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Analyse

Pourquoi la loi interdisant l’UNRWA pourrait finir par bénéficier au Hamas

90 jours après l'adoption d'une loi visant à interdire une instance complice de terrorisme et et deux jours avant son entrée en vigueur, Israël n'a toujours pas pris les mesures visant à garantir que tout se déroulera comme l'ont prévu les députés

Des résidents inspectent les dégâts causés par une frappe israélienne sur l'école Al-Majda Wasila de l'UNWRA, qui abrite des Palestiniens déplacés à Gaza City,  le 14 décembre 2024. (Crédit : Omar Al-Qattaa/AFP)
Des résidents inspectent les dégâts causés par une frappe israélienne sur l'école Al-Majda Wasila de l'UNWRA, qui abrite des Palestiniens déplacés à Gaza City, le 14 décembre 2024. (Crédit : Omar Al-Qattaa/AFP)

La loi interdisant tout contact avec l’UNRWA – l’Office controversé de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient – qui a été adoptée par la Knesset il y a 90 jours, rentre en vigueur ce jeudi.

Cette loi a été promulguée à peine plus d’un an après le 7 octobre 2023 – la date du pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël. Elle a aussi été adoptée après qu’Israël a présenté aux Nations unies des preuves de la participation d’employés de l’UNRWA au massacre, avec notamment des images qui montraient l’enlèvement, par des personnels de l’agence, du corps sans vie de Jonathan Samerano au kibboutz Beeri.

De plus, Israël a largement mis en exergue le fait que les écoles, les structures ou les véhicules de l’UNRWA sont utilisés à des fins terroristes à Gaza – ils servent ainsi à cacher des hommes armés du groupe terroriste ou des stocks d’armes. L’un des otages qui avait été libéré de captivité, à la fin du mois de novembre 2023, avait expliqué avoir été conservé en détention dans l’habitation d’un enseignant de l’agence de l’ONU.

Le 5 août 2024, les Nations unies avaient diffusé un rapport consacré aux conclusions de son enquête sur l’UNRWA, rapport dans lequel il annonçait que neuf employés de l’agence avaient été renvoyés. Toutefois, l’ONU continue à apporter son soutien plein et entier à la même instance qui, selon Israël, est devenue dorénavant partie intégrante du Hamas.

La loi portant sur l’interdiction de l’UNRWA a été adoptée à la Knesset avec une large majorité – elle a notamment bénéficié du soutien de l’opposition – dans un contexte de révélations sur des personnels, au sein de l’instance, qui sont activement impliqués dans les groupes terroristes de la bande de Gaza et après l’utilisation répétée des infrastructures de l’UNRWA dans des activités terroristes. Des preuves attestent également des incitations à la haine qui sous-tendent les apprentissages, dans les écoles de l’agence, avec des professeurs qui glorifient également les attentats contre les Israéliens.

Environ 5,9 millions de personnes sont enregistrées auprès de l’UNRWA en tant que réfugiés palestiniens, parce qu’ils sont les descendants des Arabes qui avaient été déplacés pendant la guerre qui avait entouré la création d’Israël, en 1948. Cela fait longtemps que l’État juif affirme que l’UNRWA perpétue le conflit israélo-palestinien en utilisant cette décision précise des réfugiés – Israël est le seul cas où ce statut est transmis d’une génération à l’autre.

La législation qui a été adoptée à la Knesset comprend deux composantes principales : la première concerne l’arrêt des activités de l’UNRWA sur le territoire souverain qui est celui de l’État d’Israël. La seconde interdit tout contact entre les autorités israéliennes, les responsables publics et l’organisation.

Des résidents inspectent les dégâts causés par une frappe israélienne sur l’école Al-Majda Wasila de l’UNWRA, qui abrite des Palestiniens déplacés à Gaza City, le 14 décembre 2024. (Crédit : Omar Al-Qattaa/AFP)

Ces deux composantes seront mises en vigueur en date de ce 30 janvier – même s’il est encore difficile de dire ce qui viendra remplacer l’organisation s’agissant de fournir des services aux populations palestiniennes qui en sont dépendantes, qu’il s’agisse des écoles et autres services sociaux.

Des discussions ont eu lieu à la Knesset concernant l’application de la loi, ces dernières semaines. La semaine dernière, une réunion de la commission des Affaires étrangères et de la Défense a été consacrée au sujet, une réunion qui a eu lieu à huis-clos. Au début des échanges, le député Yuli Edelstein, président de la commission, a donné à Kobi Samerano, le père de feu Jonathan Samerano, l’occasion de rendre ses propos publics. Le corps sans vie de Jonathan se trouve encore entre les mains du Hamas, à Gaza.

« Je traverse les instants les plus durs de ma vie », a dit Samerano. « D’un côté, il y a beaucoup de joie pour ces [otages] qui rentrent, mais d’un autre, il y a la pensée de ceux qui restent là-bas ».

« L’UNRWA avait – et a toujours – la capacité de me ramener mon fils, mais choisit de ne pas le faire. L’UNRWA est une organisation terroriste dont les employés ont participé aux atrocités du 7 octobre, et l’État d’Israël ne peut pas permettre qu’une exception soit faite à la loi qui a été votée », a-t-il conclu.

Amis et famille lors d’une cérémonie d’adieu à Jonathan Samerano, assassiné par des terroristes du Hamas et dont le corps est toujours détenu dans la bande de Gaza. La cérémonie s’est déroulée à Tel Aviv, le 4 décembre 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

Lundi, un représentant du ministère des Finances, Yuri Metzlaoui, a déclaré à la commission des Finances de la Knesset que la mise en œuvre de la loi entraînerait l’annulation de diverses exemptions accordées à l’UNRWA au fil des ans.

Selon l’interprétation du ministère des Finances, l’annulation des exemptions accordées à l’UNRWA ne nécessite pas d’ordonnance déclaratoire supplémentaire. Lorsque la loi entrera en vigueur, les exonérations et les avantages fiscaux accordés à l’UNRWA – tels que la TVA, les droits de douane, les droits d’accise et les droits d’achat – cesseront automatiquement. Ceci est dû à l’interdiction faite aux fonctionnaires des différents départements du ministère des Finances de correspondre avec les représentants de l’UNRWA ou d’entretenir un quelconque contact avec eux.

La députée Yulia Malinovsky de Yisrael Beytenu, qui a piloté la loi tout au long du processus législatif et qui fait maintenant pression pour que la Knesset contrôle sa mise en œuvre, a fait valoir lors de la discussion que le ministère des Finances devrait émettre des ordres directs interdisant toute communication avec l’UNRWA. Selon elle, il ne suffit pas d’interrompre passivement les contacts.

La députée de la Knesset Yulia Malinovsky parle lors d’une réunion de la commission des Affaires étrangères et de la Défense à la Knesset, le 9 juillet 2024. (Yonatan Sindel/Flash90)

Une autre question soulevée lors des discussions concerne les activités des banques commerciales en Israël à l’égard de l’UNRWA. Le texte de loi fait référence à la rupture des contacts avec « les autorités de l’État, y compris les entités et les individus jouant un rôle public conformément à la loi ».

Cependant, malgré les 90 jours qui se sont écoulés depuis le vote de la loi, le ministère de la Justice et d’autres autorités, y compris la Banque d’Israël, examinent toujours si la formulation s’applique également à la détention de comptes bancaires de l’UNRWA dans les banques commerciales israéliennes.

À ce jour, au moins deux des plus grandes banques israéliennes gèrent des comptes pour l’UNRWA. Les banques n’ont pas encore reçu d’instructions de la Banque d’Israël sur la marche à suivre, à savoir si elles doivent fermer les comptes ou continuer à fournir des services bancaires à l’organisation.

Au cours de la discussion de lundi, la représentante du superviseur de la banque, Miri Rosenstock, a déclaré que si l’ensemble du système bancaire est au courant de la loi sur l’UNRWA, des discussions sont encore en cours concernant l’interprétation et le champ d’application de cette loi. Ici aussi, Malinovsky fait pression pour une mise en œuvre plus rapide et plus claire.

Le gouverneur de la Banque d’Israël Amir Yaron (au centre) s’exprime lors d’une discussion sur l’UNRWA au sein de la commission des finances de la Knesset, le 27 janvier 2025. (Crédit : Daniel Shem Tov, Cabinet du porte-parole de la Knesset)

Lors de la discussion de lundi, Malinovsky a déclaré : « S’il n’y a pas d’argent, il n’y a pas de terrorisme… La réponse du superviseur des banques est inacceptable. Ils ont eu trois mois pour se préparer… J’attends d’eux qu’ils donnent des instructions claires aux banques sur la manière de procéder. Il n’est pas acceptable que chacun agisse à sa guise alors que l’argent continue d’affluer vers l’organisation ».

Le président de la commission des Finances, le député Moshe Gafni (Yahadout HaTorah), a ajouté : « D’après ce que je comprends de la formulation de la loi, [l’interdiction de communiquer avec l’UNRWA] s’applique également aux banques. La loi le stipule explicitement. Je ne suis pas d’accord avec le fait que la Banque d’Israël ne devrait pas être impliquée dans cette affaire ».

Un autre aspect important lié à la mise en œuvre de la loi cette semaine n’a pas été discuté lundi. L’UNRWA fournit des services essentiels aux résidents palestiniens de Jérusalem-Est, une zone qui relève de la juridiction de la municipalité de Jérusalem. À partir de jeudi, on ne sait pas qui remplacera l’UNRWA dans la gestion des écoles et la fourniture de services supplémentaires à Jérusalem-Est. Pour l’instant, la municipalité de Jérusalem n’est pas prête à faire face à la situation.

Des barbelés recouvrent les murs entourant le bureau local de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies) en Cisjordanie, à Jérusalem, le 29 octobre 2024. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)

Pendant de nombreux mois, Israël s’est abstenu de proposer une alternative ou une solution pour combler le vide laissé par le départ de l’UNRWA de Jérusalem-Est.

En outre, si l’UNRWA n’est pas tenu de cesser ses activités en Cisjordanie, puisque cette région n’est pas sous souveraineté israélienne, la fermeture des comptes bancaires de l’organisation en Israël et l’interdiction de tout contact avec elle peuvent entraver sa capacité à poursuivre ses activités dans cette région également.

En ce qui concerne les activités de l’UNRWA à Gaza, Israël n’a pas non plus proposé d’alternative et la détérioration des relations entre Israël et les Nations unies empêche l’organisation internationale de combler le vide ainsi créé. Par conséquent, l’arrêt des opérations de l’UNRWA à Gaza pourrait renforcer le Hamas, car il serait le seul groupe responsable de la distribution de l’aide humanitaire dans la région.

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