Paris appelle Israël à laisser entrer des élus français qui veulent rencontrer des terroristes palestiniens
"Nous souhaitons que les parlementaires français aient accès à l'ensemble des interlocuteurs qu'ils veulent rencontrer," a déclaré le Quai d'Orsay
La France a appelé mardi les autorités israéliennes à autoriser l’entrée sur leur territoire d’élus français disant vouloir rencontrer les terroristes palestiniens emprisonnés Marwan Barghouthi et Salah Hamouri.
« De manière générale, nous souhaitons que les parlementaires français aient accès à l’ensemble des interlocuteurs qu’ils veulent rencontrer pour remplir leur mission d’information », a déclaré la porte-parole du Quai d’Orsay, Agnès Romatet-Espagne.
« Nous y sommes attentifs s’agissant d’Israël comme de tous les pays où les élus français se rendent », a-t-elle ajouté.
Le ministère israélien de la Sécurité publique de Gilad Erdan a annoncé lundi qu’il refuserait aux élus français l’entrée en Israël pour rencontrer « un fieffé meurtrier comme Barghouthi » et « inciter ainsi à soutenir le terrorisme ».
Israël a en effet annoncé lundi que le pays ne permettra pas l’entrée au sein de l’Etat juif d’un groupe de responsables français en raison de leurs initiatives de promotion du boycott du pays.
Le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri a annoncé dans un communiqué qu’il adoptera la recommandation émise par le ministre de la Sécurité intérieure Gilad Erdan de ne pas autoriser l’entrée des 20 participants du groupe, avec, parmi eux, des parlementaires et des maires français ainsi que des membres du Parlement européen.
Les autorités israéliennes recommandent donc par avance aux élus français « de ne pas prendre l’avion du tout ».
« Ce n’est pas la première fois que je refuse l’entrée à des militants du BDS », a indiqué Deri, « mais ce coup-ci, c’est une délégation de responsables européens qui viennent afin de travailler contre Israël, ce qui donne plus de poids [à cette décision].
Erdan a indiqué prôner une politique de lutte contre ceux qui soutiennent la campagne de boycott.
« Nous n’autoriserons pas l’accès au territoire à ceux qui appellent activement à s’en prendre à Israël, en particulier quand ils demandent à rencontrer et à conforter un fieffé meurtrier comme Barghouthi, incitant ainsi à soutenir le terrorisme », a indiqué le ministre israélien de la Sécurité publique Gilad Erdan dans un communiqué de ses services et du ministère de l’Intérieur.
« Nous parlons de leaders politiques qui soutiennent activement le boycott contre Israël et vont jusqu’à le promouvoir ».
Ce voyage d’élus communistes et du parti de la gauche radicale La France Insoumise, prévu du 18 au 23 novembre, vise à « alerter sur la situation des près de 6 000 prisonniers politiques palestiniens », ont indiqué les membres de cette délégation qui comprendra notamment le secrétaire national du PCF et sénateur Pierre Laurent, quatre députés LFI, Clémentine Autain, Danièle Obono, Muriel Ressiguier et Michel Larive et des élus locaux dont le maire PCF de Gennevilliers Patrice Leclerc, selon le site de l’Humanité.
Barghouthi est l’ancien chef de l’aile armée Tanzim du Fatah et a été condamné en Israël pour avoir fondé la brigade des martyrs d’Al-Aqsa, un autre groupe terroriste du Fatah. Il purge actuellement cinq peines de prison à vie dans un centre d’incarcération israélien pour avoir ourdi des attentats terroristes au cours de la Seconde intifada au début des années 2000.
Barghouthi est resté très actif au niveau politique derrière les barreaux, et est souvent désigné comme l’un des quelques successeurs probables du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.
Au mois d’avril, Barghouthi avait lancé une grève de la faim pour obtenir de meilleures conditions pour les prisonniers mais également, selon les experts, pour faire la démonstration de son pouvoir et de son autorité politiques.
Il est surnommé par ses sympathisants le « Mandela palestinien ».
La délégation cherchera aussi à rencontrer l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, en détention administrative en Israël depuis le 23 août car jugé coupable de tentative d’assassinat contre le rabbin Ovadia Yossef. Il est membre du Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) que la France et l’Union européenne considèrent comme une organisation terroriste.
Salah Hamouri fait l’objet d’un ordre de détention administrative de six mois, confirmé le 22 octobre à la cour suprême de Jérusalem.
Dans un communiqué daté du 25 octobre 2017 le ministère des Affaires étrangères a demandé que « l’ensemble des droits de Salah Hamouri soient bien respectés ». La porte-parole a ajouté : « nous espérons sa libération. Nous demandons aussi que sa famille puisse lui rendre visite ».
Jugé trop peu engageant par les uns, ou synonyme de sympathie envers un terroriste pour les autres, le terme « espérer » a déçu les partisans de Salah Hamouri, et ses détracteurs, qui arguent qu’il n’a jamais renié les chefs d’accusations prononcés contre lui par un tribunal israélien : avoir participé à une tentative d’assassinat du rabbin Ovadia Yossef et appartenir au FPLP.
Ce sont les arguments que le député des Français de l’étranger Meyer Habib a opposé à Jean-Yves Le Drian en commission des Affaires étrangères le 26 octobre dernier.
‘Je l’ai interpellé sur la déclaration officielle scandaleuse du Quai d’Orsay hier en faveur de la libération du terroriste Salah Hamouri, cadre du FPLP, l’organisation responsable, entre autres, de l’attentat de la rue de Copernic en 1980, et qui avait projeté en 2005 d’assassiner le Grand Rabbin Ovadia Yossef ’, sans jamais exprimer par la suite le moindre regret » écrit le député sur la page de son compte Facebook.
Le ministre des Affaires étrangères lui a répondu qu’il assumait ce texte, qui appelle par ailleurs à connaître les raisons de la détention administrative de Salah Hamouri.
« Salah Hamouri a été arrêté en mai 2005 après avoir été membre d’une cellule publique populaire qui prévoyait d’assassiner le rabbin Ovadia Yosef et de mener une attaque à la bombe à Jérusalem. Il a purgé une peine de prison jusqu’à décembre 2011, et a ensuite été libéré dans un accord d’échange de prisonniers, » avait expliqué le Shin Bet au Times of Israël par courriel, via le service de presse du Premier ministre. Il s’agissait de l’échange de prisonniers palestiniens contre Gilad Shalit.
Emprisonné en Israël entre 2005 et 2011 après avoir été jugé coupable de tentative d’assassinat contre le rav Ovadia Yossef, et pour appartenance à des organisations politiques illégales, Hamouri a été de nouveau arrêté le 23 août par la police israélienne.
« Après sa libération de prison, il est retourné travailler au sein de l’organisation terroriste du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et, malgré les avertissements qu’il a reçus des forces de sécurité, Hamouri a continué à opérer dans le cadre de l’organisation » explique le Shin Bet.
« À la lumière de cela, il a été arrêté ».