Ran Erez : La grève des enseignants du secondaire pourrait durer jusqu’à fin octobre
Selon le syndicaliste, le ministre de l'Éducation "ne comprend pas son travail" ; la grève, qui a commencé dimanche, touche plus de 500 000 élèves, déjà en retard dû au Covid et à la guerre
La grève des enseignants du secondaire qui a débuté dimanche pourrait se poursuivre jusqu’après les grandes fêtes juives, a déclaré mercredi à Ynet le président du Syndicat des enseignants du secondaire, Ran Erez – ce qui signifie que la grève, qui en est à son quatrième jour, pourrait perdurer jusqu’à la fin du mois d’octobre.
Interrogé lors d’un entretien téléphonique avec le site d’information Ynet sur le fait que la grève pourrait se poursuivre jusqu’après les vacances, Erez a répondu : « Oui, car nous ne sommes pas proches d’un accord. »
Cette remarque a été largement partagée sur les réseaux sociaux, les élèves, les parents et les enseignants étant confrontés à la perspective d’un bloquage prolongé.
Le Syndicat des enseignants du secondaire est engagé depuis des semaines dans des négociations continues mais sans issue avec les ministères de l’Éducation et des Finances, ce qui a conduit à la grève, qui a été officiellement annoncée jeudi dernier.
Interrogé sur le fait que les élèves n’avaient rien à faire cette semaine à cause de la grève, Erez a déclaré « que c’est une chance que le temps permette aux étudiants d’aller à la plage et qu’ils s’occupent. Nous ne voulons pas blesser les élèves. Pour nous, c’est comme si les vacances d’été sont prolongées de quelques jours, ce n’est pas la fin du monde ».
« Nous nous battons pour un meilleur système scolaire », a-t-il ajouté.
Erez a insisté sur le fait que les enseignants attendaient de meilleures conditions depuis des années. « Dans la situation actuelle, bien que nous ayons travaillé très dur pendant la période du COVID-19, pendant la guerre et pendant les élections qui ont eu lieu quatre fois, ils nous ont dit : ‘Ce n’est pas le moment’. »
« Mais cela fait maintenant trois ans que nous n’avons pas de convention collective, trois ans que nos salaires ont baissé d’au moins 8 ou 9 % en raison de l’inflation », a souligné Erez.
« Je veux que les meilleurs enseignants viennent dans le domaine de l’éducation, mais ils ne viendront pas dans ces conditions, avec 40 enfants par classe et un salaire où un enseignant avec une licence et un certificat d’enseignant commence à 8 500 shekels par mois. »
Erez a déclaré qu’il appartenait au ministère des Finances de mettre fin à la grève, ajoutant : « Je suis certain qu’un grand nombre d’enseignants quitteront le système parce qu’ils n’y voient pas d’avenir. Et nous manquons déjà d’enseignants. »
Aucune nouvelle réunion n’était prévue mercredi entre le syndicat des enseignants du secondaire, le ministère de l’Éducation et le ministère des Finances. Les négociations concernant les salaires, les avantages sociaux et les contrats sont dans l’impasse depuis longtemps.
Interrogé sur le ministre de l’Éducation Yoav Kisch, Erez, qui dirige le syndicat des enseignants depuis 1997, a déclaré que de tous les ministres de l’Éducation avec lesquels il a travaillé, Kisch est « le plus faible de tous. Il n’en a pas les capacités, il ne comprend même pas son travail ».
Au cours des négociations, Erez et Kisch ont à maintes reprises échangé des remarques désobligeantes et méprisantes l’un envers l’autre.
Mercredi, répondant à Erez sur le réseau social X, Kisch a déclaré que comparer la grève aux vacances d’été et dire que ce n’est pas la fin du monde, comme l’a fait Erez, était « la chose la plus déconnectée qui soit ».
« C’est ainsi que parle une personne qui ne peut pas regarder les étudiants et les enseignants dans les yeux, c’est ainsi que parle une personne qui ne ressent pas la guerre à l’extérieur. »
« Malheureusement, il est partie prenante aux négociations. Si c’est ce qu’il pense, après une trentaine d’années de grèves, il est temps qu’il parte », a déclaré Kisch.
Le point de vue d’une directrice d’école
« Une grève est légitime pour les organisations lorsqu’elles n’obtiennent pas ce qu’elles veulent, mais en ce moment, nous sommes dans une période très difficile, pendant une guerre », a expliqué Abigaïl Samin, directrice de Makif Ariel, un grand collège-lycée couvrant les classes de la 5e à la Terminale dans l’implantation d’Ariel, en Cisjordanie.
« Beaucoup de nos lycéens sont dans des situations très difficiles. La dernière chose dont ils ont besoin, c’est de continuer les vacances d’été », a déclaré Samin, s’adressant au Times of Israel par téléphone mercredi après-midi. Samin est également co-directrice de « Manhigim », une organisation qui chapeaute les directeurs d’école et qui compte 2 000 membres.
En raison de la guerre et des perturbations du système scolaire de l’année dernière, de nombreux élèves souffrent de traumatismes, de problèmes d’attention ou d’autres difficultés, de sorte que les parents « se tournent vers le système scolaire pour obtenir de l’aide comme ils ne l’avaient jamais fait auparavant », un besoin auquel il est beaucoup plus difficile de répondre pendant une grève, a-t-elle déclaré.
De plus, en raison de la combinaison des difficultés de ces dernières années, en particulier les fermetures du COVID et les perturbations causées par la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas, les lycéens sont très en retard dans leurs études, ce qui sera exacerbé si la grève se poursuit pendant une longue période, en particulier si le calendrier des examens importants de fin d’études est perturbé, a-t-elle déclaré.
« Les enseignants sont coincés », a poursuivi Samin, car ils veulent enseigner et aider les étudiants, et pendant la grève, ils ne recevront pas non plus leur salaire, ce qui est « très stressant ».
« Même ceux qui pourraient soutenir la grève disent qu’ils doivent parvenir à un accord », a ajouté Samin.
La grève concerne officiellement les enseignants des classes de la Première à la Terminale, mais certaines classes de Seconde seraient également touchées. Selon les données du ministère de l’Éducation, Israël compte cette année quelque 514 000 lycéens.
La grève des enseignants du secondaire est une action distincte de la grève générale d’une journée appelée par l’organisation syndicale de la Histadrout lundi, qui a entraîné la fermeture anticipée des écoles élémentaires et des collèges et la fermeture complète des jardins d’enfants, avant qu’un tribunal ne l’invalide pour des raisons politiques.
Les négociations dans l’impasse
Aucune nouvelle réunion n’a eu lieu mercredi, les négociations de mardi matin s’étant achevées sans avancée.
Mardi, après une réunion matinale, le ministre de l’Éducation a déclaré que le ministère travaillerait avec les autorités locales et les mouvements de jeunesse pour proposer des « cadres alternatifs » et organiser des activités non académiques pour les élèves du secondaire.
Cependant, une source au sein du ministère de l’Éducation a déclaré au Times of Israel que « personne ne veut de cette solution, car cela signifie que la grève va continuer ».
« Nous ne pouvons pas ouvrir l’école et faire venir d’autres enseignants, alors peut-être qu’il y aura d’autres activités […], nous explorons beaucoup d’options », a déclaré la source, soulignant que « rien n’est [encore] décidé ou approuvé ».
Le principal point de désaccord porte sur l’initiative prise par le gouvernement de permettre la mise en place de contrats individuels avec les enseignants, ce qui, selon lui, ouvrira la porte à une plus grande flexibilité dans les embauches et assurera une rémunération qui sera basée sur les résultats et sur les capacités et non plus sur l’ancienneté.
Le syndicat s’oppose avec fermeté à une telle initiative car il estime que ces arrangements individuels feront des enseignants des « travailleurs contractuels » qui ne bénéficieront plus des avantages ou de la sécurité de l’emploi dont ont profité les professeurs jusqu’à présent. Il avertit qu’ils favoriseront l’embauche d’enseignants non-qualifiés, qu’ils entraîneront un plus grand turn-over avec une qualité réduite de l’enseignement donné aux élèves.
Les enseignants réclament également une hausse salariale rétroactive et d’autres avantages qui avaient été convenus avant le début de la rentrée scolaire, l’année dernière, mais qui avaient été reportées en raison du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre et l’éclatement de la guerre.
Selon des informations, le ministère a offert de consentir à au moins une partie de ces augmentations de salaires et autres avantages réclamés par les professeurs.