l’approbation à la Knesset, lundi, d’un amendement législatif.
Jusqu’à présent, le code pénal avait interdit la publication de détails permettant d’identifier une victime à moins qu’un magistrat n’approuve une lettre de consentement, écrite par la victime, à la médiatisation de son affaire ou qu’il ne statue que cette médiatisation était autorisée en raison de circonstances particulières.
Les victimes – qui risquaient dans le passé une peine de prison d’un an si elles s’exprimaient – étaient généralement identifiées dans les médias par la première lettre de leur nom.
« Ceux qui doivent se cacher sont les criminels et non les victimes », a déclaré la ministre de la Justice Ayelet Shaked, qui a fait avancer l’amendement. Le texte est passé en deuxième et troisième lectures avec 62 voix en sa faveur, sans opposition ni abstention.
Les victimes de violences sexuelles désireuses de médiatiser leurs histoires devront toujours signer un courrier de consentement, qui devra être approuvé par les juges s’il implique un mineur.
Shaked a expliqué que la loi originale avait entraîné une situation absurde dans laquelle les victimes qui s’étaient exprimées étaient considérées comme des criminelles, subissant une double peine – la première par l’agression sexuelle et la deuxième en étant dans l’obligation de maintenir leurs versions des événements sous embargo.

L’amendement a regroupé des projets de loi soumis par plusieurs députés, notamment par Yifat Sasha-Biton et Merav Ben-Ari (Koulanou); Orly Levy-Abekasis (indépendant); Aliza Lavie, Yael German et Karine Elharrar (Yesh Atid); et Shelly Yachimovich, Yael Cohen-Paran et Hilik Bar (Union sioniste).
Lavie a expliqué que l’amendement permettait d’adapter la législation aux besoins du monde réel, notant une forte hausse du harcèlement des femmes dans le monde entier depuis le début du mouvement #MeToo.
Le mouvement avait commencé à se propager sur les réseaux sociaux au mois d’octobre 2017, suite à des accusations de violences sexuelles contre le magnat de Hollywood Harvey Weinstein.
« Les chiffres décrient la nécessité pour les victimes de crimes sexuels de briser le silence et de bénéficier d’une exposition et d’une reconnaissance sociales », a dit Lavie. « Chaque victime ouvre la porte à la suivante, permettant au sujet de passer sur le devant de la scène et d’avancer vers un changement de société, débarrassée des fléaux du harcèlement et des abus sexuels ».