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Refonte du système judiciaire: Lapid appelle à la reprise des négociations

Accusant le gouvernement de chercher à nommer "des marionnettes soumises", le chef de l'opposition averti que la loi sur la raisonnabilité fera disparaître "les gardiens du temple"

Le leader de l'opposition Yaïr Lapid s'exprimant lors d'une réunion de la faction Yesh Atid, à la Knesset, le 3 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le leader de l'opposition Yaïr Lapid s'exprimant lors d'une réunion de la faction Yesh Atid, à la Knesset, le 3 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le leader de l’opposition Yair Lapid a dénoncé lundi le gouvernement pour ses efforts visant à nommer « des marionnettes soumises », selon ses propres mots, à des postes d’autorité – quelques heures avant le vote en première lecture du projet de loi visant à limiter l’usage de la notion juridique de « raisonnabilité » lors du réexamen, par les juges, des décisions prises par les responsables élus.

« C’est un gouvernement qui a abandonné toute retenue. Abandonner l’usage, par les magistrats, du principe de ‘raisonnabilité’ sous la forme qui a été soumise à la Knesset nous dit une chose et une seule : la loi ne s’applique pas à eux », a expliqué Lapid lors d’une réunion de faction de son parti Yesh Atid.

« Ils ont le droit de limoger tous les gardiens du temple, depuis la procureure générale et jusqu’en dernier échelon de la hiérarchie, et ils ont le droit de les remplacer par des marionnettes soumises et obéissantes qui n’interviendront pas quand ils pourriront le pays », a-t-il averti.

Lapid et Benny Gantz, dans l’opposition, ont tous les deux appelé la coalition au pouvoir, dans des déclarations distinctes, à geler la loi consacrée à la limitation de l’usage de la ‘raisonnabilité’ et à relancer les négociations visant à trouver un compromis dans le cadre du plan de refonte du système de la justice israélien – des appels qui ont été ignorés ou rejetés par les personnalités du gouvernement.

Lundi soir, la Knesset doit voter en première lecture la législation qui interdira aux juges de procéder au réexamen judiciaire des décisions prises par le cabinet, par les ministres et par d’autres responsables élus dont la charge n’a pas été précisée à l’aune de la « raisonnabilité ». Ce sera le premier vote en plénière d’un élément relevant du projet de refonte radicale du système judiciaire israélien depuis que le Premier ministre Benjamin Netanyahu l’avait mis en pause, au mois de mars dernier.

Des manifestations contre ce plan gouvernemental qui vise à affaiblir le système judiciaire face à la toute-puissance politique devraient avoir lieu en réponse, mardi, sur tout le territoire israélien.

Des Israéliens manifestant contre la réforme du système judiciaire, à Tel Aviv, le 8 juillet 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

Après avoir abandonné les pourparlers visant à trouver un compromis, à la mi-juin, au vu de l’échec de la coalition à réunir la Commission de sélection des juges et à remplir ses rangs – cette Commission est chargée de nommer tous les magistrats en Israël – Lapid et Gantz ont appelé, lundi, à une reprise des discussions organisées sous les auspices du président Isaac Herzog.

« Ce n’est pas encore trop tard. Il est encore possible de tout stopper », a déclaré Lapid tandis que le parti HaMahane HaMamlahti a diffusé une vidéo dans la matinée de lundi qui exhortait la coalition à revenir à la table des négociations.

Prenant la parole au début de la réunion de sa faction au parlement, Gantz a précisé que sa formation ne reprendrait pas part aux pourparlers dans le cadre du programme de refonte radicale du système de la justice si ces derniers ne portaient pas sur tous les éléments du projet – et qu’ils ne portaient pas seulement sur l’usage de la notion juridique de la « raisonnabilité ».

Le leader de HaMahane HaMamlahti a ajouté qu’il avait vivement recommandé au président Isaac Herzog d’organiser une réunion en présence de lui-même, de Lapid et de Netanyahu avant le vote de la législation sur la « raisonnabilité » pour évoquer une relance immédiate des pourparlers et l’arrêt du processus législatif en cours.

Toutes les formations de l’opposition ne sont néanmoins pas favorables aux discussions. Cela fait longtemps qu’Avigdor Liberman, à la tête de Yisrael Beytenu, rejette ces pourparlers qui, selon lui, sont de la poudre aux yeux et il a exhorté Lapid et Gantz à ne pas reprendre les négociations avec la coalition dans la journée de lundi, disant qu’il était impossible de croire aux promesses faites par Netanyahu.

Le leader de Yisrael Beytenu a aussi estimé – comme l’avait fait Lapid – que Netanyahu a l’intention de limoger la procureure générale Gali Baharav-Miara à travers une décision ministérielle, déclarant que Netanyahu « a lancé une campagne de lynchage à l’encontre de la procureure-générale » dans le cadre d’un plan visant à l’obliger à présenter sa démission de son propre gré.

La procureure générale Gali Baharav-Miara arrivant pour assister à la réunion hebdomadaire du cabinet au Bureau du Premier ministre, à Jérusalem, le 9 juillet 2023. (Crédit : Gil Cohen-Magen/Pool Photo via AP)

Liberman faisait là référence à une réunion du cabinet, dimanche, pendant laquelle de nombreux ministres s’en sont pris avec vivacité à Baharav-Miara et aux forces de l’ordre pour leur prise en charge des manifestants qui s’opposent au gouvernement.

Le ministre d’extrême-droite Bezalel Smotrich a appelé lundi à ce que des pourparlers dans le cadre du plan de refonte du système judiciaire aient lieu parallèlement à la campagne législative, et à ce que le projet de loi sur la notion juridique de « raisonnabilité » ne soit pas mis en pause.

« Il y a des discussions en permanence. Je ne comprends pas cette idée qu’il faut s’arrêter pour laisser place au dialogue. La Knesset est un lieu de dialogue, » a-t-il déclaré pendant la réunion de faction de son parti Hatzionout HaDatit à la Knesset. « C’est ce qu’il y a de plus démocratique au monde ».

Un manifestant opposé au plan de refonte du système judiciaire israélien a interrompu les propos de Smotrich, disant au chef de la formation « de choisir le peuple d’Israël, la Terre n’est pas tout », avant d’être expulsé de la salle de conférence.

Dans la matinée de lundi, Smotrich avait émis un communiqué en soutien du projet de loi sur l’usage de la « raisonnabilité », accusant l’opposition de se montrer contrariante.

« Si l’opposition se comportait de manière honnête, elle soutiendrait cet amendement nécessaire mais malheureusement, tout n’est que posture dans l’opposition et elle s’oppose à tout », a-t-il écrit, ajoutant que « son véritable objectif est de renverser le gouvernement ».

Même son de cloche – quoique plus strident – chez le leader d’extrême-droite Itamar Ben Gvir, qui a tenu des propos féroces lors d’une conférence organisée en hommage au mouvement Habad dans la journée de lundi.

Le ministre des Finances Bezalel Smotrich dirige une réunion de faction de Hatizonout HaDatit, son parti d’extrême-droite, le 10 juillet 2023. (Crédit : Chaim Goldberg/Flash90)

« Concernant ce sujet de la ‘raisonnabilité’, nous devons non seulement nous occuper de cette doctrine en particulier mais aussi changer la Commission de Sélection judiciaire et faire adopter le projet de loi sur les conseillers juridiques ; nous devons introduire tous ces éléments qui apporteront au peuple d’Israël la gouvernance, la sécurité et la victoire, » a indiqué le ministre de la Sécurité nationale, évoquant d’autres projets de loi entrant dans l’enveloppe du programme de refonte du système judiciaire israélien.

Optant pour un positionnement favorable au compromis, le ministre de l’Économie Nir Barkat, du Likud – qui appartient au parti de Netanyahu – a déclaré que la coalition devait reprendre les négociations à l’issue du premier vote sur la loi portant sur la « raisonnabilité ».

Dans un entretien accordé au site ultra-orthodoxe Kikar Hashabat, Barkat a déclaré que « si vous me demandez mon avis, je recommanderais de revenir à la résidence du président entre la première lecture, la deuxième et la troisième pour tenter de mettre au point une clause sur la ‘raisonnabilité’ qui convienne au maximum de monde parce que c’est possible ».

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