Israël en guerre - Jour 366

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Reportage

Les propos de Biden sur Israël et les Juifs salués par des personnalités sionistes

Pour Foxman, Sharansky et Dayan, cette affirmation - une première pour un président américain - montre qu'il comprend ce que ressentent bon nombre de Juifs

Le président américain Joe Biden serrant la main du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors de leur rencontre en marge de la 78e Assemblée générale des Nations unies, à New York, le 20 septembre 2023. (Crédit : AP Photo/ Susan Walsh)
Le président américain Joe Biden serrant la main du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors de leur rencontre en marge de la 78e Assemblée générale des Nations unies, à New York, le 20 septembre 2023. (Crédit : AP Photo/ Susan Walsh)

Mercredi, le président américain Joe Biden a fait une remarque que peu de gens s’attendaient à entendre de la part du dirigeant d’un pays où vit près de la moitié de la population juive mondiale.

« Sans Israël, aucun Juif dans ce monde n’est en sécurité », a dit le président américain au début de son entretien avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu.

« Car même si nous avons des divergences, mon engagement envers Israël, comme vous le savez, est inébranlable. Je pense que sans Israël, aucun Juif dans ce monde n’est en sécurité. Israël est essentiel », a déclaré Biden à Netanyahu en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, lors de leur première rencontre depuis que Netanyahu a repris ses fonctions de Premier ministre en janvier. La réunion était axée sur la géopolitique, et non sur la sécurité des Juifs.

Lorsqu’ils parlaient d’Israël, les précédents présidents américains, Biden compris, soulignaient l’engagement des États-Unis en faveur de la sécurité d’Israël, en citant des valeurs communes et l’importance de l’État juif en tant qu’allié géopolitique. Mais aucun n’avait mis en évidence la relation entre la sécurité d’Israël et la sécurité des Juifs à l’étranger et, par voie de conséquence, à celle des Juifs aux États-Unis, selon l’ancien directeur de l’Anti-Defamation League (ADL), Abraham Foxman.

Cette remarque peut donner une idée de la façon dont Biden, qui rappelle souvent à ses auditeurs qu’il a rencontré tous les Premiers ministres israéliens depuis Golda Meïr, pense de l’État juif. Mais elle touche également à l’une des questions les plus sensibles pour les communautés juives en dehors d’Israël : l’engagement de leurs propres gouvernements à répondre à leurs besoins en matière de sécurité et de religion, indépendamment d’Israël.

« Je pense qu’il est absolument magnifique qu’il comprenne et exprime ce que beaucoup d’entre nous ressentent et croient », a déclaré Foxman, en faisant référence aux Juifs sionistes. « C’est la chose la plus sioniste que j’aie jamais entendue de la part d’un président américain. »

Abraham Foxman, directeur national émérite de l’Anti-Defamation League, s’exprimant lors du 8e sommet annuel de l’Israeli American Council à Austin, au Texas, le 20 janvier 2023. (Crédit : David Finkel)

D’habitude, a ajouté Foxman, « c’est ce que disent les dirigeants israéliens, et lorsqu’ils le disent, cela met certains Juifs américains mal à l’aise ».

La remarque de Biden a rapidement soulevé l’ire de Juifs plus critiques à l’égard d’Israël.

« Quand on sait que ce sont les principes de la suprématie de la race blanche que Biden a promus tout au long de sa carrière qui maintiennent les Juifs dans une position perpétuelle de « l’autre », ce commentaire est une menace de mort anti-philosémite », a écrit sur X – anciennement Twitter – Em Cohen, un blogueur anti-Israël de New York qui a qualifié Israël de « colonie sioniste juive ».

Antony Loewenstein, un journaliste juif australo-allemand qui a accusé Israël « d’exporter la technologie de l’occupation », a écrit sur X à propos de la remarque de Biden. « Cette déclaration est tout simplement fausse, car Israël et son occupation sans fin de la Palestine ont indéniablement accru l’insécurité des Juifs dans le monde entier. »

La remarque de Biden a également fait sourciller Ben Friedman, directeur politique de Defense Priorities, un groupe de réflexion américain sur la politique étrangère basé à Washington. « Biden laisserait-il entendre que les États-Unis ne sont pas en mesure d’assurer la sécurité des Juifs ? », s’est interrogé Friedman sur X.

À LIRE : Texte intégral de l’entretien public entre Joe Biden et Benjamin Netanyahu

L’affirmation ne semble toutefois pas avoir été interprétée par les Juifs américains comme un transfert de la responsabilité de la sécurité des Juifs américains des États-Unis vers Israël.

Interrogé sur cet aspect potentiel de la remarque de Biden, Foxman a rejeté d’emblée l’idée que le président se débarrasse de la responsabilité de la sécurité des Juifs américains et a attribué toute crainte en matière de sécurité aux actions de l’ancien président Donald Trump.

Natan Sharansky s’exprimant lors d’une conférence de l’Agence juive, à l’hôtel Orient, à Jérusalem, le 24 juin 2018. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

« Non, ce n’est pas ce que nous voulions dire », a déclaré Foxman à propos de la remarque de Biden. « Notre vision est que l’Amérique est un endroit sûr pour beaucoup de gens. Mais n’oubliez pas non plus qu’après Trump, l’Amérique a fermé ses frontières », a ajouté Foxman.

Natan Sharansky, ancien directeur de l’Agence juive, avait une explication sur la raison pour laquelle la remarque de Biden n’a pas été largement perçue comme une mise à l’écart des Juifs américains.

« L’affirmation de Biden, qui a été faite ‘entre-deux et non dans un discours, prend tout son sens si l’on ajoute une notion, celle du ‘ressenti' », a déclaré Sharansky.

« Je pense que Biden voulait dire qu’aucun Juif dans le monde ne peut se sentir en sécurité sans Israël, ce qui reflète ce que la majorité du monde juif, à mon avis, ressent à l’égard d’Israël. C’est un refuge. Mais c’est aussi le centre d’une identité – et, pour les religieux, l’accomplissement d’un engagement divin. C’est une très bonne chose que nous ayons un président américain qui le comprenne », a déclaré Sharansky.

Dans un premier temps, Sharansky a eu du mal à croire que Biden avait réellement dit cela.

« Je n’ai pas regardé l’échange [en direct], j’ai seulement lu la transcription et j’ai d’abord pensé qu’il avait du y avoir une confusion – que c’était Netanyahu qui avait dit cela. Les dirigeants israéliens disent cela tout le temps. J’avais [moi-même] l’habitude de le dire. Mais là, nous l’entendons de la bouche d’un président américain », a déclaré Sharansky.

Pourtant, les remarques de Biden, a déclaré Sharansky, ne correspondent pas aux tentatives de son administration de négocier un accord avec l’Iran qui permettrait à ce pays de disposer de certaines capacités nucléaires.

« La politique iranienne de Biden est incompatible avec celle d’une personne qui souhaite la sécurité des Juifs et qui pense qu’Israël la garantit », a déclaré Sharansky. Mais, a-t-il ajouté, « il y a beaucoup de sionistes libéraux engagés et convaincus qui veulent croire qu’un accord peut être conclu ».

Le président américain Barack Obama, accompagné du secrétaire d’État John Kerry, rencontrant des anciens combattants et leurs familles pour évoquer l’accord sur le nucléaire iranien, dans la salle Roosevelt de la Maison Blanche, à Washington, le 10 septembre 2015. (Crédit : Andrew Harnik/AP Photo)

« Il y a un clivage très net sur cette question. »

Les partisans de la reprise de l’accord nucléaire conclu avec l’Iran sous l’égide des États-Unis (connu sous l’acronyme JCPOA), que l’ancien président Barack Obama avait finalisé mais dont son successeur Trump s’était retiré, affirment qu’il bloque la voie de l’Iran vers les armes nucléaires parce qu’il oblige la République islamique à abandonner ce projet en échange d’un allègement des sanctions et d’échanges commerciaux.

Les détracteurs de l’accord, limité à une période de 10 ans, affirment qu’il légitime un futur nucléaire iranien après l’expiration de l’accord et qu’il ignore le soutien de l’Iran au terrorisme international et ses menaces d’anéantissement d’Israël.

Dani Dayan, président du Mémorial de Yad Vashem, le musée d’État israélien consacré à la Shoah, a déclaré que la remarque de Biden reflétait un sentiment partagé par l’ensemble du monde juif ainsi que par les amis non-juifs d’Israël.

Dani Dayan, dans la salle des Noms, à Yad Vashem. (Crédit : Alex Kolomoisky)

« Israël est la garantie que tant que nous existerons en tant qu’État juif indépendant, il n’y aura plus de Saint-Louis – le bateau qui avait quitté l’Allemagne en 1938 rempli de réfugiés Juifs fuyant l’Allemagne nazie et qui s’était vu refuser l’entrée par les Américains – dans les océans de ce monde et avec l’aide de Dieu, il aura un refuge sûr où accoster – l’État d’Israël », a déclaré Dayan, ancien consul général d’Israël à New York.

Rafael Medoff, directeur de l’Institut David S. Wyman pour les études sur la Shoah à Washington, a déclaré que la remarque de Biden n’était que l’expression du bon sens.

« Le président Biden n’a fait que répéter l’évidence qu’il est bon qu’il y ait un Israël vers lequel les Juifs persécutés peuvent se réfugier. Nous savons tous ce qui s’est passé dans les années 1930 et 1940 lorsqu’il n’y avait pas d’État juif. Reconnaître cela ne fait pas de nous des sionistes ; il s’agit simplement de reconnaître la réalité », a déclaré Medoff.

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