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Le « dating » chez des particuliers, plan B des Juifs orthodoxes en Israël

Selon les chiffres du ministère des Affaires religieuses, le nombre de mariages a baissé de plus de 10 % en 2020 dans le pays par rapport à l'année précédente

Un Juif ultra-orthodoxe et une femme discutent sur un banc sur une place du centre de Jérusalem, le 27 janvier 2021. (Crédit : MENAHEM KAHANA / AFP)
Un Juif ultra-orthodoxe et une femme discutent sur un banc sur une place du centre de Jérusalem, le 27 janvier 2021. (Crédit : MENAHEM KAHANA / AFP)

« Terrasse avec vue sur Jérusalem. Prévoir des vêtements chauds. Boissons offertes ! Endroit idéal aussi pour les demandes en mariage ! » L’annonce, récemment publiée sur une application recensant les lieux de rencontre pour les Juifs orthodoxes célibataires en Israël, peut paraître incongrue.

Mais avec la pandémie de coronavirus et la fermeture des lieux où les Juifs religieux se donnaient habituellement rendez-vous, l’hospitalité de particuliers disposés à leur prêter leur terrasse, cour, ou jardin est devenue un des seuls moyens pour eux de trouver l’âme sœur.

La loi religieuse juive (halakha), qui proscrit les relations sexuelles hors mariage, interdit à un homme et une femme célibataires de se retrouver seuls dans une pièce et d’avoir tout contact physique.

Chez les Juifs orthodoxes, les têtes-à-têtes précédant le mariage sont strictement codifiés et les époux potentiels sont souvent mis en relation par un intermédiaire. Les entrevues se déroulent la plupart du temps dans des cafés et halls de réception d’hôtels où il est possible de discuter tranquillement mais à la vue de tous.

Un Juif ultra-orthodoxe et une femme discutent autour d’une table dans un parc public dans le centre de Jérusalem, le 31 janvier 2021. (Crédit : MENAHEM KAHANA / AFP)

Bancs publics

Avec la pandémie, qui a fait plus de 4 800 morts en Israël et montre de modestes signes de ralentissement malgré la campagne de vaccination massive, ces lieux se sont raréfiés au gré des mesures de confinement.

À Jérusalem, le long des rails de l’ancienne ligne ferroviaire reconvertie en promenade, et dans les jardins publics, les bancs sont envahis, par les journées d’hiver ensoleillées, de ces couples facilement reconnaissables : jeunes femmes en jupes et manches longues ; jeunes hommes portant une kippa, engagés dans de longues conversations murmurées à distance respectueuse l’un de l’autre.

Mais certains jours, il fait trop froid pour s’assoir sur les bancs publics, explique Naama Avidan, une Juive religieuse de 40 ans, mère de cinq enfants, qui accueille plusieurs fois par semaine des couples chez elle pour ces rendez-vous amoureux pudiques.

« Avec le corona, ils n’ont vraiment nulle part où aller. Il fait froid pour se promener dehors, surtout à Jérusalem », explique-t-elle, dans son modeste appartement en rez-de-chaussée.

Ce jour-là, un homme et une femme arrivent l’un après l’autre par une petite entrée permettant d’accéder, par l’arrière-cour, à une pièce adjacente à l’appartement.

Les jalousies de la porte vitrée les séparant du salon sont à-demi baissées. L’époux de Naama, Amiel, sert prestement du thé aux invités qui ont souhaité rester anonymes.

« Ils viennent malgré les difficultés liées aux restrictions de déplacement car le mariage ce n’est pas quelque chose que l’on peut trop retarder », souligne Amiel Avidan.

Selon les chiffres du ministère des Affaires religieuses, le nombre de mariages a baissé de plus de 10 % en 2020 dans le pays par rapport à l’année précédente.

Une situation particulièrement inquiétante pour les Juifs religieux, pour qui le mariage et la fondation d’une famille sont un impératif religieux.

« Il y a moins de mariages, moins de rencontres, tout tourne au ralenti. Je connais des couples qui repoussent sans arrêt leur mariage en fonction des confinements », explique Naama Avidan.

« Pourtant se marier est tellement important. Nous voulions essayer de faire ce que nous pouvions pour que les rencontres continuent », ajoute-t-elle.

Naama et son mari Amiel posent avec leurs enfants, à leur domicile à Jérusalem, un endroit où ils permettent aux Juifs ultra-orthodoxes d’utiliser une partie pour se fréquenter malgré le confinement, le 1er février 2021. (Crédit : MENAHEM KAHANA / AFP)

« Parcours du combattant »

Naama et Amiel accueillent gratuitement des inconnus chez eux. Selon la tradition juive, faire se rencontrer un homme et une femme qui se marient ensuite est une « mitzva », ou bonne action, qui contribue à s’assurer une place au paradis.

Même si l’application recensant les particuliers disposés à recevoir des couples chez eux est avant tout destinée aux Juifs orthodoxes, plus ouverts sur le monde moderne que les ultra-orthodoxes (haredim), Naama précise que quelques célibataires haredim l’ont contactée.

Comme le couple Avidan, 250 familles sont inscrites sur l’application, indique son concepteur, Tzuriel Gabizon.

Ce père de famille, orthodoxe, l’a lancée en juin dans le cadre d’un projet plus vaste, comprenant aussi des ateliers et visio-conférences pour aider les célibataires religieux à trouver l’âme sœur pendant l’épidémie.

« Je me suis marié il y a six ans après avoir rencontré 252 jeunes femmes », explique Tzuriel Gabizon, qui estime que « Dieu lui a imposé cette épreuve pour qu'(il) en tire des enseignements ». Et d’ajouter : « C’est ce parcours du combattant qui m’a poussé à monter mon projet, que j’ai baptisé ‘Projet 252’. »

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