Les réactions de députés français après la diffusion du film des massacres du Hamas
Au bout de quelques minutes de diffusion, une députée LR a quitté la salle en pleurs ; d’autres ont tourné régulièrement la tête

Une centaine de députés ont visionné ce mardi après-midi dans une pièce reculée de l’Assemblée nationale, à Paris, à huis-clos, sans téléphones ni collaborateurs, le film des massacres du 7 octobre en Israël, projeté dans différents endroits du monde par les autorités israéliennes afin de montrer les crimes de ce jour noir. Cette diffusion parisienne a été organisée à l’initiative du député Renaissance Mathieu Lefèvre, président du groupe d’amitié France-Israël.
Il s’agit d’un film d’environ 45 minutes, réalisé à partir d’extraits des caméras corporelles et téléphones de terroristes du Hamas, tués ou faits prisonniers, et d’images captées par des victimes, des secouristes et des caméras de surveillance. Il montre, sans filtre, des images des tueries et des cadavres suppliciés d’adultes et d’enfants.
« Il est important de pouvoir continuer à témoigner, l’actualité à l’époque actuelle est souvent malheureusement assez vite balayée et il faut pouvoir continuer à témoigner de l’indicible, rien ne serait pire que l’oubli », avait plaidé M. Lefèvre avant la diffusion.
Au bout de quelques minutes de diffusion à l’Assemblée, une députée LR a quitté la salle en pleurs. Régulièrement, certains ont tourné la tête pour ne pas voir l’horreur des crimes. À la sortie, beaucoup sont partis directement, l’air dégouté.
Si la diffusion était réservée au groupe d’amitié France-Israël, quelques élus, non-membres de ce groupe, y ont également participé.
Parmi eux : le député LFI David Guiraud, accusé d’avoir minimisé les crimes du 7 octobre lors d’une conférence à Tunis en expliquant – à tort – qu’Israël avait commis des actes de barbarie comparables. « Malgré la peine qui me secoue, permettez moi de respecter tous les morts », a-t-il réagi suite à la diffusion. « Je suis venu partager un moment de peine, de douleur, de deuil avec des collègues meurtris par les crimes de guerre du Hamas », a-t-il dit. « J’ai donné l’impression de traiter tout ça avec légèreté. Je suis venu m’assurer que je ne referai pas cette erreur. J’oublierai jamais de respecter tous les meurtres. »

À l’issue de la séance, le député socialiste David Habib a expliqué qu’il avait insulté le député LFI de « chien » suite à ses propos précédents.
« On était content qu’il le mette face à ses propos, tout le monde a acquiescé », a déclaré à la presse un député macroniste.
« Tu es un chien ! » a lancé le député ex- @partisocialiste @DavidDhabib au député @FranceInsoumise @GuiraudInd dans la salle de l’ @AssembleeNat où ils assistaient à la projection du film sur les massacres terroristes du #Hamas du #7Octobre pic.twitter.com/DQpUX9OtBB
— Haziza Frédéric (@frhaz) November 14, 2023
Aymeric Caron (LFI), fervent militant pro-palestinien, était aussi présent. Il s’est dit « bouleversé, écœuré, dégoûté ». « Je ne sais pas si c’était nécessaire de voir ça, ni si nous avons appris quelque chose. Ce qu’on a vu pendant 45 minutes, c’est l’horreur mais on le savait déjà », a-t-il ajouté, avant de se faire insulter de « connard » dans son dos, dans une ambiance très tendue autour des députés LFI. Il a aussi demandé la diffusion d’un film équivalent sur les morts à Gaza.
???? "On est bouleversé, écœuré, dégoûté"
➡ Aymeric Caron (REV-LFI-NUPES) réagit sur BFMTV après le visionnage des images des attaques du Hamas en Israël à l'Assemblée nationale pic.twitter.com/O7BO72rwLA
— BFMTV (@BFMTV) November 14, 2023
« Objectivement, les images sont insoutenables. On peut s’en faire une idée avant, mais tant qu’on n’a pas vu ça… On a le cœur lourd », a déclaré Mathieu Lefèvre, décrivant les faits relatés dans ce film d’une quarantaine de minutes comme « une atteinte à l’humanité toute entière ». « Je crois que ceux qui ont vu cette vidéo ne pourront plus, pendant un long moment, dormir en paix. »
Le patron des Républicains, Éric Ciotti, a dit avoir « dû détourner le regard » face à l’horreur de certains passages.
En larmes à la sortie de la projection, le député Meyer Habib (apparenté LR), dont la circonscription des Français de l’étranger recouvre Israël, peinait à reprendre son souffle.
La députée LR Émilie Bonnivard, très émue, a elle estimé que les images ressemblaient à celles de la Shoah.
« Ce qui était choquant, c’était surtout la joie qu’avaient ces terroristes de tuer », a déclaré son collègue LR Michel Herbillon.
« Ce qui est d’autant plus choquant, c’est la joie abjecte de ces terroristes qui ressort des images du massacre », a lui aussi dit Julien Odoul, député et porte-parole du Rassemblement national.
????️"Ce qui est d'autant plus choquant, c'est la joie abjecte de ces terroristes qui ressort des images du massacre."
Julien Odoul, député et porte-parole du RN, sur le film qui documente l'attaque du 7 octobre diffusé à l'Assemblée nationale cet après-midi.
????#franceinfo #canal27 pic.twitter.com/t4u3c5Qg7A— franceinfo (@franceinfo) November 14, 2023
« C’est glaçant. C’est un spectacle innommable, il n’y a pas de mots », a déclaré Emmanuelle Ménard, en larmes.
« Je pense que tous ceux, présents, qui ont vu ces images aujourd’hui ne ressortiront pas indemnes », a aussi estimé Laurence Cristol. « On a vu la folie des hommes. On voit des images brutes, sans commentaires, c’est encore plus bouleversant. Ce sont les images d’un matin comme les autres, et, soudain, surgit une attaque d’une violence sans nom. Nous sommes tous choqués. »
Avant la diffusion, la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, « avait demandé la plus grande vigilance aux équipes de secours du Palais-Bourbon et notamment aux pompiers », en prévision d’éventuels malaises, comme cela a pu être le cas lors de d’autres projections.
Parmi les images du film figurent celles d’hommes armés tuant des civils, notamment dans le kibboutz de Beeri, où 85 personnes ont été tuées et 26 prises en otage. D’autres montrent des membres du Hamas fauchant des jeunes qui fuient un festival de musique où plus de 260 personnes ont trouvé la mort.
La projection de ces images avait suscité la polémique, divisant les élus français autour de leur participation.
La gauche, sceptique, s’était majoritairement opposée à la projection. Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure avait affirmé ne pas vouloir « participer à ce qui était au départ une opération de propagande du Hamas », en référence aux images filmés par les assaillants eux-mêmes.
« Il faut que la France garde cette posture historique de ne pas embrasser la thèse des uns et des autres, mais notre capacité de continuer à parler à la fois aux Israéliens et aux Palestiniens », avait-il ajouté.
Chez les communistes, qui ont eux aussi refusé d’y prendre part, certains députés sont allés jusqu’à critiquer « une forme d’indécence dans cette initiative », selon le député des Bouches-du-Rhône Pierre Dharréville.
Interrogé par l’AFP, le sénateur LR Roger Karoutchi, président du groupe d’amitié avec Israël à la chambre haute, a indiqué qu’il comptait lui aussi organiser une diffusion, sans qu’une date ne soit encore fixée.
Au moins 1 200 personnes ont été tuées par le Hamas depuis le 7 octobre côté israélien, essentiellement des civils, et au moins 240 personnes ont été prises en otage, selon les autorités israéliennes.
L’AFP a participé à cet article.