Pour Rothman, force motrice de la refonte judiciaire, les tribunaux ont « aidé » Hitler
Après ces propos tenus lors d'une conférence de l'Association du barreau, l'élu HaTzionout HaDatit a été hué et certains ont quitté la salle, furieux
Un parlementaire de droite largement considéré comme une force motrice derrière la tentative du gouvernement de radicalement réformer le système judiciaire s’est retrouvé sous le feu des critiques lors d’une conférence juridique cette semaine, alors qu’il tentait de dépeindre le système judiciaire comme un outil manipulé par Adolf Hitler.
Avant même d’évoquer le leader nazi, l’intervention de Simcha Rothman (HaTzionout HaDatit) lors de la conférence annuelle de l’Association du barreau israélien (IBA) à Tel Aviv, mardi, a été marquée par la controverse, plusieurs participants ayant quitté la salle pour protester contre le député, au milieu d’un flot continu de chahut.
Participant à une table ronde aux côtés du procureur général adjoint Gil Limon, de l’ancienne procureure générale adjointe et critique du gouvernement Dina Zilber, de la députée Efrat Rayten (Avoda), entre autres, Rothman a cherché à répondre aux critiques qui ont dépeint la refonte comme une prise de pouvoir de la droite qui remettrait en cause le caractère démocratique d’Israël.
« Quand Hitler est monté au pouvoir en Allemagne, il n’a pas brûlé les palais de justice, il a brûlé le Parlement parce que les Parlements sont toujours l’ennemi des dictateurs. Les tribunaux l’ont aidé », a déclaré Rothman sous les applaudissements d’un petit groupe de partisans, tandis que d’autres le huaient.
מהומונת בוועידת המשפט של לשכת עוה"ד בפאנל בהשתתפות שמחה רוטמן, גיל לימון, דינה זילבר, אפרת רייטן ונוספים. כשרוטמן התחיל לדבר חלק מהקהל השתעל בהפגנתיות ולאחר מכן החלו חילופי צעקות. (בנוהל) pic.twitter.com/hFi7KRtEAn
— חן מענית Chen Maanit (@chenmaanit7) September 3, 2024
Tout au long de son intervention, Rothman, qui préside la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset, a dû faire face à un chahut constant, à des commentaires acerbes et à une vague de toux coordonnée dans la salle, alors qu’il tentait de défendre sa position selon laquelle le système judiciaire israélien sape la volonté démocratique des électeurs israéliens en imposant des restrictions à la Knesset et au gouvernement.
Une partie de l’auditoire a bruyamment quitté la salle lorsque Rothman a commencé à parler, déclenchant des discussions houleuses avec d’autres personnes restées assises. Cette sortie a souligné la puissance de la colère qui règne encore dans la société israélienne à propos de la tentative de remaniement du système judiciaire, qui avait déclenché certaines des plus grandes manifestations de l’histoire du pays l’année dernière.
Le plan du gouvernement visait à retirer du pouvoir aux tribunaux et au procureur général, diluant ainsi le rôle du système judiciaire en tant que frein au pouvoir du gouvernement.
Cette initiative a été largement suspendue à la suite du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre, mais nombreux sont ceux qui pensent que le gouvernement pourrait relancer cette initiative, remettant ainsi sur le devant de la scène le clivage idéologique qui a secoué Israël pendant une grande partie de l’année 2023, alors même que la guerre fait toujours rage à Gaza et que des dizaines de milliers de personnes sont toujours déplacées dans le nord et le sud du pays.
« Ne vous avisez pas », a mis en garde le président Isaac Herzog lors de la conférence mardi. « Laissez-nous nous rétablir et guérir après cette terrible fracture. Nous ne devons pas prendre de décisions fatidiques concernant les valeurs fondamentales du pays sans un large consensus et un véritable dialogue approfondi et partagé. »
Les critiques ont également assailli Rothman sur le refus du gouvernement de plier sur un point de friction majeur dans les pourparlers pour une libération des otages et un cessez-le-feu à Gaza, faisant écho aux accusations selon lesquelles le gouvernement donne la priorité aux gains de la guerre sur la vie des otages ou que le Premier ministre Benjamin Netanyahu serait désireux de prolonger la guerre pour ses propres intérêts politiques étroits.
« Vous avez détruit le pays », a crié une femme à l’adresse de Rothman alors qu’il quittait la salle sous haute surveillance. D’autres ont scandé « honte » à l’attention de l’élu.
La tentative de Rothman de faire l’amalgame entre le système judiciaire israélien et les mesures prises par Hitler pour aligner le système judiciaire allemand sur l’idéologie et les objectifs nazis est allée à l’encontre des normes qui considèrent généralement de telles comparaisons comme antisémites et comme une forme de banalisation des véritables horreurs de la Shoah.
עוד מוועידת המשפט של לשכת עורכי הדין:
גם ביציאה מהאולם, הזעם הציבורי על רוטמן הדמגוג אויב הדמוקרטיה לא נגמר ???? pic.twitter.com/w2MUz4S1Ps— Nava Rozolyo נאווה רוזוליו (@rozolyo) September 3, 2024
Selon l’International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA), dont la définition de l’antisémitisme a été défendue par Israël et adoptée par une grande partie de l’Occident, « établir des comparaisons entre la politique israélienne contemporaine et celle des nazis » est une forme d’antisémitisme.
Israël accuse régulièrement les critiques qui utilisent de telles comparaisons de haine envers les Juifs, comme en juillet, lorsque le ministère des Affaires étrangères a qualifié une personne nommée à l’ONU « d’irrécupérable » et l’a accusée de « déformation de la Shoah » après qu’elle a écrit sur les réseaux sociaux qu’elle était d’accord avec un message juxtaposant des photos de Netanyahu et d’Hitler.