Rassemblement à Paris : « Israël assassin, Hollande complice »
2 000 policiers et gendarmes mobilisés, près de 50 interpellations, un drapeau israélien brûlé sous les applaudissements

Quelque 5 000 personnes ont bravé, samedi à Paris, l’interdiction de manifester décidée par le gouvernement par crainte de violences et débordements antisémites – mais sans chercher à défiler.
Selon des chiffres partiels et provisoires, une cinquantaine de personnes ont été interpellées, dont une trentaine placées en garde à vue, en marge de la manifestation.
Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène face à un groupe qui leur lançait des projectiles.
Criant « Israël hors de Palestine, il est fini le temps des colonies », « Israël assassin, Hollande complice », « Nous sommes tous des Palestiniens », ils se sont rassemblés, comme initialement prévu, place de la République, en plein centre de Paris, à 15H00.
Les forces de l’ordre avaient toléré le rassemblement tout en maintenant un important dispositif de sécurité autour de la place – avec contrôles d’identité et fouilles.
Le Nouveau parti anticapitaliste d’Olivier Besancenot, le Parti des indigènes de la République et l’Union juive française pour la paix avaient appelé à braver l’interdiction de la manifestation.
Le calme a duré plus ou moins deux heures, puis des affrontements entre les forces de l’ordre et les « manifestants » se sont déroulés et qui ont pris fin un peu avant 20h.
De jeunes hommes hissés sur une colonne ont activé des fumigènes aux couleurs de la Palestine et brûlé un drapeau israélien, sous des applaudissements.
Les journalistes de l’AFP ont vu des personnes lancer des cannettes en direction des forces de l’ordre, qui ont riposté en faisant usage de gaz lacrymogène, face à un service d’ordre du rassemblement manifestement dépassé.
De jeunes, certains cagoulés ou le visage masqué par des foulards, jetaient également divers projectiles, des pierres notamment, sur des vitrines de magasins. Un abribus a été détruit.
A Barbès, quartier populaire parisien, où une manifestation déjà interdite avait dégénéré le 19 juillet, la police a procédé en début d’après-midi à l’interpellation de quatre personnes appelant à se rendre à la manifestation.

La justice française avait confirmé à la mi-journée l’interdiction de la manifestation décidée par la police. Et le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve avait solennellement appelé les organisateurs à renoncer à leur initiative, avertissant qu’ils seraient tenus pour « responsables d’éventuels débordements (…) et passibles de sanctions pénales ».
Au total, environ 2 000 policiers et gendarmes ont été mobilisés dans la capitale, déployés place de la République et dans le quartier de la Bastille où des incidents avaient éclaté près d’une synagogue à l’issue d’une manifestation le 13 juillet.
Selon des sources policières, les forces de l’ordre ont reçu des « consignes de fermeté » pour intervenir « très rapidement et interpeller » en cas notamment de « slogans ou manifestations antisémites ».
« Cette manifestation est illégale, mais pour nous elle est plus que légitime. Il s’agit de manifester notre solidarité avec un peuple qui est en train de se faire massacrer », expliquait Hugo, jeune militant du Nouveau parti anticapitaliste (NPA, extrême gauche).
« Nous voulons défendre notre point de vue, or on ne peut agir pour la Palestine qu’en parlant et en manifestant », assurait Sarah 19 ans, autocollant « la Palestine aux Palestiniens » sur le tee-shirt.
Le président François Hollande avait assuré le 14 juillet qu »il n’était pas question de laisser « s’importer » en France le conflit israélo-palestinien.
Vendredi soir, le Premier ministre Manuel Valls a adressé un message d’apaisement aux musulmans de France, en se rendant dans une mosquée de la banlieue sud de Paris pour la rupture du jeûne du ramadan.
« Quand des casseurs se réclament d’une forme dévoyée de l’islam, ce sont les musulmans qui souffrent les premiers car ces actes nourrissent des amalgames insupportables », a-t-il déclaré.
« Des manifestations s’organisent, c’est un droit fondamental ! Mais rien, jamais, ne pourra justifier la violence, la haine de l’autre ».
Contrairement à d’autres manifestations propalestiniennes en Europe qui ne suscitent pas de polémique, en France l’opposition à l’opération israélienne s’est doublée d’une controverse sur l’interdiction de certains rassemblements et la montée de l’antisémitisme.
Critiqué par sa gauche et par une partie de l’opposition de droite pour avoir joué le pompier pyromane en interdisant des manifestations, le président Hollande répète qu’il faut « faire respecter l’ordre républicain et refuser les slogans qui expriment la haine ».
De leur côté, les ONG Amnesty international et Human Rights Watch se sont inquiétées des restrictions à la « liberté de réunion ».
Des manifestations propalestiniennes étaient organisées samedi dans plusieurs autres villes françaises, comme chaque week-end depuis le début de l’opération israélienne à Gaza.
A Paris, les chefs de diplomatie des Etats-Unis, du Qatar, de Turquie et de pays européens avaient demandé une prolongation de la trêve pour « 24 heures renouvelables », une demande également formulée par le coordinateur spécial pour le Moyen-Orient à l’ONU Robert Serry afin de permettre « aux civils de récupérer et d’enterrer leurs morts ».