Pour les familles d’otages américains, le voyage de Trump dans la région est une chance
Les parents des captifs israélo-américains s'insurgent contre la façon dont Netanyahu gère les négociations, craignant que la pression militaire soit utilisée au nom de la survie de son gouvernement uniquement
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

WASHINGTON – Les familles des otages israélo-américains qui sont encore actuellement retenus en captivité à Gaza ont indiqué mercredi qu’elles considéraient la prochaine visite du président américain Donald Trump au Moyen-Orient comme une occasion unique d’obtenir la libération de leurs proches.
Trump doit se rendre en Arabie saoudite, au Qatar et aux Émirats arabes unis lors d’un déplacement qui aura lieu du 13 au 16 mai. La Maison-Blanche n’a pas prévu pour l’instant d’escale en Israël au cours de ce premier voyage du président américain au Moyen-Orient depuis sa réélection.
« Ma vision des choses, c’est que lorsqu’il ira en Arabie saoudite, il ramènera cinq citoyens américains dans son avion, dont mon fils, et qu’il appellera pour dire : ‘Monsieur Chen, Madame Chen, j’ai votre enfant. Il est sur le chemin du retour », a expliqué Ruby Chen dont le fils Itay, 19 ans, a été tué lors de l’attaque sanglante commise par le Hamas, le 7 octobre 2023, et dont le corps sans vie est détenu à Gaza depuis lors.
Quatre autres Américains sont également retenus en captivité : Edan Alexander, 21 ans, qui serait encore vivant, ainsi que les dépouilles d’Omer Neutra, 21 ans, de Judith Weinstein Haggai, 70 ans, et de Gadi Haggai, 73 ans.
Les parents d’Alexander, de Chen et de Neutra ont tenu un point-presse avec les journalistes à Washington mercredi, où ils ont rencontré de hauts-responsables de l’administration.
Trump avait aidé à obtenir la remise en liberté de 33 otages, dont deux ressortissants américains, grâce à un accord de cessez-le-feu qui avait été signé à la veille de son entrée en fonction, au mois de janvier. Mais cet accord s’était effondré après sa première phase d’application et Israël a finalement relancé les hostilités, le 18 mars, le Hamas refusant de répondre à ses demandes de reformulation des termes de l’accord.

Les États-Unis ont soutenu la décision prise par Israël de reprendre les combats mais la semaine dernière, Trump a indiqué qu’il avait exhorté le Premier ministre Benjamin Netanyahu à autoriser l’entrée des aides humanitaires au sein de l’enclave côtière – un signe du malaise grandissant de Washington face à la poursuite de la guerre par Israël.
Pourtant, Gaza semble ne plus figurer sur la liste des priorités de l’administration Trump – l’émissaire pour le Moyen-Orient Steve Witkoff et d’autres fonctionnaires s’affairant à tenter de conclure des accords qui permettraient de limiter la portée du programme nucléaire iranien et de mettre fin à la guerre en Ukraine, entre autres.
Les pourparlers sont dans l’impasse depuis deux mois – Israël n’étant disposé à accepter un accord qui ouvrirait la porte à la remise en liberté d’une partie des otages qu’en échange d’un autre cessez-le-feu temporaire qui l’autoriserait à éventuellement relancer la guerre. Le Hamas, de son côté, s’est dit prêt à relâcher les 59 otages restants en une seule et unique fois avec pour objectif de mettre un terme définitif à la guerre.
Une perspective que Netanyahu refuse, arguant qu’une telle initiative permettrait au Hamas de conserver le pouvoir, rendant possible une nouvelle invasion similaire à celle qui s’était produite le 7 octobre 2023.
Mais Ronen Neutra, lors de la conférence de presse qui a eu lieu mercredi, a mis en avant un sondage qui a été publié la semaine dernière par l’institut Midgam et qui révèle que le Premier ministre n’est guère en phase avec la majorité des Israéliens sur cette question.
Interrogés sur leur potentiel soutien à un accord prévoyant le rapatriement de tous les otages en échange de la fin de la guerre à Gaza, 68 % des 500 personnes interrogées ont dit être favorables à une telle initiative contre 22 % qui s’y sont opposées. Même parmi les électeurs de la coalition, 48 % des sondés ont déclaré vouloir la fin de la guerre en échange de la libération de tous les captifs qui se trouvent encore dans la bande.
Les familles des otages américains ont vivement critiqué la manière dont Netanyahu et le ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer mènent les négociations, tout en se félicitant du soutien qu’elles avaient reçu de la part de l’administration de Joe Biden et qu’elles reçoivent actuellement de l’administration actuelle de Trump.

Ruby Chen a expliqué que les familles américaines avaient des entretiens téléphoniques hebdomadaires avec le bureau de l’envoyé américain pour les otages, et Adi Alexander a noté qu’il était en contact quotidien avec Witkoff.
En revanche, les contacts avec le gouvernement israélien sont beaucoup moins fréquents, et les responsables israéliens disent aux familles qu’ils craignent que leurs informations fuitent auprès des médias, a dit Ruby Chen.
Chen a critiqué « le péché capital », selon lui, du Premier ministre – à savoir l’affirmation faite par Netanyahu, qui n’a cessé de répéter qu’il n’était pas possible actuellement d’obtenir la libération de tous les otages en même temps. Le porte-parole de Netanyahu a déclaré, au début du mois, qu’un tel accord n’était pas possible parce que le Hamas exigeait en échange la fin définitive de la guerre, ce qu’Israël n’acceptera pas.
« Je pense qu’il est facile de dire que le Hamas ne respectera pas sa part de l’accord. S’il ne respecte pas sa part de l’accord, Israël pourra reprendre les hostilités. Mais donnons-leur la possibilité de libérer tous les otages et voyons si cela doit arriver ou non au lieu de dire qu’ils ne le feront pas », a plaidé Orna Neutra.
Adi Alexander a fait savoir qu’il n’était pas nécessairement opposé à l’utilisation de la pression militaire pour inciter le Hamas à relâcher les otages mais il a indiqué qu’il craignait que la campagne militaire israélienne en cours ne soit davantage motivée par le désir du Premier ministre d’assurer la survie de son gouvernement, dans la mesure où ses partenaires d’extrême droite ont menacé de le faire tomber s’il devait consentir à mettre un term à la guerre avant que les capacités militaires du Hamas n’aient été entièrement démantelées.
« Si la pression militaire vise à assurer la survie politique du gouvernement israélien, nous n’en avons pas besoin et nous devons y mettre un point final », a dit Alexander.

« Je pense que le président est une personnalité d’une grande fermeté. Il doit être ferme avec ses ennemis, mais aussi avec ses amis. Et par amis, je parle d’Israël », a-t-il ajouté.
Alexander s’est dit ouvert à un nouvel accord intermédiaire, mais il a affirmé qu’il devait être immédiatement suivi d’un accord final qui mettrait un terme à la guerre et qui garantirait la libération de tous les otages restants.
Chen et lui-même ont ont une nouvelle fois lancé un appel à l’administration Trump, lui demandant de reprendre les négociations directes avec le Hamas.
Des discussions qui avaient été abandonnées après trois réunions qui avaient été organisées entre l’envoyé de la Maison Blanche pour les otages, Adam Boehler, et les responsables du Hamas au début du mois de mars – des rencontres qui avaient entraîné la colère d’Israël, furieux que des négociations aient été menées en son nom sans en avoir été averti au préalable.
Le voyage de Trump dans la région est considéré comme un moment décisif pour les négociations portant sur les problématiques de la guerre à Gaza et du programme nucléaire iranien.
« Votre voyage en Arabie saoudite est l’occasion de mettre fin aux hostilités dans la région, d’avancer vers la paix, de mettre fin à la guerre et de garantir la libération des otages », a dit Neutra.