L’étiquetage de l’UE ? Peu importe, disent les agriculteurs
Les agriculteurs de la vallée du Jourdain sont perplexes face à l'étiquetage alors qu'ils exportent vers d'autres partenaires
Quand l’Union européenne a adopté des lignes directrices pour l’étiquetage des produits provenant des implantations israéliennes en Cisjordanie mercredi, les agriculteurs de la région vallée du Jourdain ont réagi avec un simple haussement d’épaules.
« Il n’y aura pas d’impact sur les économies locales », a déclaré David Elhaiini, le maire du Conseil régional de la vallée du Jourdain, en poste depuis sept ans.
« Nous sommes forts et nous avons un produit de haute qualité. Nous trouverons un autre marché ».
Hanan Pasternak est l’un des agriculteurs qui a trouvé un autre marché. Sa grande ferme de poivrons, située près de son domicile au Moshav Nativ HaGdud, emploie plus de 100 travailleurs palestiniens.
Il a dit que la situation pour les agriculteurs qui exportent vers l’Europe a commencé à devenir très difficile. Il y a quatre ans, ils ne trouvaient plus de clients. « Les Palestiniens allaient aux supermarchés et étiquetaient eux-mêmes », a-t-il dit. « Cela a commencé en Scandinavie et cela s’est ensuite propagé. Nous avions l’habitude d’exporter des lots de produits en Hollande, en Angleterre et en Allemagne ». Mais en raison du boycott, a expliqué Pasternak, il a maintenant un seul client : La Russie.
Et même s’il a trouvé un nouveau marché, tout n’est pas parfait. « La Russie sait que nous avons aucun autre pays [avec qui faire du commerce], donc ils savent qu’ils peuvent exiger des prix plus bas », a déclaré Pasternak. « Aussi la monnaie s’est affaiblie en Russie. Mais tout cela n’est que du bluff ».
« Tout cela est hypocrite, parce qu’à chaque fois qu’il y a une pénurie d’un produit, tout d’un coup il n’y a plus de boycott », a ajouté Pasternak.
Mais lorsque les distributeurs européens viennent à lui en le suppliant de leur vendre des poivrons, Pasternak dit qu’il refuse de leur vendre pour des raisons idéologiques.
« S’ils me boycottent, je les boycotte ».
La vallée du Jourdain, la partie la plus orientale de la Cisjordanie située comme son nom le laisse entendre le long du Jourdain, est la demeure d’environ 7 000 Israéliens répartis entre 21 implantations et 10 000 Palestiniens.
L’agriculture est le principal employeur, et il y a peu d’autres possibilités économiques.
« Il y a six ou sept ans, 80 % de nos exportations allaient vers l’Europe », a déclaré Elhaiini, le maire du conseil régional. Mais quand les initiatives d’étiquetage ont commencé il y a environ huit ans, plutôt que de le combattre, les agriculteurs ont juste trouvé un nouveau marché, a-t-il précisé.
Maintenant, l’Europe représente environ 20 % des exportations en provenance de la vallée du Jourdain. Les exportations qui vont encore à l’Europe sont des choses avec une durée de vie courte, comme les herbes fraîches. Les dattes, la production principale dans la région de la vallée du Jourdain, peuvent être stockées pendant de longues périodes de temps.
Les principaux partenaires à l’exportation de la vallée du Jourdain sont maintenant les Etats-Unis, la Russie, l’Inde et Singapour.
Inon Rosenblum est le propriétaire de sa ferme dans le moshav de Naama depuis 1982. Il a dit quand ils ont commencé, quand il allait quotidiennement vers Jéricho pour faire ses achats et aller à la banque, les résidents arabes de Jéricho lui avaient dit qu’il ne pourrait jamais faire pousser quoi que ce soit sur cette terre aride. Des décennies d’irrigation, goutte par goutte, avec des serres, et de compost lui ont finalement permis de posséder une ferme pleine de succès où il cultive des dattes, des raisins et dix sortes d’herbes fraîches, le tout pour l’exportation.
Rosenblum a ajouté que la récente vague de violence à Jérusalem n’a pas touché sa ferme. Comme la plupart des propriétaires israéliens, les 30 employés de Rosenblum, mis à part son fils, Gil, 31 ans, sont palestiniens.
Les travailleurs palestiniens ont refusé de parler aux médias ou d’être photographiés parce qu’ils étaient inquiets à propos de la réaction du côté palestinien. « Nous avons des intéractions quotidiennes avec les Palestiniens, vous ne nous verrez pas avec des armes », a déclaré Rosenblum. « Nous avons vécu comme ça depuis le premier jour. Le gagnant ici, c’est l’économie ». Les dattes israéliennes et palestiniennes représentent 40 % des dattes majdoul.
Les agriculteurs palestiniens ont acheté des dattiers à Rosenblum, pour lancer leurs propres fermes au cours des quinze dernières années. Les territoires palestiniens sont désormais le numéro deux des exportateurs des dattes majdoul, après Israël. « Ils [l’UE] essaient de nous forcer à trouver une solution en détruisant une bonne économie ».
« S’ils croient que ne pas acheter les produits de la vallée du Jourdain signifie que nous allons résoudre tous les problèmes ici, ils se trompent, cela ne fera qu’empirer les choses », a ajouté son fils, Gil Rosenblum.
« Il y a 30 Palestiniens qui gagnent leur vie pour leurs familles. Ils seront les premiers à ressentir l’effet du boycott, sur leurs tables ».
K est un travailleur palestinien de 19 ans, du village à proximité d’Arbel Farms et l’usine d’emballage, près de l’implantation israélienne de Masua. Il a refusé de donner son nom complet.
« L’étiquetage est une erreur parce que les travailleurs auront un problème avec », a-t-il dit.
« Si les produits ne sont pas vendus, où allons-nous travailler ? Un problème de marketing signifie un problème pour nous à l’échelle de l’emploi ». K a ajouté que tous les gens de son village travaillent pour les Israéliens parce qu’il n’y a pas beaucoup d’opportunités économiques.
« Ils ne peuvent pas faire pression sur nous avec des boycotts, il font exactement le contraire », a déclaré Avigdor Arbel, le patron de K et le propriétaire de la ferme.
« [Le boycott] fait exactement le contraire. Nous ne pouvons parvenir à un accord que par la négociation ». Arbel a ajouté que 100 % de ses exportations allaient à une époque vers l’Europe mais il a commencé à se déplacer du marché européen, il y a quelques années. Maintenant, seulement 60 % de ses exportations partent encore vers l’Europe.
Dans d’autres parties de la Cisjordanie, les militants de l’organisation pro-implantation « Lev HaOlam » prévoyait un « achat en masse » pour vendre les produits des implantations à Jérusalem.
Rosenblum, le producteur de dattes, a dit qu’il veut que quelqu’un qui va au supermarché en Europe choisisse la meilleure datte, indépendamment du fait qu’elle vienne du Maroc ou de l’Espagne ou d’Israël. « Je ne veux pas qu’ils mettent la politique à l’intérieur des herbes fraîches et des dattes », a-t-il dit.
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