L’Afrique du Sud va rétrograder son ambassade en Israël
Cette décision intervient un an après que le parti au pouvoir a décidé de transformer l’ambassade de Ramat Gat en "bureau de liaison"
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Le gouvernement d’Afrique du Sud est engagé « dans le processus » de déclassement de son ambassade en Israël et travaille sur « les modalités » d’une telle décision, a déclaré le président du pays. Dans le même temps, Pretoria a souligné son désir de dialoguer avec les deux parties impliquées dans le conflit israélo-palestinien.
« Le gouvernement est [engagé] dans le processus pour faire appliquer une résolution du parti au pouvoir stipulant que l’Afrique du Sud devrait déclasser son ambassade en Israël », a déclaré jeudi le président Cyril Ramaphosa en réponse à une question parlementaire.
En décembre 2017, à l’occasion de la Conférence nationale biannuelle de Johannesburg, le Congrès national africain, le parti au pouvoir, avait adopté à l’unanimité une résolution appelant le gouvernement à transformer l’ambassade de Pretoria à Ramat Gan en « bureau de liaison »
Des militants locaux pro-Palestiniens et des responsables politiques expérimentés de l’ANC, dont Lindiwe Sisulu le ministre des Affaires étrangères, ont depuis appelé maintes fois à mettre en pratique la décision.
L’année dernière, Sisa Ngombane, l’ancien ambassadeur d’Afrique du Sud en Israël, a mis un terme à son mandat. Jérusalem ne s’attend pas à ce que Pretoria lui désigne un remplaçant dans un avenir proche, ce qui revient de facto à un déclassement des relations bilatérales. Mais aucun déclassement formel n’a eu lieu.
Jeudi, après un discours à l’Assemblée nationale au Cap, le député Ahmed Shaik Emam a interrogé le président sud-africain sur l’avancée du processus de déclassement de l’ambassade.
« Notre démarche se justifie par notre préoccupation au sujet des violations continues du droit du peuple palestinien à l’auto-détermination et au refus du gouvernement d’Israël d’entrer dans des négociations réelles pour trouver une résolution juste et pacifique à ce conflit », a répondu le président.
« Nous sommes également préoccupés par la résurgence de la confrontation et des conflits dans la région et par le grave coût humanitaire de cette intransigeance prolongée, » a-t-il poursuivi. « Notre démarche repose aussi sur l’appréciation du rôle constructif que l’Afrique du Sud est appelée à jouer dans la recherche d’une paix au Moyen-Orient ».
Son gouvernement soutient la création d’un État palestinien « en plus du droit de l’État d’Israël à exister en paix et en sécurité avec ses voisins », a-t-il ajouté.
« Dans l’application de cette résolution, nous gardons à l’esprit la responsabilité de l’Afrique du Sud à continuer à s’engager avec toutes les parties du conflit pour voir où nous pourrions apporter notre aide. Pour cette raison, le gouvernement sud-africain reste engagé dans les modalités de rétrogradation de l’ambassade sud-africaine en Israël, et nous communiquerons une fois que le Cabinet aura totalement finalisé cette question. »
Le ministère des Affaires étrangères a refusé de commenter la déclaration de Cyril Ramaphosa.
Arthur Lenk, l’ancien ambassadeur israélien à Pretoria, a déclaré que ce sont les Sud-Africains qui sont les perdants de ce refus d’envoyer un nouvel ambassadeur à Ramat Gan.
« Ils ne bénéficient pas de tous les avantages, du service consulaire et du développement commercial que le personnel au complet d’une ambassade permet », a-t-il déclaré au Times of Israël dimanche.
Le 14 mai 2018, l’ambassadeur Ngombane avait été rappelé à Pretoria « jusqu’à nouvel ordre », en protestation contre la mort d’au moins 55 Palestiniens dans des affrontements violents avec l’armée israélienne à la frontière de Gaza. Le groupe terroriste du Hamas qui règne sur la bande de Gaza a ensuite reconnu que la majorité des morts étaient des membres de son organisation.
Ngombane était ensuite revenu pour une courte période afin de régler des affaires personnelles avant de quitter Israël de manière permanente.
Des responsables de la communauté juive d’Afrique du Sud ont ensuite qualifié la décision du gouvernement de retirer l’ambassadeur de « scandaleuse », affirmant que cela témoignait « d’un double standard grossier à l’encontre de l’Etat juif ». Ils avaient appelé le gouvernement à revoir sa décision.
« En retirant son ambassadeur, » faisait savoir leur communiqué, « l’Afrique du Sud s’ôte la possibilité de jouer un rôle significatif dans l’élaboration d’une solution nécessaire à ce conflit ».