Malgré l’opposition de Gantz et Barkat, un nouveau budget de guerre devrait être approuvé
Le budget réorienterait 30 milliards de shekels à la défense et débloquerait des centaines de millions de fonds discrétionnaires aux ultra-orthodoxes et aux implantations
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.
Le cabinet devrait approuver lundi les modifications apportées au reste du budget 2023, afin d’orienter environ 30 milliards de shekels vers les priorités du temps de guerre, malgré les objections selon lesquelles ce plan verrait également l’affectation de centaines de millions de shekels aux ultra-orthodoxes et aux résidents d’implantations de Cisjordanie.
Les fonds destinés à ces deux causes avaient déjà été approuvés par la coalition dans le cadre d’un ensemble discrétionnaire de fonds dits de coalition, mais ils ont été gelés à la suite du déclenchement de la guerre le 7 octobre.
En se concentrant sur les deux derniers mois de 2023, la mise à jour du budget réoriente 17 milliards de shekels vers la défense et 13,5 milliards de shekels vers les besoins civils en temps de guerre, a déclaré le ministre des Finances Bezalel Smotrich à la Knesset lundi.
Le ministre du cabinet de guerre, Benny Gantz, a déclaré dimanche que les cinq ministres de son parti voteraient contre les changements budgétaires, car ils libéreraient des centaines de millions de shekels pour financer ces promesses politiques. Gantz a expliqué qu’il souhaitait que cet argent soit réorienté vers l’effort de guerre.
Le ministre de l’Économie, Nir Barkat, du Likud, le parti du Premier ministre, dénonce depuis des semaines le plan économique de Smotrich comme étant malavisé et a également menacé lundi de voter contre la mise à jour du budget, a confirmé un membre de son équipe.
Les modifications budgétaires devraient permettre de surmonter cette opposition potentielle de six voix et d’être approuvées par le cabinet de 38 ministres, avant d’être soumises à l’approbation finale de la Knesset.
En octobre, le cabinet avait gelé tous les fonds destinés aux dépenses politiques discrétionnaires qui n’avaient pas encore été transférés du ministère des Finances, afin de réévaluer les ressources qui pourraient être affectées à l’effort de guerre. La procureure générale a par la suite appuyé cette décision. Smotrich a déclaré qu’il aurait prélevé 1,6 milliard de shekels des 2,5 milliards de shekels, soit environ 70 %, de ces fonds discrétionnaire de la coalition encore disponibles pour les réaffecter à l’effort de guerre.
Les 30 % restants des fonds de la coalition, qui, après approbation, peuvent être transférés à divers ministères et bureaux, comprennent au moins 300 millions de shekels destinés à l’enseignement privé ultra-orthodoxe, qui se soustrait au contrôle du ministère de l’Éducation, et des centaines de millions de shekels, selon la presse israélienne, destinés à soutenir les implantations en Cisjordanie.
Smotrich a, en outre, déclaré au Times of Israel que la mise à jour du budget comprend 390 millions de shekels affectés au renforcement de la sécurité et des infrastructures de sécurité en Cisjordanie.
« Le budget qui a été approuvé aujourd’hui ne prévoit pas de nouvelles constructions en Judée et en Samarie », a déclaré Smotrich, utilisant le terme biblique pour désigner la Cisjordanie. Il s’agit plutôt de « budgets pour les besoins an matière de sécurité », dont les checkpoints et les escouades civiles de sécurité, ainsi que les armes et l’équipement dont ces équipes auraient besoin.
« Il y a 2 millions de nazis en Judée et en Samarie, qui nous haïssent au moins autant que les nazis du Hamas-Etat islamique (EI) à Gaza », a poursuivi Smotrich, citant un sondage réalisé auprès des Palestiniens qui a révélé que le soutien aux attaques terroristes menées par le Hamas le 7 octobre était plus important en Cisjordanie que dans la bande de Gaza. Le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, a tué plus de 1 200 personnes en Israël et en pris 240 en otage dans la bande de Gaza ce jour-là, déclenchant la guerre en cours.
Une source proche de HaMahane HaMamlahti a déclaré lundi que le budget présenté au gouvernement est « un doigt dans l’œil du peuple », selon un communiqué publié par le parti de Gantz.
Le budget n’a pas encore été rendu public. La source a affirmé que l’adoption des changements permettrait d’augmenter le financement des yeshivot de 500 millions de shekels, d’allouer 400 millions de shekels au ministère des Missions nationales – « dont l’objectif n’est pas clair » et qui est dirigé par le parti de Smotrich – et de tripler l’augmentation convenue des salaires dans les écoles privées ultra-orthodoxes.
La source n’a pas précisé si ces changements figuraient dans le budget ou, dans le cas de la clause sur les salaires des écoles haredi, s’inscrivaient dans le cadre des fonds discrétionnaires qui pourraient être débloqués après la clôture du budget.
Le parti ultra-orthodoxe Yahadout HaTorah avait précédemment tenté de faire passer une exemption à la décision de gel de financement d’octobre pour libérer les 300 millions de shekels prévus en 2023 pour les écoles haredi, mais Gantz a bloqué la démarche.
Des sources proches du ministre du cabinet de guerre ont déclaré qu’il était peu probable qu’il fasse tomber le gouvernement de guerre d’urgence formé avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, et que Netanyahu devait approuver cette mesure afin d’apaiser ses partenaires politiques ultra-orthodoxes et d’extrême-droite.
Le chef de l’opposition, Yair Lapid, a demandé lundi au gouvernement de reconsidérer la décision d’approuver aujourd’hui le budget 2023 actualisé, au vu des promesses politiques qui restent ancrées dans le cadre.
« Je lance un appel à tous les ministres du gouvernement, à tous les membres de la coalition – vous êtes signataires de ces fonds… Vous avez le pouvoir de l’arrêter… Vous ne pouvez pas faire cela aux citoyens d’Israël », a déclaré Lapid, s’exprimant au début de la réunion de faction de son parti Yesh Atid à la Knesset.
Il a qualifié la décision de financer des priorités politiques de « preuve supplémentaire que l’État d’Israël se bat pour sa vie [dans la guerre contre le Hamas] avec une armée de héros, mais avec le mauvais gouvernement et le mauvais Premier ministre ».
Smotrich a rejeté la critique, déclarant que cela ne valait pas la peine de se battre pour « 1 % du budget » alors que le plus important était pour les dirigeants de montrer un front uni.
« On peut les aimer ou ne pas les aimer, mais ce débat n’a rien à voir avec la guerre », a déclaré Smotrich, en référence aux transferts budgétaires bénéficiant aux établissements d’enseignement ultra-orthodoxes – ou yeshivot.
S’adressant à Gantz, le principal opposant au budget du gouvernement, Smotrich a déclaré : « Benny, ce n’est pas un secret que nous représentons deux modes de pensée différents dans la société israélienne… mais aujourd’hui », nous devons collaborer.
Dans une longue publication sur Facebook écrite lundi avant son intervention à la Knesset, Smotrich a déclaré que les critiques « ressassent la même campagne mensongère » que celle qui a été menée en mai dernier contre le budget initial.
La chef du parti Avoda, Merav Michaeli, a également critiqué cette nouvelle proposition de budget, affirmant qu’elle prouvait que le gouvernement « volait » des fonds à des fins politiques pendant qu’Israël était distrait par la guerre.
« Nous devons être très vigilants, car alors que tout le pays est rivé à la télévision, se rongeant les ongles, le cœur serré, rempli d’inquiétude et de tension, ce gouvernement continue de profiter malicieusement de la situation, de la manière la plus cynique qui soit, pour agir contre l’État d’Israël et notre peuple », a déclaré Michaeli ce lundi.
« Il vole les fonds de la population à des fins et pour des besoins qui sont à l’opposé de ce dont l’État d’Israël a besoin, et cause des dommages à l’État d’Israël et à ses besoins sécuritaires futurs », a déclaré Michaeli, du centre-gauche.