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Le rabbin de Satmar visite en prison Nechemya Weberman, condamné pour abus sexuels

Les victimes d'abus sexuels ont le sentiment d'être trahies lorsqu'elles constatent que les dirigeants de la communauté hassidique et les médias soutiennent leurs "bourreaux"

Le rabbin de Satmar, Zalman Teitelbaum, en visite dans la ville de Safed, dans le nord d'Israël, le 21 novembre 2019. (Crédit : David Cohen/Flash90)
Le rabbin de Satmar, Zalman Teitelbaum, en visite dans la ville de Safed, dans le nord d'Israël, le 21 novembre 2019. (Crédit : David Cohen/Flash90)

JTA – Le « Grand Rebbe » de Satmar, Zalman Teitelbaum, a rendu visite à l’agresseur sexuel condamné, Nechemya Weberman, en prison le mois dernier, selon un journal en langue yiddish servant la communauté hassidique Satmar qui a publié une série d’articles en faveur de l’ancien thérapeute reconnu coupable d’avoir abusé sexuellement d’une adolescente dès ses 12 ans.

Cette visite, ainsi que la série d’articles publiés chaque semaine dans le Vochenshrift de Kiryas Joel, siège de la communauté Satmar de Zalman Teitelbaum dans le comté d’Orange, dans l’État de New York, ont mis en émoi les défenseurs des victimes d’abus sexuels dans la communauté hassidique. Ils affirment que les dirigeants de cette communauté ont l’habitude de minimiser les accusations d’abus et les condamnations, traumatisant ainsi davantage les victimes.

Une victime d’abus sexuels qui vit à Kiryas Joel, a déclaré à la New York Jewish Week que les victimes d’abus comme elle, ont l’impression d’être « poignardées » chaque fois qu’elles constatent le soutien apporté aux agresseurs reconnus coupables dans les médias hassidiques et parmi leurs dirigeants.

« C’est chaque fois un nouveau traumatisme pour les victimes », a déclaré la victime, qui a demandé à ne pas être nommée pour des raisons de confidentialité et de sécurité. « C’est être poignardé chaque semaine, encore et encore, et savoir que si jamais vous osez ouvrir la bouche, vous serez répudié. »

La femme a déclaré que d’autres victimes au sein de la communauté lui ont dit « qu’ils ne sont pas prêts à se manifester [de nouveau] parce qu’ils voient cela se répète chaque semaine ».

« C’est le plus horrible », a déclaré ce témoin. « Je ne cesse de revivre l’enfer que j’ai déjà traversé. Ils prennent un agresseur, qui a fait la pire des choses, et ils le promeuvent, et le qualifient de saint. »

Nechemya Weberman, second left, is lead to court Tuesday, January 22, 2013, in New York. (photo credit: AP Photo/Bebeto Matthews)
Nechemya Weberman a été reconnu coupable et condamné à 103 ans pour abus sexuel sur enfant, le 16 octobre 2012. (Crédit : AP Photo/Bebeto Matthews)

Le journal est distribué dans la communauté Satmar, dont Zalman Teitelbaum est un fidèle. Il a publié un article sur sa visite le 11 novembre.

Une série hebdomadaire favorable à Weberman va bon train depuis le mois d’août. Les articles sont des récits écrits à la suite de visites organisées dans la cellule de Weberman par des membres de la communauté, y compris d’éminents rabbins. Ils comprennent des lettres de Weberman et d’autres qui lui ont été adressées par des membres de la communauté.

« Ils disent qu’il est accusé à tort », a déclaré à la New York Jewish Week, Shulim Leifer, un membre de la communauté hassidique qui a lu les articles. « C’est écrit d’une façon qui ne peut conclure à un autre verdict, qu’il aurait subi un lynchage. »

Selon l’article relatant la visite de Teitelbaum, le rabbin a passé plus d’une heure avec Weberman et « lui a apporté des mots de réconfort et de foi en Dieu » alors que l’agresseur sexuel condamné était à Rikers Island en vue d’un appel, a précisé l’article. Weberman est maintenant emprisonné à Shawangunk, au nord de l’État de New York. « Grâce à Dieu, après de nombreuses démarches, nous avons réussi à l’emporter et à obtenir la visite du grand rabbin qui a pu entrer dans les murs de la prison », a indiqué l’article.

Les organisations juives unies de Williamsburg et de North Brooklyn, dont les dirigeants agissent en tant que porte-parole de Teitelbaum, ont décliné une demande de commentaire de la New York Jewish Week.

Les articles sont écrits par le rabbin Abraham Yehoshua Fraynd. Ni Fraynd ni le journal n’ont accepté de réponde à une demande de commentaire.

Weberman, un thérapeute non-agréé au service de la communauté Satmar, avait 54 ans lorsqu’il a été condamné en 2012 pour avoir abusé sexuellement d’une jeune fille pendant trois ans à partir de 2007. Il a été condamné à une peine de 103 ans de prison en 2013 – quasiment le maximum autorisé par la loi.

La victime a passé 15 heures à la barre des témoins pour raconter comment elle avait été violée à plusieurs reprises et forcée à avoir des relations sexuelles orales dans le bureau de Weberman, où elle avait été envoyée en raison de sa tenue jugée inconvenante et de son comportement rebelle.

De nombreux membres de la communauté Satmar ont soutenu Weberman, qui avait servi de chauffeur à feu le « Grand Rebbe » Moses Teitelbaum, père de Zalman Teitelbaum et de son frère Aaron, qui dirigent aujourd’hui des factions rivales du mouvement hassidique. Aaron Teitelbaum est allé jusqu’à suggérer que l’accusatrice de Weberman était une « zona« , terme en hébreu pour « prostituée ». La victime a affirmé qu’après s’être adressée au procureur de district, elle avait reçu des pots-de-vin et des menaces pour tenter de la convaincre de ne pas témoigner.

La communauté hassidique a longtemps découragé ses membres de s’adresser aux forces de l’ordre extérieures, une pratique décriée depuis longtemps par les défenseurs des victimes d’abus sexuels, entre autres crimes.

Dans un article publié le 6 décembre, Weberman avait déclaré que son procès en prison était « une messira », un acte par lequel un Juif dénonce un autre Juif, en violation de la loi juive orthodoxe.

« Oui, il est vrai qu’il y a eu un procès avec jury », a déclaré Weberman dans l’article. « Il est vrai que, tout naturellement, on peut s’attendre à obtenir une peine de prison dans un tel cas, mais j’ai été condamné à plus de 100 ans d’emprisonnement. Et ça, c’est quelque chose qui sort de l’ordinaire. »

Puis Weberman déplore qu’il n’ait aucun moyen de défendre sa cause alors qu’il est coincé derrière les barreaux.

« J’ai essayé de faire appel trois ou quatre fois, ce n’est pas normal », a déclaré Weberman. « Que suis-je censé croire ? Que je ne sortirai jamais d’ici ? Non, je m’y refuse. »

Dans un autre article, Weberman a déclaré « avoir accepté que Dieu [l’ait] mis dans cette situation pour des raisons [qu’il] ne peut pas comprendre ».

« Même si je suis accusé à tort, je pense qu’un jour, je sortirai », a déclaré Weberman.

Dans de nombreux articles, Weberman est appelé par de nombreux noms honorifiques, notamment « formidable Hassid » ou encore « shlita », un acronyme que l’on ajoute au prénom, réservé aux membres vénérés de la communauté.

Leifer a déclaré qu’il y a des victimes d’abus sexuels au sein de la communauté qui sont « hors d’eux et troublés par la façon dont cette personne est adulée et idolâtrée ».

« Les victimes d’abus sexuels se sentent blessées et trahies par ce comportement », a déclaré Leifer. « Il y a une sorte de théorie sous-jacente, très répandue dans la communauté ultra-orthodoxe, selon laquelle nous ne faisons pas du bon travail concernant les abus sexuels, en termes de dénonciation, de prévention ou d’aide aux victimes. »

Hasidic Jews in Williamsburg, Brooklyn. (Illustrative photo: CC BY rutlo, Flickr)
Illustration : Des Juifs hassidiques dans le quartier de Williamsburg, à Brooklyn. (Crédit : CC BY rutlo/Flickr)

Un membre de la communauté hassidique de Williamsburg, proche de la famille Weberman, a déclaré à la New York Jewish Week que « personne ne sait ce qui s’est vraiment passé derrière ces portes closes », en référence aux accusations d’abus sexuels.

« C’est dommage qu’il soit en prison depuis si longtemps », a déclaré le membre de la communauté.

La source a ajouté que Weberman, 64 ans, est maintenant « un vieil homme brisé, dont la famille souffre ».

« La communauté a eu le sentiment qu’il n’a pas eu un procès équitable », a déclaré la source. « Si c’est vraiment arrivé, il n’est aujourd’hui plus une menace, c’est certain ».

La source a également déclaré que, selon la famille de Weberman, le condamné vit maintenu dans des conditions « inhumaines ». « Il n’y a pas d’air conditionné, pas de chauffage, pas de télévision, c’est glacial », a déclaré la source. « Je ne vois pas pourquoi nous ne sommes pas autorisés à accorder le droit de parole à quelqu’un qui est traité de manière aussi inhumaine. »

David N. Myers, co-auteur d’American Shtetl, un livre paru en 2022 sur la communauté hassidique de Kiryas Joel, a déclaré à la New York Jewish Week que Teitelbaum pourrait avoir rendu visite à Weberman en prison en raison du principe rabbinique de « pidyon shevuyim », la « libération des captifs ».

« Les Juifs haredim prennent ce principe au sérieux », écrit dans un courriel Myers, qui est professeur d’histoire à l’université de Californie, à Los Angeles. « Il y a une forte éthique qui consiste à fournir de l’aide et à demander la libération de camarades juifs pratiquants qui sont incarcérés – souvent sur la présomption qu’en tant que bons Juifs, ils ont sûrement été traités injustement ou emprisonnés sous de faux prétextes. »

Myers a ajouté que les Juifs ultra-orthodoxes ont de plus en plus le sentiment d’être accablés par les médias et les autorités laïques. Il a noté la colère de la communauté à la suite d’une enquête du New York Times en septembre, qui a révélé que les écoles hassidiques ne respectent pas les normes de l’État de New York en matière d’enseignement laïc.

« De nombreux haredim de la région de New York se sentent accablés », a déclaré Myers. « Il est certain que l’affaire Weberman précède cette nouvelle vague. Il a toujours eu des partisans, ainsi que de nombreux accusateurs et critiques. Mais à présent, les haredim se sentent plus libres de dire que les médias sont clairement subjectifs. »

En août 2021, le procureur de Brooklyn, Eric Gonzalez, avait écrit au gouverneur de l’époque, Andrew Cuomo, pour lui demander de commuer la peine de Weberman. À ce moment-là, la peine de Weberman avait été réduite de moitié en vertu d’une loi de l’État qui exige un maximum de 50 ans pour le type de crimes pour lesquels il avait été condamné. Gonzalez a longtemps cherché à obtenir la clémence pour les personnes condamnées à de longues peines de prison, mais les militants locaux ont déclaré que sa demande aurait, en réalité, été à des fins politiques.

Cuomo, qui a démissionné en août 2021 à la suite d’un scandale de harcèlement sexuel, n’a pas répondu à la demande de Gonzalez.

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