Le Hamas, imperturbable, pendant les affrontements entre le Jihad et Israël
Si le groupe terroriste au pouvoir à Gaza a montré qu'il pouvait contrôler les autres factions, Israël ne l'a pas forcé à exercer son pouvoir lors des derniers combats
Pour la troisième fois depuis l’opération « Ceinture noire » en 2019, le Hamas est resté à l’écart lors d’un affrontement entre Israël et le Jihad islamique palestinien.
Si le groupe a partagé une « salle d’opérations conjointe » avec d’autres organisations et a fait une déclaration avec le Jihad islamique portant sur ce qu’il appelle « la résistance », le groupe terroriste au pouvoir à Gaza a semblé se contenter du rôle d’observateur, laissant l’organisation moins importante subir le plus gros des frappes israéliennes.
Le gouvernement de Netanyahu a tenté de dépeindre la non-intervention du groupe terroriste comme preuve de sa faiblesse. Un haut fonctionnaire israélien a déclaré samedi que le Hamas, qui a toujours tout dirigé dans la bande de Gaza, avait perdu le contrôle du Jihad islamique, beaucoup moins puissant.
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« Le dernier cycle de violences témoigne de la faiblesse du Hamas », a déclaré ce haut fonctionnaire.
Le Hamas, pourtant, semble satisfait de la situation. Il n’a guère souffert, alors que son principal rival dans la bande de Gaza a perdu dirigeants et armements.
« Sa position s’est améliorée après ce cycle », a déclaré Kobi Michael, chercheur principal à l’Institut d’études de sécurité nationale (INSS) et ancien chef du bureau palestinien au ministère des affaires stratégiques.
Le casse-tête du Hamas
Le Jihad islamique est un « casse-tête » pour le Hamas, affirme Michael. « C’est un rival. Le Jihad islamique représente un défi pour le Hamas. »
Les deux groupes ont des priorités très différentes qui sont souvent en conflit direct.
Le Jihad islamique est un groupe terroriste classique, dont la lutte contre Israël est la seule priorité significative. Il est également entièrement dépendant de l’Iran, qui souhaite ouvertement et continuellement que ses supplétifs mènent des attaques contre Israël.
Le Hamas, quant à lui, a intérêt à maintenir le calme dans la bande de Gaza. Il tente d’assurer une sorte de reprise économique après son combat de 2021 contre Israël, tout en renforçant ses capacités militaires en vue du prochain round.
Contrairement au Jihad islamique, le Hamas gouverne un territoire et a la responsabilité de plus de deux millions d’habitants ; il a donc beaucoup plus à perdre de combats prolongés avec Israël.
Son objectif à long terme est aussi de renforcer sa légitimité au sein de la société palestinienne et dans la région, et de remplacer le Fatah comme faction principale du mouvement nationaliste palestinien. Les tirs de roquettes sur Israël servent parfois cet objectif, mais de manière plus générale, les destructions et les bains de sang annuels dans la bande de Gaza mineraient plutôt ses efforts pour gagner en crédibilité.
Le Hamas est également moins sensible aux pressions iraniennes que le Jihad islamique.
Si les liens entre le groupe et Téhéran ont souffert de la répression exercée par la Syrie contre son propre peuple, répression condamnée par le Hamas alors que Damas accusait à son tour le Hamas de soutenir des groupes rebelles, ils ont été rétablis depuis lors. Mais cela ne signifie pas que l’Iran peut lui dicter ce qu’il doit faire. Le Hamas entretient des relations beaucoup plus riches et diversifiées avec les puissances étrangères que le Jihad islamique.
La Turquie refuse toujours d’expulser les responsables et les unités du groupe terroriste dans le pays, même après le récent rapprochement entre Ankara et Jérusalem. Le Qatar entretient des liens étroits avec le Hamas, notamment par le biais de son soutien financier à Gaza, et le groupe entretient également des relations croissantes avec la Russie et la Chine.
Le Hamas n’est pas non plus monolithe. Bien qu’une grande partie de ses dirigeants politiques étrangers – des hommes comme Ismail Haniyeh et Saleh al-Arouri – soient proches de l’Iran, son chef sur le terrain à Gaza, Yahya Sinwar, entretient des liens étroits avec le régime égyptien, qui cherche à instaurer le calme dans la bande de Gaza.
Un observateur satisfait
Pourquoi donc, compte tenu de son désir de calme et de légitimité, le Hamas a-t-il permis au Jihad islamique de lancer plusieurs jours de combat ?
« Le Hamas, s’il le souhaite, peut imposer l’ordre dans la bande de Gaza », explique Michael Milshtein, spécialiste des affaires palestiniennes au Moshe Dayan Center for Middle Eastern and African Studies. « Il a décidé d’observer la situation sans s’y mêler et est très à l’aise dans son rôle d’observateur. »
Kobi Michael, de l’INSS, convient que le fait de voir Israël et le Jihad islamique se tirer dessus pendant quelques jours a joué en faveur du Hamas.
« Il est plutôt content des coups portés par Israël au Jihad islamique », a-t-il déclaré, « parce que cela affaiblit le Jihad islamique et donne au Hamas plus de liberté d’action et de calme à l’intérieur de la bande de Gaza ».
Cela ne signifie pas que le Hamas n’a fait qu’offrir un soutien rhétorique. Il est tout à fait possible qu’il ait donné au Jihad islamique quelques roquettes et qu’il ait permis qu’elles soient lancées à partir de positions du Hamas.
Milshtein a déclaré qu’Israël aurait dû imposer des « conditions strictes » au Hamas plutôt que de le laisser échapper à la punition.
Depuis l’opération Gardien des murs en 2021, Israël et le Hamas ont trouvé un terrain d’entente. Israël autorise chaque jour des milliers de travailleurs de Gaza à entrer dans le pays – leur nombre est actuellement de 17 000 – ainsi que le versement depuis l’étranger des fonds destinés aux salaires du secteur public dans la bande de Gaza.
En échange, le Hamas garantit qu’aucun des groupes terroristes basés à Gaza ne tire de roquettes ou de missiles antichars sur Israël.
Bien que cela n’ait pas empêché le Jihad islamique d’attaquer Israël, les privilèges économiques du Hamas n’ont pas été abrogés et dimanche matin, quelques heures après l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu avec le Jihad islamique, l’armée israélienne a annoncé qu’elle rouvrirait les points de passage vers la bande de Gaza.
Israël, comme il l’a fait après chaque combat non concluant contre les terroristes basés à Gaza depuis 2009, peut prétendre que sa dissuasion a été renforcée, mais rien ne semble indiquer que le Hamas redoute davantage une réaction de la part d’Israël s’il venait à déroger à sa ligne de conduite à l’avenir.
« Nous n’agissons pas de manière intelligente », a déclaré Milshtein. « Nous devrions déclarer qu’à partir de maintenant, si vous autorisez les tirs de roquettes, si vous provoquez des troubles en Cisjordanie, il n’y aura plus de travailleurs, plus de salaires. Sinwar sait que nous ne sommes pas sérieux ».
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