Noemi di Segni critique la politique israélienne en présence de Netanyahu
Selon la leader juive italienne, l’appui des ministres aux attaques contre les Arabes enlève toute fierté d'être juif ; elle demande la révision des réformes judiciaires
La présidente de l’Union des communautés juives d’Italie s’est exprimée avec force jeudi contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement israélien, les violences des habitants des implantations et les divisions au sein de la société, lors d’un discours prononcé à Rome en présence du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Noemi Di Segni, présidente de l’Union des communautés juives italiennes, a notamment affirmé que le soutien des ministres aux attaques de vengeance contre les Arabes et d’autres minorités au nom de l’identité juive avait rendu « impossible » toute fierté d’être juif ou israélien.
« La fierté que nous ressentons à l’égard des institutions israéliennes ne peut pas disparaître. Elle ne peut pas devenir une chose du passé », a déclaré Di Segni lors d’un événement organisé à la synagogue espagnole située sous le Tempio Maggiore à Rome.
Di Segni faisait référence à la montée des violences commises par les résidents d’implantations en Cisjordanie, sur fond de vague d’attentats terroristes commis par des Palestiniens. La semaine dernière, des résidents d’implantations extrémistes ont réagi à une fusillade terroriste qui a coûté la vie à deux frères en saccageant la ville de Huwara, dans la région de Naplouse, en y incendiant plusieurs logements et des véhicules. Un Palestinien a été tué par balle et plusieurs autres ont été grièvement blessés.
Dans une interview donnée quelques jours après l’émeute, le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a déclaré que, selon lui, la ville devrait être « anéantie ». Il s’est excusé mercredi pour ces propos, mais non sans avoir suscité l’indignation de la communauté internationale et la protestation de dizaines de pilotes de l’armée de l’air israélienne.
On ignore dans quelle mesure Netanyahu a entendu le discours de Mme Di Segni car pendant qu’elle parlait, le Premier ministre était informé par ses assistants qu’un attentat venait d’avoir lieu à Tel-Aviv. Netanyahu a semblé distrait pendant toute la durée de son discours, continuant à recevoir des précisions sur la fusillade terroriste, qui a fait trois blessés, dont un dans un état critique.
Di Segni a également critiqué la course effrénée du gouvernement pour faire passer un projet de loi qui diminuerait radicalement le pouvoir judiciaire, déplorant le fossé qu’il a creusé dans la société israélienne et appelant à un compromis.
« Bien sûr, la majorité élue propose et promeut des lois, mais la responsabilité d’un gouvernement implique une prise de conscience de la nature centrale de ces changements, même à long terme », a-t-elle déclaré.
Dû aux gigantesques embouteillages causés par la « journée de résistance » organisée par les manifestants opposés aux projets du gouvernement et l’empêchant d’arriver à destination, Netanyahu a dû être héliporté jusqu’à l’aéroport Ben Gurion pour prendre son vol.
Di Segni a également appelé à un « examen minutieux » d’un projet de loi en discussion à la Knesset qui permettrait aux tribunaux d’imposer la peine de mort aux responsables d’attaques terroristes meurtrières.
« Dans la lutte contre la haine fondamentaliste, la proposition relative à la peine de mort touche les cordes sensibles du droit à la vie », a-t-elle déclaré, rappelant que l’Italie avait aboli la peine capitale après la Seconde Guerre mondiale et que des discussions talmudiques avaient eu lieu à ce sujet.
Après le départ de Netanyahu de la synagogue, certains membres de la communauté ont interpellé Noemi Di Segni pour avoir exprimé, dans son intervention, des préoccupations au sujet de la réforme du système judiciaire.
« C’est une honte », a fulminé un ancien responsable de la communauté juive de Rome, « Vous êtes en train de diviser Israël. »
« Israël a besoin d’unité », a-t-il crié, avant de quitter le sanctuaire en trombe.
Le voyage de Netanyahu a connu plusieurs revers. La compagnie aérienne El Al n’a pas été en mesure de trouver un équipage pour le vol du Premier ministre, un problème imputé à la pénurie d’équipages, mais qui pourrait également avoir été le résultat de la colère croissante de la population à l’égard du gouvernement, qui poursuit ses efforts visant à affaiblir le système judiciaire.
Vendredi, Netanyahu doit rencontrer des hommes d’affaires italiens, puis son homologue italienne, Giorgia Meloni, rencontre durant laquelle il devrait faire pression sur la dirigeante italienne de la droite dure pour qu’elle reconnaisse Jérusalem comme capitale d’Israël.
Meloni, dont la coalition de droite a remporté les élections nationales en septembre, a fait plusieurs gestes de rapprochement avec la communauté juive, en réponse aux questions que suscite son parti, issu du Mouvement social italien néo-fasciste de l’après-guerre. Elle s’est prononcée à plusieurs reprises contre l’antisémitisme et a rencontré des membres de la communauté juive.