Les ex-chefs de l’armée de l’air à Netanyahu : « Stop, trouvez une solution »
Les anciens généraux se disent "profondément inquiets" par les refus de servir dus au remaniement judiciaire prévu ; 300 réservistes du Corps blindé se joignent aux protestations
Emanuel Fabian est le correspondant militaire du Times of Israël.
Tous les anciens chefs de l’armée de l’air israélienne (IAF) encore en vie ont envoyé lundi une lettre au Premier ministre Benjamin Netanyahu et au ministre de la Défense Yoav Gallant, dans laquelle ils expriment leur inquiétude face aux efforts continus du gouvernement pour limiter considérablement les pouvoirs du système judiciaire, malgré les protestations des pilotes et du personnel navigant.
« Nous suivons avec une profonde inquiétude la situation qui prévaut ces jours-ci dans l’État d’Israël et au sein de l’armée de l’air », ont écrit les anciens chefs de l’IAF.
« N’étant que trop conscients du caractère central et l’importance de l’armée [de l’air] en particulier en matière de sécurité nationale, dont vous avez parfaitement conscience vous-même, nous craignons les conséquences de ces processus et les dangers graves et tangibles qu’ils représentent pour la sécurité nationale de l’État d’Israël », indique la lettre.
La quasi-totalité des réservistes d’un escadron d’avions de chasse de l’armée israélienne ont annoncé dimanche, qu’ils ne se présenteraient pas à un entraînement prévu plus tard dans la semaine en guise de protestation contre la refonte, ce qui a suscité des avertissements de la part du chef d’état-major de l’armée israélienne, Herzi Halevi, et de Gallant, indiquant que de telles protestations risquaient de nuire aux capacités opérationnelles de l’armée.
C’était là la manifestation la plus récente et la plus médiatisée d’un nombre croissant d’unités de Tsahal, y compris des unités d’élite, qui menaçaient de ne pas se présenter, sur fond d’opposition généralisée aux plans du gouvernement qui, selon les critiques, porteront atteinte à la démocratie, à l’économie et à la sécurité du pays.
« Le fondement même de la force de l’armée [de l’air] est la cohésion particulière de son personnel militaire, permanent et de réserve. Les effectifs sont tous motivés par un sens profond de la mission et par la conviction de la justesse de notre cause », ont déclaré les anciens chefs.
« Nous soutenons le commandant de l’armée de l’air et son personnel en cette période difficile et nous vous demandons d’arrêter et de trouver une solution à la situation émergente le plus rapidement possible », ajoute la lettre.
La lettre a été signée par le major-général (réserviste) Dan Tolkowsky, le major-général (réserviste) David Ivry, le major-général (réserviste) Avihu Ben-Nun, le major-général (réserviste) Herzl Bodinger, le major-général (réserviste) Eitan Ben Eliyahu, le lieutenant-général (réserviste) Dan Halutz, le major-général (réserviste) Eliezer Shkedi, le major-général (réserviste) Ido Nehoshtan, le major-général (réserviste) Amir Eshel et le major-général (réserviste) Amikam Norkin.
Des dizaines de pilotes de haut rang ont tenu vendredi une réunion sans précédent avec l’actuel chef de l’armée de l’air, Tomer Bar, au cours de laquelle ils ont fait part de leurs grandes inquiétudes cncernant la poursuite de leur service dans les réserves.
Les pilotes réservistes qui continuent à effectuer un service actif auraient exprimé leur crainte que la ligne dure du nouveau gouvernement ne les expose à des poursuites de la part d’organismes mondiaux tels que la Cour pénale internationale (CPI).
Israël s’est longtemps opposé à de telles enquêtes, soulignant la force et l’indépendance de son propre système judiciaire, qui est chargé d’enquêter sur les incidents liés à des actes répréhensibles commis par l’armée israélienne. Les critiques de la réforme judiciaire du gouvernement ont toutefois averti que les efforts visant à restreindre le pouvoir de la Haute Cour de justice priveraient le pays de sa légitimité sur la scène internationale.
Plus tard dans la journée de vendredi, une lettre adressée par Bar à tous les réservistes de l’armée de l’air, dans laquelle il indique qu’il compte sur eux pour continuer à remplir leur devoir, a fait l’objet d’une fuite dans la presse. Il y précise que Tsahal et l’armée de l’air continueraient à opérer « selon les normes morales et selon les valeurs et l’esprit de Tsahal, sans aucun changement ».
Lundi, quelque 300 réservistes du Corps d’artillerie, dont plusieurs officiers supérieurs, ont adressé une lettre à Gallant et Halevi, indiquant qu’ils se joignaient aux appels pour s’opposer à la refonte judiciaire.
« Ce coup d’État aura pour conséquence qu’Israël cessera d’être un État démocratique répondant aux principes énoncés dans la Déclaration d’indépendance et cessera d’être l’État pour lequel nous nous sommes battus », peut-on lire dans la lettre.
Dans un communiqué vendredi, Tsahal a déclaré qu’elle « procédait à une évaluation continue de la situation et à un débat au sein du commandement au vu des récents événements ».
Le général Halevi a donné l’ordre aux membres du Forum de l’état-major général de tenir un dialogue de commandement, chaque commandant avec sa propre unité. Il a souligné qu’il est conscient du discours public et de la controverse mais qu’il ne tolérera pas que la capacité de Tsahal à mener à bien ses opérations et à maintenir la sécurité de l’Etat soit compromise.