Tair Rada: nouvelle piste et potentielle réouverture du procès de Roman Zadorov
Le procureur d'Etat sortant Shai Nitzan a déclaré avoir reçu un avis juridique de la part de l'équipe d'avocats de Zadorov qui mérite d’être "étudiée en profondeur"
Le procureur d’Etat sortant Shai Nitzan a reconnu mercredi que son bureau avait reçu de nouvelles preuves qui pourraient conduire à la réouverture d’un procès d’un homme incarcéré depuis plus de 10 ans pour le meurtre d’une adolescente.
En octobre, l’avocat Yoram Halevi a déposé une requête auprès de la Cour suprême au nom de Roman Zadorov, un Israélien originaire d’Ukraine, qui avait été condamné à la prison à vie pour le meurtre atroce en 2006 de Tair Rada.
Halevi affirmait que de nouvelles preuves indiquaient que quelqu’un d’autre avait commis ce meurtre.
Dans une interview avec le radiodiffuseur public Kan, Nitzan a refusé de donner des détails sur l’affaire, mais a déclaré que son bureau avait reçu un avis juridique de la part de l’équipe d’avocats de Zadorov, qui « vient d’une direction complètement différente et nous devons l’étudier en profondeur ».
Rada avait été retrouvée morte dans les toilettes de son école de Katzrin, sur le plateau du Golan. Elle présentait des entailles à la nuque, des blessures à l’arme blanche sur tout le corps et des marques de coups à la tête.
Mais les avocats de Zadorov et des milliers de personnes insistent sur le fait qu’il a été piégé et accusé d’un acte qu’il n’a pas commis, et que l’auteur du meurtre est en réalité une femme, atteinte d’une maladie mentale, dont le nom reste sous embargo.
Au terme d’une analyse ADN réalisée par les enquêteurs, l’institut médico-légal Abu Kabir avait annoncé en octobre 2018 qu’un cheveu retrouvé sur le corps de la victime appartenait à l’ex-petit ami de la femme, relançant les spéculations sur l’identité de l’assassin et sur l’éventuelle nécessité d’un nouveau procès. Ses avocats avaient alors réclamé l’analyse de 50 autres cheveux retrouvés sur place.
Ces développements avaient poussé le ministère public à consulter le ministère de la Justice et des représentants de la police au sujet de l’affaire.
« Beaucoup de nouvelles preuves démontrent sans équivoque l’innocence de Roman et qu’il n’a pas pu l’assassiner », avait plaidé Yoram Halevi devant le tribunal en octobre, d’après des informations du site Ynet.
L’ex-petit ami, dont le nom reste également sous embargo, a été désigné dans les médias israéliens par les initiales A.H., tandis que la femme a été identifiée sous les initiales O.K.
Quelques jours après l’annonce des nouvelles preuves médico-légales, le quotidien Yedioth Ahronoth avait rapporté qu’un témoin avait remis sa déposition dans un commissariat de Nazareth Illit, assurant qu’O.K avait reconnu être à l’origine de la mort de Tair Rada.
O.K. aurait confié à trois personnes avoir assassiné l’adolescente.
Le bureau du procureur de l’Etat et le ministère de la Justice avaient expliqué dans un communiqué que toutes les preuves contre O.K avaient été minutieusement examinées et qu’elles s’étaient avérées non fiables.
La Cour suprême avait auparavant rejeté le témoignage d’A.H. tandis que la police avait conclu que cette version des faits n’était pas fiable et qu’il s’agissait d’une tentative de piéger son ancienne compagne, avait fait savoir Ynet en 2018.
Peu après le meurtre, Roman Zadorov, qui travaillait comme homme d’entretien à l’école à cette époque, avait été arrêté et accusé d’homicide. Deux semaines après son arrestation, la police annonçait que celui-ci avait avoué avoir tué Tair Rada et raconté le crime. Mais le lendemain, l’avocat de Zadorov indiquait que son client s’était rétracté. Il avait alors déclaré que les aveux et la reconstitution des évènements avaient été obtenus sous la contrainte et qu’ils révélaient des inexactitudes.
En 2010, près de 4 ans après l’arrestation, le parquet de Nazareth l’avait condamné à la prison à perpétuité.
En 2015, un panel de trois juges de la Cour suprême avait confirmé la condamnation de Roman Zadorov, à deux avis contre un. L’opinion divergente venait du juge Yoram Danziger, pour qui il y avait un doute raisonnablement suffisant pour innocenter l’homme.
Les appels de l’accusé furent rejetés, et la présidente de la Cour suprême, Miriam Naor, déclara que malgré l’intérêt porté par le public à ce dossier, il n’y avait aucune « justification juridique » susceptible d’entraîner un nouveau procès.