Les institutions juives condamnent l’union des gauches avec La France insoumise
Raphaël Glucksmann a toutefois promis ce mardi qu' « il n’y a pas et n’y aura pas d’accord avec LFI » après avoir signé un communiqué promouvant un front populaire
Passé le choc de l’annonce spectaculaire de la dissolution de l’Assemblée nationale française, l’heure politique est désormais aux tractations et le temps presse à moins de trois semaines du premier tour des nouvelles élections législatives.
Terrifiés à l’idée d’une prise de pouvoir du Rassemblement national le 7 juillet prochain, et aussi à l’idée de perdre leurs sièges de députés, les mouvements de gauche ont annoncé décider de se présenter unis derrière un nouveau « Front populaire » au prochain scrutin. Lundi soir, à 22h30, devant le siège d’Europe Écologie-Les Verts, à Paris, les quatre leaders des forces de gauche présentes au Palais Bourbon – l’écologiste Marine Tondelier, le socialiste Olivier Faure, le communiste Fabien Roussel et l’insoumis Manuel Bompard – ont en effet présenté à la presse l’idée de candidatures uniques dès le premier tour des législatives.
Raphaël Glucksmann, tête de liste du Parti socialiste et de Place publique pour les élections européennes, a cependant nuancé ce mardi, expliquant qu’ « il n’y a pas et n’y aura pas d’accord avec LFI ». Son entourage a ainsi annoncé son intention de quitter les discussions sur la constitution d’un « Front populaire » dès ce mardi matin s’il y avait un alignement total sur les positions de la France insoumise. « Place publique a signé un texte comme quoi la totalité des partis de gauche ferait le maximum pour lutter contre l’extrême droite. Mais ce n’est pas aux dépens de nos principes fondamentaux », a affirmé l’entourage de l’eurodéputé Place publique, qui a ensuite expliqué sur X mardi matin que « l’union ne peut pas se faire au prix du renoncement aux principes et nous avons posé des points clairs ».
À l’issue des résultats des élections européennes dimanche soir, plusieurs centaines de personnes s’étaient réunies place de la République, à Paris, pour exhorter la gauche à s’unir. Certaines personnes dans la foule ont hurlé « Israël assassin, [Raphaël] Glucksmann complice », brandissant le drapeau palestinien. Raphaël Glucksmann, harcelé par l’extrême gauche depuis des mois, appelle sans arrêt à un cessez-le-feu à Gaza et à la création d’un État palestinien et critique également le gouvernement de Benjamin Netanyahu.
1. Nous avons posé un cap clair et nous nous y tiendrons.
Face au RN aux portes du pouvoir, il est irresponsable de refuser de discuter du rassemblement.
Mais l’union ne peut pas se faire au prix du renoncement aux principes et nous avons posé des points clairs.
— Raphael Glucksmann (@rglucks1) June 11, 2024
Si l’annonce initiale d’union, comme promis lundi soir, a été accueillie avec enthousiasme par de nombreux militants de gauche qui réclamaient cette alliance, elle a été reçue avec beaucoup d’inquiétude par ceux de la gauche républicaine opposés à la France insoumise.
La nouvelle a aussi été globalement très froidement accueillie par la communauté juive française, échaudée par les multiples outrances et provocations de La France insoumise depuis les attentats du Hamas le 7 octobre en Israël. Les institutions juives ont ainsi très rapidement et très vigoureusement condamné cette idée de liste commune.
Sur son compte X, Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France, a qualifié cet accord d’infâme. « L’antisémitisme n’est visiblement pas une question suffisamment importante pour renoncer à une alliance électorale et à quelques sièges… Ceux qui accepteront de candidater sous ses couleurs en porteront la responsabilité devant l’Histoire », a asséné le président du Crif.
Ce n'est pas le Front Populaire, c'est la NUPES bis !
L'antisémitisme n'est visiblement pas une question suffisamment importante pour renoncer à une alliance électorale et à quelques sièges…
Ceux qui accepteront de candidater sous ses couleurs en porteront la responsabilité… pic.twitter.com/1h4vr7Kix2
— Yonathan Arfi (@Yonathan_Arfi) June 10, 2024
Ariel Goldmann, président du Fonds social juif unifié, s’en est pris lui nommément à Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste, et a dénoncé un « plat de lentilles » dans une alliance avec un « parti pro-Hamas ».
Quelle indignité !
Le plat de lentilles du @partisocialiste de @faureolivier c’est une alliance avec un parti pro #Hamas.
En fait de #FrontPopulaire c’est plutôt le #FrontPopulaire de Libération de la Palestine ! https://t.co/vbtgp5T6Ad— Ariel Goldmann (@GOLDMANNAriel) June 10, 2024
De son côté, l’Union des étudiants juifs de France a fait un parallèle avec 1936 et le Front populaire dirigé par Léon Blum : « Front populaire, 1936 : alliance républicaine contre l’antisémitisme. Front populaire, 2024 : alliance honteuse avec l’antisémitisme. »
Front Populaire, 1936 : alliance républicaine contre l’antisémitisme.
Front Populaire, 2024 : alliance honteuse avec l’antisémitisme. pic.twitter.com/KM0GgRVQie
— UEJF (@uejf) June 10, 2024
La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, a fait référence, elle aussi, à l’alliance des gauches de l’avant-guerre et à l’ancien président du Conseil pour dénoncer cet accord : « Oublieux de sa propre histoire, de sa culture politique et de ses combats humanistes, le Parti socialiste s’allie avec LFI, qui honnit ses valeurs et son héritage. Cela méritait bien un pied de nez à l’Histoire, au ‘Front populaire’, le vrai, et à son leader, le ‘Juif Blum’. »
Oublieux de sa propre histoire, de sa culture politique et de ses combats humanistes, le @partisocialiste s'allie avec #LFI, qui honnit ses valeurs et son héritage.
Cela méritait bien un pied de nez à l'Histoire, au « Front populaire », le vrai, et à son leader, le « juif Blum… https://t.co/FARhxvppWu— Licra (@_LICRA_) June 10, 2024
Pour Nous Vivrons, collectif de lutte contre l’antisémitisme créé après les attentats du 7 octobre, « la lutte contre le RN ne justifie aucune alliance avec des antisémites ».
Cette accord est une honte.
La lutte contre le RN ne justifie aucune alliance avec des antisémites.
Le racisme et l’antisémitisme ne sont pas un projet de société.#stopantisemitisme #NiFachoNiFacho #30juin https://t.co/v1zuu4zS2Z— Collectif Nous Vivrons #???? (@nous_vivrons) June 10, 2024
Début juin, Le Point a révélé, dans une grande enquête réalisée par l’Ifop pour l’American Jewish Committee, que 92 % des Français juifs considéraient que LFI avait fait monter l’antisémitisme, loin devant toutes les autres formations politiques.