Shaked critiquée pour avoir rencontré les parents des ados soupçonnés de meurtre
Un juge a ordonné d'enquêter sur une plainte d'interrogatoire violent déposée par l'un des suspects entre les mains du Shin Bet
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
La ministre de la Justice Ayelet Shaked a rencontré lundi les familles des cinq mineurs juifs arrêtés la semaine dernière, qui sont soupçonnés d’être impliqués dans des jets de pierre qui, au mois d’octobre, ont entraîné la mort d’une Palestinienne de 47 ans.
L’organisation juridique Honenu, qui représente quatre des cinq suspects dans l’affaire du meurtre d’Aisha Rabi, ont confirmé cette visite et elle a dit dans un communiqué que les familles remerciaient la ministre pour le temps qu’elle leur avait accordé.
Les cinq adolescents sont soupçonnés d’avoir lancé des pierres en direction de voitures palestiniennes le 12 octobre, entraînant la mort d’Aisha Rabi, mère de huit enfants, tuée par un projectile qui a traversé le pare-brise du véhicule à bord duquel elle circulait en compagnie de son époux et de sa fille.
Tamar Zandberg, présidente du parti du Meretz de gauche, a fustigé la rencontre entre Shaked et les familles, clamant que la formation HaYamin HaHadash de la ministre de la Justice avait des « normes différentes selon qu’on soit Juif ou Arabe ».
« Au lieu de se livrer à l’introspection, elle fait un calcul politique et se jette dans les bras de familles accusées de terrorisme », a commenté Zandberg dans une déclaration.
C’est le deuxième contact établi par Shaked avec les parents des terroristes juifs présumés qui a été rapporté.
La récente co-fondatrice du parti HaYamin HaHadash s’était déjà entretenue avec la mère de l’un des adolescents jeudi dernier par téléphone, lui disant d’être « forte » et ajoutant qu’elle transmettrait aux autorités concernées ses inquiétudes portant sur le traitement de son fils dans une prison israélienne.
Evoquant cet appel, les activistes de gauche avaient critiqué Shaked pour cette démonstration d’amabilité envers la mère d’un terroriste présumé, arguant qu’elle n’aurait pas adopté la même attitude si le suspect avait été Palestinien.
C’est la mère qui avait appelé la ministre au téléphone – un entretien dont le contenu avait fuité auprès de la chaîne Kan, vendredi – la suppliant de parler au procureur de l’Etat Shai Nitzan et de s’assurer que son fils pourrait rencontrer un avocat.
La cour de district de Lod avait validé une requête soumise par les responsables de sécurité, qui avaient demandé d’interdire aux trois suspects de cette enquête majeure de rencontrer un avocat depuis leur arrestation, dimanche dernier.
Deux autres suspects ont été appréhendés presque une semaine plus tard et eux aussi ont été dans l’incapacité de rencontrer un avocat.
L’organisation Honenu a toutefois annoncé lundi qu’elle avait trouvé un accord avec le service de sécurité du Shin Bet, sous les termes duquel les deux adolescents pourront rencontrer un conseiller pour la première fois dès mardi matin.
La loi israélienne permet aux autorités de reporter la visite d’un avocat auprès d’un suspect dans une affaire de terrorisme pendant 21 jours maximum – un report qui peut faire l’objet d’un appel judiciaire.
En 2015, Shaked avait été vivement critiquée pour avoir rencontré la mère d’un jeune américano-israélien qui avait été arrêté dans l’affaire de l’attentat à la bombe artisanale de Duma qui avait fait trois morts – membres d’une même famille palestinienne – et qui avait été commis par des extrémistes juifs.
Les juges demandent une enquête suite aux plaintes de torture
Lundi également, Honenu a rapporté qu’un magistrat de la cour de Rishon Lezion avait ordonné à la police d’enquêter suite à la plainte déposée par l’un des suspects dans l’affaire du meurtre de Rabi, qui a affirmé avoir été violemment interrogé par les agents de sécurité du Shin Bet.
Cette directive a été donnée au cours d’une audience qui a eu lieu dimanche, au cours de laquelle le juge a prononcé le maintien en détention de l’adolescent de 16 ans jusqu’à jeudi. Le même jugement a été rendu concernant les quatre autres suspects.
Pour sa part, le Shin Bet a défendu ses pratiques tout au long de l’enquête, disant qu’elles avaient toutes été conformes à la loi.
En même temps, le service de sécurité a clamé dans une déclaration, dimanche, qu’aucun des suspects ne s’était plaint d’éventuels mauvais traitements dans les centres de détention israéliens lors de leur apparition devant le juge.
Une copie du protocole de dimanche, obtenue par le Times of Israel, a confirmé l’assertion de Honenu que cela n’avait pas été le cas et que l’un des suspects avait indiqué au juge avoir été harcelé et violemment interrogé entre les mains du Shin Bet.