Israël en guerre - Jour 435

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Les embryologistes inondés de demandes de prélèvement de sperme posthumes

Les épouses et parents de jeunes hommes tués depuis samedi souhaitent conserver la trace de leurs proches ; pour certains, il est déjà trop tard

Un scientifique prend un flacon contenant des échantillons congelés de sperme de donneur dans un laboratoire de Melbourne, en Australie, le 15 mai 2018. Illustration (Crédit : Wong Maye-E/AP)
Un scientifique prend un flacon contenant des échantillons congelés de sperme de donneur dans un laboratoire de Melbourne, en Australie, le 15 mai 2018. Illustration (Crédit : Wong Maye-E/AP)

Alors que l’ampleur de la tragédie de l’assaut du Hamas de samedi se précise, avec des centaines de jeunes hommes – soldats et civils – parmi les victimes, les embryologistes et les spécialistes de la fécondation in vitro (FIV) signalent qu’ils ont été appelés à procéder à des prélèvements de sperme à titre posthume (PSR) à une échelle sans précédent.

Les proches des victimes souhaitent que le sperme de ceux-ci soit prélevé et congelé dans l’espoir de pouvoir concevoir un enfant dans le futur et de perpétuer ainsi leur patrimoine génétique.

Tout prélèvement de sperme, effectué de préférence dans les 24 heures suivant le décès, est soumis à une ordonnance du juge aux affaires familiales si la victime était célibataire. Dans le cas d’un homme marié, l’épouse peut demander le prélèvement de sperme et signer les documents nécessaires.

En général, les spécialistes de la FIV prélèvent des échantillons de sperme sur des hommes en bonne santé pour les aider à concevoir un enfant avec leur partenaire, ou sur des hommes malades qui souhaitent congeler leur sperme avant de subir un traitement médical.

Dans une interview accordée à une publication en ligne destinée à la communauté médicale israélienne, le Dr Yael Harir, embryologiste à l’hôpital Kaplan de Rehovot, a déclaré qu’elle effectuait normalement deux, voire trois, procédures de PSR par an. Elle a refusé de donner le nombre exact de procédures effectuées à Kaplan ces derniers jours, mais elle a indiqué qu’il était considérable.

« C’est difficile, physiquement et émotionnellement, pour le personnel d’effectuer cette procédure sur des cadavres », a-t-elle déclaré.

Harir a indiqué que des collègues d’autres hôpitaux l’avaient contactée pour lui demander des conseils sur la manière de procéder.

« Il n’existe pas de protocole pour la conservation du sperme à cette échelle. Nous avons dû trouver une solution pour faire face à la situation et évaluer l’équipement dont nous disposions pour effectuer autant de procédures en même temps », a-t-elle déclaré.

Mais pour beaucoup, il était trop tard.

La réalisatrice Shaylee Atary espérait que le sperme de son mari Yahav Winner, assassiné par des terroristes du Hamas lorsqu’ils ont envahi Kfar Azza samedi matin, pourrait être prélevé. Mais la dépouille de Winner n’a pas été retrouvée ou identifiée assez rapidement pour que du sperme viable puisse être prélevé.

Shaylee Atary et son défunt mari Yahav Winner sur une photo non datée (Crédit : Go2Films)

S’adressant à la presse israélienne, Shaylee Atary a imputé ce retard à la bureaucratie et au fait que le système d’identification des corps était complètement débordé. Elle affirme qu’on lui a même demandé de payer 1 500 dollars pour la procédure posthume de son mari, qui était également cinéaste.

Lorsque le sperme de Winner a finalement été récupéré, il s’est avéré que son corps avait été laissé exposé à la chaleur pendant si longtemps qu’il était devenu inutilisable.

« L’État a abandonné le corps de mon mari », a déploré Atary.

C’est un coup dur pour Atary, qui a récemment donné naissance à une fille. Elle et son mari souhaitaient d’avoir d’autres enfants.

« Le rêve de mon Yahav était d’avoir une famille nombreuse, heureuse et rieuse, jouant sur les pelouses de notre Kfar Azza magique. Je ne pourrai pas réaliser ce rêve », a-t-elle déclaré.

Asher et Irit Shahar, avec leur fils Omri, avant la mort d’Omri en juin 2012. (Crédit : autorisation)

Le premier cas qui a été porté à la connaissance du public est celui d’Irit et Asher Shahar, dont le fils Omri, capitaine de la marine israélienne en service actif, est mort dans un accident de voiture en juin 2012, à l’âge de 25 ans.

Les parents Shahar ont aussitôt décidé de faire prélever le sperme d’Omri. Un tribunal des affaires familiales a approuvé la procédure, qui est légale en Israël depuis 2003 pour une insémination ultérieure ou pour une FIV chez la partenaire survivante.

Les Shahar voulaient utiliser le sperme de leur fils pour concevoir un enfant et l’élever comme un petit-enfant, bien qu’ils aient tous deux atteint la cinquantaine. Ils prévoyaient d’acheter un ovule et de faire appel à une mère porteuse.

Dans une décision capitale rendue en septembre 2016, le tribunal des affaires familiales de Petah Tikvah a autorisé le couple à poursuivre son projet. L’État a toutefois fait appel de la décision au motif que les Shahar souhaitaient être à la fois les grands-parents et les parents de la progéniture d’Omri, ce qui est inhabituel. Le tribunal a alors émis une injonction empêchant Irit et Asher d’accéder aux gamètes conservés d’Omer et de les utiliser.

Les Shahar ont subi un ultime revers en janvier 2017, lorsque l’État a gagné son appel devant le tribunal de district de Lod.

Il existe toutefois certains cas, depuis 2007, où les parents de soldats morts au combat ont été autorisés à donner le sperme de leur fils à une femme désireuse de devenir mère, soit par insémination, soit par gestation pour autrui (GPA). Dans ces cas, les femmes élèvent les enfants issus des dons de sperme.

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