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Robert Badinter raconte Idiss sa grand-mère, au Mémorial de la Shoah

A travers un livre mêlant souvenir et imagination, l'ancien Garde des Sceaux retrace la vie brisée du Yiddishland et la France pétainiste autour du destin de sa grand-mère

Robert Badinter, à Paris, le 25 novembre 2013. (Crédit : Eric Feferberg/AFP)
Robert Badinter, à Paris, le 25 novembre 2013. (Crédit : Eric Feferberg/AFP)

Le 28 novembre prochain le Mémorial de la Shoah de Paris accueille Robert Badinter qui viendra évoquer son dernier livre Idiss. La rencontre sera diffusée en direct sur le site du Mémorial – les réservations étant d’ores et déjà complètes.

Idiss est la grand-mère de Robert Badinter, originaire de Bessarabie, alors en plein Yiddishland; une zone où vivaient 11 millions de Juifs à cheval sur la Pologne, la Lituanie, la Biélorussie, l’Ukraine, la Roumanie et la Hongrie avant l’extermination ordonnée par l’Allemagne nazie.

« C’est ce monde perdu de la yiddishkeit, décimé par la Shoah, que fait revivre Robert Badinter dans le récit vibrant de sensibilité qu’il consacre à sa grand-mère maternelle » née en 1863 près de Kichniev raconte L’Express.

Dans cet entretien, Robert Badinter, ancien garde des Sceaux, porteur de la loi abolissant la peine de mort, décrit l’écriture de ce livre comme « un geste vers mon enfance d’abord, et un geste vers mes parents ensuite. J’ai compris à ce moment-là – ce qui n’est pas sans enseignement pour notre époque – que le fait de pouvoir se dire ‘j’ai eu des gens bien comme parents’ est un grand réconfort dans la vie ».

« J’ai l’impression d’emporter avec moi un monde mort, aux synagogues détruites et aux tombes éventrées,  se dévoile Robert Badinter. Et je me dois d’en témoigner, pour que l’oubli ne l’emporte pas tout à fait. Bien sûr, je reconstitue certains détails par l’imagination, mais j’espère avoir été fidèle à l’essentiel ».

Ce sont deux des fils d’Idiss, Avroum et Naftoul, qui décident de quitter Kichnev en premier en 1907 après une série de pogroms meurtriers. Ce sera finalement pour la France, dont ces juifs d’Europe de l’est retiennent une chose : ce pays a été capable de « se diviser pour le sort d’un petit capitaine juif » et ils y jouissent des mêmes droits que les autres citoyens. Si loin de leur situation dans la Russie tsariste…

Idriss les rejoint, mais elle est déjà âgée et malade. Elle le sera encore le jour de la grande rafle dite de Kippour en 1942 quand elle est arrêtée dans son immeuble du faubourg Montmartre. Le récit qu’en fait l’ancien Garde des sceaux est glaçant :

« Des gendarmes français sont montés la chercher. Ils l’ont couchée sur une civière. Terrorisée, elle poussait des hurlements dans l’escalier. Ses cris ont suscité la pitié des voisins qui ont réclamé des gendarmes qu’ils la laissent chez elle. Surgit alors un jeune gestapiste français ; il s’interpose, rabroue les habitants et s’exclame en sortant un pistolet : ‘Ecoutez-moi bien, ça fera jamais qu’une youpine de moins. Et celui auquel cela ne plaît pas, je le brûle !’ Dans le silence, le cortège a continué sa descente jusqu’au fourgon de police et, de là, à Drancy. La même nuit, ma grand-mère a été envoyée à Auschwitz. Elle est morte dans le wagon de déportation ».

Idiss, par Robert Badinter. Ed. Fayard, 230 p., 20 €

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