Israël en guerre - Jour 469

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Le combat d’un homme pour rapatrier de Gaza la dépouille de son cousin, enlevé le 7 octobre

Le corps de Tal Chaimi est toujours aux mains des terroristes ; Udi Goren est le représentant de la famille, et réclame le retour de tous les otages, vivants ou morts

Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

  • Oiseaux au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Udi Goren)
    Oiseaux au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Udi Goren)
  • Udi Goren, dont le cousin Tal Haimi a été tué et dont le corps a été capturé par des terroristes du Hamas le 7 octobre, au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)
    Udi Goren, dont le cousin Tal Haimi a été tué et dont le corps a été capturé par des terroristes du Hamas le 7 octobre, au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)
  • Udi Goren, dont le cousin Tal Haimi a été tué et dont le corps a été capturé par des terroristes du Hamas le 7 octobre, au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)
    Udi Goren, dont le cousin Tal Haimi a été tué et dont le corps a été capturé par des terroristes du Hamas le 7 octobre, au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Udi Goren lève son appareil photo usé – c’est un Canon – et il l’oriente au-dessus des eaux tranquilles de l’éco-parc de Hod Hasharon, fixant son objectif sur un martin-pêcheur qui s’envole dans le soleil légèrement brumeux de la fin de l’après-midi.

Goren dit qu’il se reconnaît dans la silhouette de l’oiseau au long bec qui plane au-dessus de l’étang artificiel. Visant un poisson dans les eaux calmes, au-dessous, le martin pêcheur plonge avec grâce vers sa proie.

Ce qui rappelle ce que Goren, 43 ans, tente d’accomplir depuis 14 mois alors qu’il aide les membres des familles d’otages désespérées à l’idée de ne jamais revoir leurs proches dans leur lutte : observer, attendre et enfin se jeter à l’eau, de manière discrète mais confiante, dès que l’occasion se présente.

Le cousin de Goren, Tal Chaimi, avait été kidnappé par des terroristes et emmené dans la bande de Gaza le 7 octobre 2023, alors qu’il se battait pour défendre son kibboutz natal de Nir Yitzhak. Pendant les premiers mois, la famille de Chaimi avait gardé l’espoir qu’il était encore en vie, mais l’armée israélienne avait confirmé, au mois de décembre dernier, qu’il avait perdu la vie dans la matinée du massacre – 1 200 personnes devaient trouver la mort lors du pogrom commis par les hommes armés du Hamas dans le sud d’Israël et 251 personnes avaient été enlevées, prises en otage dans la bande de Gaza.

Son corps sans vie est entre les mains du Hamas au sein de l’enclave côtière.

Depuis, Goren, photographe de carrière, consacre tout son temps à la lutte visant à enfin rapatrier les otages – les vivants comme ceux qui ne le sont plus – sur le sol israélien, et il espère qu’Israël va bientôt conclure un accord avec le groupe terroriste au pouvoir dans la bande de Gaza.

Il organise les tours de présence des familles d’otages à la Knesset – où ces dernières assistent aux réunions des commissions du Parlement, où elles prononcent des discours et où elles s’entretiennent avec les députés, s’assurant ainsi que les otages conserveront une visibilité aux yeux du gouvernement.

Udi Goren avec un poster à l’effigie de son cousin, Tal Chaimi, tué le 7 octobre et dont le corps sans vie a été emmené en captivité à Gaza. (Autorisation)

« Nous créons des agitations médiatiques, nous faisons parler des otages dans les journaux de manière à ce que les politiciens ne puissent pas nous ignorer », dit Udi Goren. « C’est ce qui fait la différence parce que nous sommes présents en permanence. Ils sont obligés de nous prêter attention. On ne peut pas nous ignorer et ça vaut la peine de faire des efforts ».

Goren va maintenant rejoindre le comité directeur – formé de six membres de familles d’otages – qui dirige le Forum des familles d’otages et de portés-disparus, l’organisation ad hoc qui s’est constituée au lendemain du 7 octobre pour soutenir le combat mené au nom de la libération des captifs.

Les six représentants des familles ont été élus à deux reprises depuis la création du comité directeur, plusieurs mois après la création du forum.

« Le conseil d’administration est considéré comme influent, c’est là où on discute des campagnes et des budgets », dit-il. « C’est un poste important ».

Selon Goren, les membres des familles d’otages ne sont pas nombreux à briguer ce genre de fonction dans la mesure où les familles sont fatiguées et désespérées.

Mais c’est là que les décisions sont prises, avec un dialogue permanent entre les membres élus des familles et les employés rémunérés du forum qui peuvent ainsi débattre de la meilleure manière de faire face à la situation.

Le 8 décembre, Udi Goren et six autres membres des familles d’otages ont rencontré le Premier ministre Benjamin Netanyahu, afin d’obtenir des réponses sur la probabilité de la finalisation d’un prochain accord sur les otages.

Udi Goren, deuxième à partir de la gauche, avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu lors de sa rencontre avec des parents d’Israéliens retenus en otage à Gaza, le 8 décembre 2024. (Crédit : Kobi Gideon/GPO)

Au même moment, Netanyahu s’est aussi entretenu, lors d’une réunion distincte, avec le Forum Tikva, qui représente une minorité de familles qui ont nettement apporté leur soutien à la gestion de la guerre de la part du gouvernement, mettant l’accent sur l’importance de la pression militaire pour obtenir la remise en liberté des captifs – ce qui n’est pas le cas de l’organisation principale.

« Nous essayons de parvenir à la première phase d’un accord et de faire sortir quelques otages », indique Goren. « Je comprends de façon réaliste qu’avec ce gouvernement, avec ce Premier ministre, il n’y aura pas plus que ça – ça nous a été clairement expliqué. Peu importe ce que j’en pense, c’est terrible et triste – mais c’est hélas la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement ».

Goren dit ne pas vraiment espérer que les négociations en cours permettront de ramener le corps sans vie de son cousin en Israël – il pense que seuls quelques otages seront libérés en Israël. S’il y en a.

Tout cela est bien loin de son travail initial de joueur de volley-ball professionnel (qu’il a arrêté alors qu’il avait environ 20 ans après une blessure au dos), puis de guide de voyage. Mais Goren, un homme calme, posé et charismatique – il ressemble d’ailleurs physiquement à son cousin – peut parler à n’importe qui, qu’il s’agisse de membres de la Knesset, du Premier ministre ou des membres de familles d’otages complètement désemparées.

« J’ai été jeté à l’eau, mais ça ne me dérange pas », explique Goren qui regarde encore le martin-pêcheur dans le viseur de son appareil photo, un mardi après-midi. « J’ai toujours su que je voulais faire davantage au sein de la société israélienne pour rendre ce pays meilleur – et voilà où j’en suis maintenant ».

Le cousin de Goren, Chaimi, a laissé derrière lui son épouse, Ella, qui était enceinte, ainsi que trois enfants, des jumeaux de 10 ans et un enfant de 7 ans. Ella a donné naissance à son quatrième enfant, un petit garçon, au mois d’août dernier.

Tal Chaimi, et son épouse Ella, a été capturé par des terroristes du Hamas, au kibboutz Nir Yitzhak, le 7 octobre 2023. (Autorisation)

Dans le sillage de la tragédie, c’est Goren, le cousin de Chaimi, qui a pris la défense de cette famille et qui est devenu leur représentant dans leur lutte en faveur du rapatriement de la dépouille de l’otage – pour qu’il puisse être inhumé dignement.

« J’étais suffisamment éloigné de tout ça en tant que cousin germain pour pouvoir intervenir et je pouvais participer à ce combat », note Goren.

Ils sont parents – et pas si éloignés que cela pourrait sembler être le cas au premier abord.

Goren et Chaimi sont nés à trois mois d’intervalle et ils sont cousins germains du côté de la mère de Goren. L’oncle maternel de Goren, fondateur du kibboutz, était le grand-père de Chaimi qui avait rencontré sa future épouse – qui devait s’avérer être une cousine du grand-père de Goren – lors du mariage des grands-parents de ce dernier.

La majorité des membres de la famille de Chaimi sont restés au kibboutz. Goren, de son côté, a grandi à Hod Hasharon, non loin de l’éco-parc – qui n’existait pas encore quand il était enfant.

Mais c’est à Nir Yitzhak que vivaient ses arrière-grands-parents et ses grands-parents, ainsi que ses tantes, ses oncles et ses cousins. Le kibboutz a été, dit Goren, au cœur de son enfance.

Udi Goren (à droite), cousin de Tal Chaimi (à gauche), dont le corps sans vie est détenu par le Hamas, quand étaient tout petits sur une vieille photo, conservée par leur arrière-grand-père dans le kibboutz de Nir Yitzhak, près du site où Chaimi a été assassiné le 7 octobre 2023. (Autorisation)

« J’adorais être là-bas », se souvient-il. « Mes arrière-grands-parents avaient toujours ce bol de bonbons sur la table basse en bois, et il y avait un arbre à l’extérieur auquel je grimpais. Il y avait le coin des animaux et un cousin de mon âge, il y avait la salle à manger du kibboutz, c’était toujours amusant ».

C’était au kibboutz que sa famille passait ses vacances et ses week-ends. Plus récemment, Goren a rendu visite à ses cousins Chaimi, à Tal et à sa sœur Or, ainsi qu’à leurs familles – une quatrième génération qui a choisi d’élever ses propres enfants au sein du kibboutz.

Il s’y était rendu avec sa propre famille en avril 2023, six mois avant le 7 octobre, gambadant dans les champs de fleurs avant de dîner avec ses proches.

Vue aérienne de randonneurs israéliens marchant parmi les parterres de fleurs à Nir Yitzhak, dans le sud d’Israël, le 18 avril 2015. (Crédit : Edi Israel/Flash90)

Dans la matinée du 7 octobre, Goren, sa femme et sa petite fille étaient chez eux, à Pardes Hanna, une ville située entre Césarée et Hadera, à deux heures et demie de route de Nir Yitzhak, lorsqu’ils ont entendu les informations portant sur l’assaut lancé par le Hamas à Sderot.

« J’ai pensé que c’était faux, je me suis demandé pourquoi il y avait une camionnette du Hamas au milieu de Sderot », se souvient-il.

Sa mère était en contact sur WhatsApp avec ses cousins qui se trouvaient tous dans leur pièce sécurisée. Chaimi, le cousin de Goren, ainsi qu’Oren Goldin, le beau-frère de la sœur de Chaimi, Or, étaient tous les deux à l’extérieur en train de combattre les terroristes du Hamas dans le cadre de l’équipe d’urgence du kibboutz.

Mais la famille a soudainement cessé de répondre aux messages. Ils ne le savaient pas encore, mais les deux hommes avaient été tués et leurs corps sans vie avaient été emmenés à Gaza. La dépouille de Goldin a été récupérée par l’armée israélienne au mois de juillet, tandis que celle de Chaimi est toujours retenue en captivité avec celle de Lior Rudaeff, un autre membre de l’équipe d’intervention du kibboutz. Au total, six membres de l’équipe avaient été tués ce jour-là.

Cinq membres d’une même famille avaient également été emmenés en captivité, le 7 octobre. Gabriela Leimberg, Mia Leimberg et Clara Marman ont finalement été libérées dans le cadre d’une trêve d’une semaine, à la fin du mois de novembre, et Fernando Marman et Luis Har ont été secourus par les forces de Tsahal au mois de février 2024.

De leur côté, Ella Chaimi et ses enfants avaient été évacués avec le reste du kibboutz, dès le lendemain du pogrom, vers le kibboutz Eilot, puis vers le kibboutz Mashabei Sade qui se trouve dans le Néguev – où ils sont restés jusqu’à présent.

Des oiseaux dans le parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Crédit Udi Goren)

Le 7 octobre, Udi Goren était convaincu que d’autres cellules terroristes du Hamas s’étaient infiltrées en Israël et allaient poursuivre les pogroms.

Il était tout aussi certain que les cellules terroristes du Hamas opérant dans la région voisine de Wadi Ara, située à l’intérieur de la Ligne verte mais proche de la Cisjordanie, se joindraient à l’attaque et que le Hezbollah au Liban attaquerait à un moment ou à un autre.

S’il n’y a pas eu d’attaques du Hamas dans le centre ou le nord d’Israël, le Hezbollah a effectivement commencé à tirer des missiles presque quotidiennement sur le nord dès le lendemain, le 8 octobre.

Udi Goren, dont le cousin Tal Haimi a été tué et dont le corps a été capturé par des terroristes du Hamas le 7 octobre, au parc écologique de Hod Hasharon le 10 décembre 2024 (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Pour Goren, l’invasion n’était pas une surprise. Vu l’augmentation constante des tirs de roquettes et d’infiltrations depuis Gaz, cela faisait de nombreuses années que les membres de sa famille à Nir Yitzhak parlaient d’une attaque de ce type.

Se sentant incapable de protéger sa femme et sa fille, Goren avait, dès la mi-journée, réservé des billets pour la Grèce. Lorsque ce plan a échoué, il s’est tourné vers Chypre, où ils prévoyaient d’attendre que la situation s’améliore.

Ils ont finalement passé un mois à Larnaca. Quelques jours après leur arrivée, Goren a appris que son cousin était officiellement considéré comme un otage. Il a alors commencé à s’adresser aux médias internationaux pour raconter ce qui s’était passé dans le kibboutz de sa famille.

En novembre, Goren est retourné en Israël, où il s’est impliqué bénévolement dans les efforts médiatiques du Forum des familles d’otages et a pris un rôle plus actif à la Knesset.

« J’ai été jeté dans le grand bain », a-t-il déclaré.

Le siège du forum à la Knesset est une simple table située dans un couloir entre deux cafétérias, servant de base ad hoc pour assister aux réunions des commissions et discuter avec les membres de la Knesset.

Udi Goren, dont le cousin Tal Chaimi a été assassiné, et sa dépouille emportée par des terroristes du Hamas le 7 octobre, à la Knesset le 9 décembre 2024. (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Avec sa récente nomination au conseil d’administration du Forum, Goren va quitter son travail à la Knesset pour se concentrer sur sa carrière de photographe. Cela s’impose alors que les subventions et opportunités rémunérées pour les bénévoles du forum se raréfient.

« Je vais à nouveau me dépasser », a-t-il déclaré.

Il ajoute que « ce que les gens n’ont pas compris, c’est qu’il s’agit d’une situation permanente. C’est une prise d’otages, et nous ne savons pas quand elle prendra fin. Je veux juste enterrer mon cousin et ramener le reste des otages à la maison. »

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